QUÉBEC — Le gouvernement Legault devra «faire mieux» s’il veut endiguer la crise de santé mentale au Québec, estime l’opposition officielle.
Elle réagissait mercredi à l’ajout de 25 millions $ récurrents en santé mentale pour les jeunes de 0 à 25 ans. Au moment d’en faire l’annonce, le ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux, Lionel Carmant, a nié qu’il y ait une «crise» de santé mentale.
Selon lui, malgré l’augmentation de la demande, les listes d’attente pour avoir accès aux services de santé mentale diminuent tant chez les adultes que les jeunes.
Sauf que chez les jeunes, la réduction est plus lente. «On fait un premier pas ciblé pour ceux qui en ont plus besoin, les jeunes, a déclaré le ministre. Il faut utiliser les montants qu’on a de disponibles (…) à bon escient.»
Ce financement représente l’équivalent de 250 nouvelles ressources à temps complet. Les établissements pourront rehausser les heures travaillées du personnel déjà en place, ou embaucher de nouvelles ressources, a expliqué M. Carmant.
Il a affirmé que son objectif était d’améliorer la santé des jeunes, en s’attaquant à la détresse psychologique ainsi qu’aux symptômes associés à un trouble mental, comme l’anxiété ou la dépression.
Le neurologue de formation soutient que la pandémie de COVID-19 continuera d’avoir des effets sur la santé mentale pendant des mois. Il encourage les Québécois à aller chercher de l’aide s’ils ressentent des symptômes liés au stress, à l’anxiété ou à la dépression.
L’aide existe, a-t-il dit, en évoquant notamment la ligne 8-1-1, qui traite actuellement environ 10 000 appels par semaine et où il est possible de parler à quelqu’un en trois minutes.
«On a encore de la marge», a-t-il renchéri, en concédant toutefois que «si la demande augmente, il va falloir injecter probablement plus d’argent» en santé mentale.
Bien, mais pas assez
Tout juste avant l’annonce du ministre, l’opposition libérale avait déclaré qu’elle n’accepterait rien de moins qu’un programme d’accès universel à la psychothérapie, où 15 séances par année pourraient être remboursées par la RAMQ.
«Cette annonce-là, elle est bien, mais elle n’est pas assez», a réagi le leader parlementaire du Parti libéral, André Fortin.
«Son 25 millions ne se rendra pas aux aînés, aux entrepreneurs, aux agriculteurs, aux travailleurs de la santé, aux policiers, à tous ces gens qui souffrent et qui ne savent pas où se tourner en ce moment.»
Selon les libéraux, un programme d’accès universel à la psychothérapie coûterait 300 millions $, un montant qui est «sous-estimé», croit Lionel Carmant, qui ne doute pas qu’un tel programme serait populaire.
«Quinze séances de psychothérapie pour tous les Québécois, c’est sûr que tout le monde va s’aligner pour ça», a-t-il déclaré.
De son côté, le co-porte-parole de Québec solidaire, Gabriel Nadeau-Dubois, a qualifié l’annonce de mercredi de «bonne première réponse». Toutefois, il appelle à améliorer les conditions de travail des professionnels, sans quoi les postes resteront vacants.
Par ailleurs, il ne pense pas que les 25 millions $ seront suffisants pour régler la crise de santé mentale.
À ce chapitre, il se désole du refus du ministre de reconnaître cette crise «qui déferle sur le Québec». «C’est un déni de la réalité, a-t-il tranché. À chaque jour, il y a des articles qui révèlent des statistiques inquiétantes sur l’explosion de la détresse psychologique au Québec.»
M. Carmant souligne que 14 millions $ ont déjà été investis pour augmenter l’accès au programme d’aide aux employés du réseau de la santé, mais «ça n’a pas été utilisé de façon évidente jusqu’à présent, donc on dit aux gens de l’utiliser».
Pour sa part, le Parti québécois veut voir le gouvernement s’activer sur le terrain «à partir de demain», c’est-à-dire «aller dans les milieux où les gens les plus vulnérables sont, que ce soit dans le milieu scolaire, le milieu de la santé, chez les travailleurs (…) dans une démarche beaucoup plus proactive», a résumé le député Joël Arseneau.