Tragédie de L’Isle-Verte: le copropriétaire réclame une enquête publique

QUÉBEC – La tragédie survenue à L’Isle-Verte en janvier dernier était d’une ampleur telle que seule une enquête publique pourra faire toute la lumière sur les causes de cet incendie majeur qui a fait 32 victimes, selon le copropriétaire de la résidence détruite.

Par l’entremise de son avocat, Me Guy Bertrand, le copropriétaire de la Résidence du Havre, Roch Bernier, a décidé d’interpeller le premier ministre Philippe Couillard afin de l’exhorter à déclencher au plus tôt une enquête publique sur ce drame survenu le 23 janvier.

Près de sept mois plus tard, M. Bernier s’impatiente. En conférence de presse à Québec, lundi, il a estimé que la population avait le droit de savoir ce qui s’était réellement passé durant la nuit fatidique.

Il dit avoir peine à se remettre de cette tragédie. «Pas facile. J’évite même d’aller en ville parce que je me fais accrocher. Très difficile, et je ne suis pas gêné de le dire, les larmes coulent assez souvent», a-t-il dit, frustré de ne pas encore avoir obtenu de réponses à toutes les questions qu’il se pose.

La Résidence du Havre, située à L’Isle-Verte, près de Rivière-du-Loup, abritait une cinquantaine de personnes âgées, dont certaines en perte d’autonomie.

M. Bernier a son idée de ce qui a pu causer et aggraver la tragédie. Il reproche à la municipalité de L’Isle-Verte de ne pas avoir préparé un plan d’intervention d’urgence et d’évacuation en cas de sinistre et il s’interroge sur le temps de réaction du service des incendies la nuit du drame.

En conséquence, en juillet, M. Bernier avait annoncé sa décision de se joindre à une poursuite de 3,8 millions $ en cour supérieure contre la municipalité. Le montant comprend une somme de 2,3 millions $ demandée par une compagnie d’assurances de L’Isle-Verte.

Quand il est arrivé sur place, la nuit du drame, M. Bernier dit avoir vu des résidants brûler vifs, d’autres sauter dans le vide des étages supérieurs pour échapper aux flammes, tandis que d’autres criaient pour être secourus. «Ils étaient où les pompiers?», demande M. Bernier, qui se dit blessé profondément.

Il estime qu’un propriétaire de résidence «ne peut pas tout faire tout seul, donc la municipalité a une très grande responsabilité».

La tragédie de L’Isle-Verte fait déjà l’objet de trois enquêtes menées par la Sûreté du Québec, le coroner et le commissaire aux incendies.

«Une enquête comme celle-là ne prend pas sept mois», estime Me Bertrand, qui ne comprend pas pourquoi les délais sont si longs. «C’est complètement inacceptable», ajoute l’avocat qui a mené sa propre enquête et dit avoir découvert «des faits troublants et graves» qui accréditent la thèse de la négligence de L’Isle-Verte et de son service de protection contre l’incendie.

Il fait valoir qu’une enquête du coroner n’est pas le véhicule approprié pour ce genre de tragédies, et que l’enquête du commissaire aux incendies a un mandat trop restreint. Tandis que celle de la Sûreté du Québec visera uniquement à déterminer si oui ou non l’incendie était criminel.

«Seule une enquête publique pourrait permettre à la population du Québec de connaître toute la vérité sur ce drame qui a coûté la vie à tant de nos aînés», écrit Me Bertrand dans sa requête écrite adressée au premier ministre vendredi.

Il rappelle que M. Couillard, lorsqu’il était chef de l’opposition officielle, s’était prononcé en faveur d’une telle enquête publique, et que l’ex-première ministre Pauline Marois avait aussi envisagé ce scénario.

Lundi, en fin de journée, le gouvernement n’avait pas encore réagi à la demande d’enquête publique.