QUÉBEC — N’en déplaise aux nombreuses personnes qui ont succombé aux charmes de la vapoteuse, il ne sera plus possible d’inspirer de la fumée aux cerises ou au gâteau au chocolat avec ces appareils.
Le gouvernement Legault a dévoilé mercredi son nouveau règlement sur le vapotage qui prévoit, notamment, l’interdiction des saveurs autres que celle du tabac pour la vapoteuse. Le ministre de la Santé, Christian Dubé, se dit même prêt à vivre avec l’inévitable contrebande qu’entraînera cette décision.
«Il y aura de la contrebande»
«On sait qu’il y aura de la contrebande. On sait que les gens vont peut-être se le procurer par l’internet. On est conscient de ça, mais de la même façon qu’on a limité les saveurs pour la cigarette, la même chose pour les produits de cannabis, nous on dit, ce n’est pas légal, on ne le fait pas, c’est tout», a-t-il déclaré en mêlée de presse mercredi.
Le projet de règlement prévoit également de limiter la concentration maximale de nicotine dans les liquides de vapotage à 20 milligrammes par millilitre. De plus, il va restreindre la capacité des réservoirs et des capsules à 2 millilitres et le volume maximal des contenants de recharge de liquides à vapoter à 30 millilitres.
Explosion chez les jeunes
Il ne fait aucun doute que les jeunes sont la première cible de ce règlement alors qu’une enquête citée par le gouvernement du Québec démontre que la proportion des jeunes ayant vapoté a quintuplé en six ans, de 4 % en 2013 à 21 % en 2019.
Aux côtés du ministre Dubé, sa collègue responsable du Sport, du Loisir et du Plein air, Isabelle Charest, a fait valoir que les saveurs des produits de vapotage jouent un rôle crucial dans l’attrait de ce «produit extrêmement nocif pour les jeunes».
Un jeune, dit-elle, «commence à vapoter parce qu’il trouve ça le “fun” et trouve ça attrayant, une vapoteuse au goût de fraise. D’ailleurs, le pourcentage de consommation de produits de vapotage pour les jeunes va au-delà de 90 % de produits à saveur sucrée. Donc les jeunes consomment seulement 10 % de la vapoteuse au goût de tabac.»
Christian Dubé a reconnu au passage que «des mesures sur la prévention en santé, on n’en a pas tant que ça» et que celle-ci s’inscrivait dans le programme gouvernemental de prévention en santé pour la promotion des saines habitudes de vie.
Un lobby musclé
Quant aux opposants à la mesure, qui invoquent constamment le fait que le vapotage est aussi reconnu comme une aide à la cessation tabagique, Christian Dubé répond que le tabac lui-même est passé par le même chemin: «Rappelez-vous la question du menthol il y a quelques années. Il y avait le menthol, il y avait les petits cigares aux cerises, etc., et ç’a été vu comme la bonne mesure à faire d’enlever cet attrait-là par de fausses saveurs pour les gens qui avaient besoin peut-être d’arrêter de fumer», a-t-il fait valoir, en invoquant aussi les diverses mesures et programmes déjà en place.
Christian Dubé reconnaît que les défenseurs des saveurs dans le vapotage, derrière qui se cachent les cigarettiers, ont livré une intense partie de bras de fer dans l’espoir de bloquer cette décision: «C’est excessivement payant pour les lobbys de cigarettes de s’adjoindre avec le vapotage, parce que c’est une façon d’encourager les nouveaux fumeurs. Alors c’est normal qu’il y ait du lobby», a-t-il simplement affirmé.
Le projet de règlement fait suite aux recommandations du groupe spécial d’intervention sur le vapotage, notamment composé de représentants de divers ministères et organismes gouvernementaux, de l’Institut national de santé publique (INSPQ), de cliniciens et de directeurs de santé publique.
Les changements nécessiteront une modification du règlement d’application de la Loi concernant la lutte contre le tabagisme. La publication du règlement sera suivie d’une période de consultations de 45 jours.