MONTRÉAL — Malgré les hordes de consommateurs inquiets d’avoir des provisions suffisantes afin d’affronter l’isolement en cette période de pandémie de la COVID-19, les grandes chaînes d’alimentation assurent que des pénuries ne sont pas à craindre.
Allées de supermarchés bondées, tablettes dégarnies et files d’attente interminables aux caisses: ces images qui alimentent les craintes de plusieurs ont largement circulé sur les réseaux sociaux depuis l’isolement préventif décrété par Québec pour limiter la propagation du nouveau coronavirus.
En tentant de lancer un appel au calme, vendredi, le directeur des relations gouvernementales du Conseil canadien du commerce de détail (CCCD), Jean-François Belleau, a estimé qu’il n’y avait pas de craintes à avoir.
«Oui, c’est impressionnant de voir des tablettes vides, mais elles sont remplies en fin de journée ou le lendemain, a-t-il expliqué, au cours d’une entrevue téléphonique. On ne prévoit pas par exemple de pénurie de papier hygiénique.»
Le CCCD représente de nombreux joueurs présents dans le secteur l’alimentation, comme Metro, Les compagnies Loblaw, Sobeys, Walmart Canada et Costco.
Plusieurs reportages ont fait état de tablettes de papier hygiénique vidées par des consommateurs inquiets de se retrouver en isolement. Les stocks sont disponibles, a assuré M. Belleau, soulignant que près de «80 % de la production» provenait du Québec.
«La contrainte de cet article, c’est qu’il est volumineux, a-t-il dit. Cela prend beaucoup de place dans les entrepôts. Donc, les détaillants, dans les épiceries, en stockent tout simplement moins.»
Dans son point de presse quotidien à l’Assemblée nationale, le premier ministre François Legault a tenté de calmer les esprits en affirmant qu’on ne prévoyait «aucune pénurie de nourriture» et que les épiceries «vont continuer d’être approvisionnées».
Cela n’a toutefois pas empêché les consommateurs à se ruer dans les supermarchés, ce qui a donné lieu à des accrochages. À Laval, des policiers ont même été appelés en renfort au Costco pour gérer le volume de clients.
Mercredi, avant que le gouvernement Legault annonce de nouvelles règles pour contenir la COVID-19, le président et chef de la direction de Metro, Eric La Flèche, n’avait pas semblé préoccupé par la réaction des consommateurs ontariens — qui avaient commencé à effectuer des provisions — sur l’approvisionnement des épiceries dans cette province.
«Il y a une certaine hausse des ventes avait-il expliqué, au cours d’une entrevue téléphonique. Il y a des effets de réserve, on commence à voir cela dans nos magasins.»
Selon le CCCD, ce sont surtout les produits d’hygiène ainsi que les produits secs, comme le riz et les légumineuses, qui sont en demande. Dans les deux cas, il n’y a pas de rupture de stock. Il en va de même pour les produits frais comme la viande, a affirmé M. Belleau.
Celui-ci a rappelé que lors des récents blocus ferroviaires, la chaîne d’approvisionnement des géants de l’alimentation n’avait pas été affectée au point de provoquer d’importantes pénuries de denrées.
Dans le contexte actuel, le directeur principal du laboratoire de sciences analytiques en agroalimentaire à l’Université Dalhousie, Sylvain Charlebois, ne s’est pas étonné de voir les consommateurs envahir les supermarchés.
«Ce sont d’abord et avant tout des êtres humains, parfois irrationnels, a-t-il expliqué, au cours d’un entretien téléphonique. C’est tout à fait normal de voir ce genre de comportement.»
Toutefois, M. Charlebois estime qu’il «ne manquera de rien» dans les épiceries.
Contrairement aux désastres naturels qui se manifestent souvent spontanément, le nouveau coronavirus se propage depuis maintenant plusieurs semaines, ce qui procure davantage de temps aux détaillants pour se préparer.
«Si vous sentez le besoin de sortir pour aller acheter quelque chose, allez-y, mais de façon rationnelle, a dit M. Charlebois. Achetez ce dont vous avez besoin, mais en effectuant plusieurs sorties.»
Dans une note d’analyse publiée en début de semaine, l’expert avait estimé qu’à peine le quart des ménages canadiens maintenaient «au cours de l’année un approvisionnement alimentaire suffisant pour survivre de façon autonome pendant trois à quatre jours» et qu’ils achetaient le reste au besoin.
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