Les garde-côtes américains affirment que les cinq occupants du Titan sont morts

MONTRÉAL — Les garde-côtes américains ont affirmé jeudi après-midi qu’une implosion catastrophique a détruit le submersible Titan, tuant les cinq personnes à bord alors qu’il descendait au fond de l’Atlantique Nord lors d’une expédition sur l’épave du Titanic. 

Le contre-amiral John Mauger a indiqué qu’un cône de queue du submersible et d’autres débris du petit sous-marin avaient été retrouvés à moins de 500 mètres de la proue du Titanic. Il a confirmé que les débris étaient compatibles avec une dépressurisation à bord du petit sous-marin.

Mais il est trop tôt pour dire exactement à quel moment l’implosion catastrophique s’est produite, a indiqué la garde côtière américaine. Ainsi, on ne sait pas si l’implosion s’est produite dimanche ou dans les jours qui ont suivi, lors des opérations internationales pour retrouver le submersible manquant.

Le contre-amiral Mauger a indiqué jeudi que les garde-côtes avaient immédiatement informé les familles des cinq occupants du submersible.

Le Titan, exploité par la société américaine OceanGate Expeditions, avait perdu le contact avec les navires de surface dimanche matin, alors qu’il s’approchait de l’épave du Titanic lors d’une plongée de 3800 mètres qui prend généralement environ deux heures. Le site éloigné se trouve à environ 700 kilomètres au sud-est de l’est de Terre-Neuve.

Le cône de queue distinctif de Titan et d’autres débris ont été découverts jeudi matin par le personnel qui télécommandait un petit submersible depuis l’Horizon Arctic, un remorqueur et navire de ravitaillement hauturier battant pavillon canadien.

En tout, cinq gros morceaux du submersible ont été repérés. Un expert des garde-côtes a déclaré que leur emplacement correspondait à l’endroit où le navire devait se trouver lorsqu’il a perdu le contact avec les navires de surface dimanche matin.

On ne sait pas exactement ce qui est arrivé à Titan, mais selon les garde-côtes l’étendue de son champ de débris indiquait qu’il s’était brisé dans la colonne d’eau au-dessus du navire à vapeur, qui a sombré le 15 avril 1912. 

Les bruits détectés n’étaient pas liés

M. Mauger a par ailleurs confirmé que l’implosion ne s’est pas produite pendant que l’opération de recherche était en cours, car les aéronefs larguant des bouées équipées de sonar auraient enregistré ce son.

«Nous avions des appareils d’écoute dans l’eau partout et n’avons entendu aucun signe de défaillance catastrophique», a-t-il expliqué, ajoutant que les véhicules télécommandés au fond de l’océan continueraient à recueillir des preuves de ce qui s’était passé.

Lorsqu’on lui a demandé s’il y avait une possibilité de récupérer les corps des victimes, M. Mauger a répondu : «C’est un environnement incroyablement hostile là-bas au fond de la mer (…) nous continuerons à travailler et à fouiller la zone, mais je n’ai pas de réponse pour l’instant». 

Jeudi après-midi, OceanGate Expeditions a déclaré que les occupants du submersible «avaient malheureusement péri». Il s’agit du pilote et directeur général, Stockton Rush, ainsi que les passagers Shahzada Dawood et son fils Suleman Dawood, Hamish Harding et Paul-Henri Nargeolet.

L’approvisionnement en oxygène de 96 heures à bord du submersible devait probablement pris fin jeudi matin.

La Garde côtière américaine a par ailleurs fait savoir jeudi que les sons et les bruits de claquement détectés sous l’eau dans la zone de recherche du Titan n’étaient probablement pas liés au submersible. 

M. Mauger a affirmé que ces bruits non identifiés n’avaient aucun lien avec les sinistres découvertes de jeudi. Certains experts ont suggéré que les bruits pouvaient provenir de mammifères marins ou d’autres navires dans la région.

Ces sons, entendus pendant deux jours, avaient offert un peu d’espoir aux équipes de recherche et aux proches depuis dimanche. Les experts rappellent toutefois que le fond de l’océan est un environnement «bruyant».

Interdiction du Titanic aux touristes envisagée

Paul Johnston, conservateur de l’histoire maritime au Smithsonian, à Washington, a déclaré que la marque de tourisme extrême d’OceanGate est une entreprise risquée. Interrogé sur la découverte des débris, M. Johnston a dit que la découverte soulevait des questions sur l’interdiction du Titanic aux touristes.

«Je pense que l’accident actuel va probablement diminuer l’intérêt pour le tourisme sur le Titanic et peut-être le “tourisme à risque” en général», a-t-il mentionné dans une entrevue jeudi. Il a rejeté l’idée que ces visites sous-marines sont une forme d’exploration.

«(Ce sont) des gens qui descendent pour voir un cimetière sous-marin, a-t-il affirmé. Peu importe la quantité de fer qu’il y a dans la colonne d’eau autour du navire, ou la vitesse à laquelle les rusticles (sur le Titanic) grandissent. Pour moi, cela n’a aucun intérêt scientifique (…) Je pense que c’est un jouet pour les gens riches — une case à cocher sur une liste de choses à faire.»

Entre-temps, certains experts en ingénierie maritime ont fait part de leurs inquiétudes concernant le Titan, qui n’a jamais été homologué ou certifié par une tierce partie indépendante afin de s’assurer qu’il répondait à certaines normes de sécurité.

William Kohnen, président et chef de la direction de la société d’ingénierie californienne Hydrospace Group, a déclaré qu’environ 95 % de tous les submersibles sont certifiés. Il a dit que le Titan est un cas très particulier. 

M. Kohnen faisait partie d’un groupe d’ingénieurs et de professionnels de l’industrie qui ont écrit en 2018 à la société américaine Rush, qui exploite Titan, pour exprimer leur inquiétude. Leur lettre, obtenue pour la première fois par le New York Times, prévenait que l’approche «expérimentale» de la société vis-à-vis de Titan pourrait avoir des conséquences «catastrophiques».

Dans un billet de blogue de 2019, OceanGate a expliqué que Titan — fabriqué à partir de fibre de carbone et de titane — n’était pas certifié parce que le processus pouvait freiner l’innovation et ne tenait pas compte des erreurs de pilotage, qui sont, selon elle, sont à l’origine de la plupart des accidents maritimes.

Dans des entrevues précédentes, la société Rush a montré les nombreuses fonctionnalités de Titan, y compris une commande de direction fabriquée à partir d’une manette de jeu vidéo et des lumières de cabine achetées dans un magasin de camping.

— Avec la collaboration de Sarah Smellie et Michael Tutton à Halifax et de l’Associated Press.