MONTRÉAL — Trop peu de progrès, et toujours trop peu de minorités visibles et d’Autochtones travaillent au sein des organismes publics du Québec, comme les municipalités et les forces policières.
C’est ce que relève la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (CDPDJ) en rendant public mardi son rapport sur l’égalité en matière d’emploi.
Alors que la discrimination systémique est actuellement débattue sur la place publique, le rapport offre des chiffres éclairants sur la réalité de l’emploi au Québec.
La Commission souligne que 20 ans après l’adoption de la Loi sur l’accès à l’égalité en emploi dans les organismes publics, les objectifs ne sont toujours pas atteints.
La route est longue vers l’égalité, note la CDPDJ.
En ce qui concerne les minorités visibles, leur taux de représentation dans les organismes publics est passé de 2,7 % en 2009 à 6,3 % en 2019.
La Commission juge que cette représentativité reste «faible», surtout considérant les cibles établies.
Cette loi sur l’accès à l’égalité en emploi, et les programmes d’accès à l’égalité, «visent à résoudre les problèmes de discrimination systémique», est-il précisé dans le rapport.
Lorsque l’on parle d’organismes publics, il est question notamment du réseau de la santé, des écoles, des forces policières, des réseaux de transport et des municipalités. Sont visés ceux qui emploient plus de 100 personnes.
Les minorités visibles
En 2019, parmi les différents organismes publics, c’est le réseau des sociétés de transport qui possède la représentation la plus élevée, avec un taux de 12,7 % de minorités visibles.
Notons toutefois que trois des plus grandes sociétés de transport de ce réseau, dont la Société de transport de Montréal (STM), sont situées dans le Grand Montréal, là où habitent le plus de Québécois qui sont des minorités visibles.
Après les transports, c’est dans le réseau de la santé où l’on retrouve le plus de travailleurs qui sont des minorités visibles.
Mais malgré ces derniers constats, ils demeurent sous-représentés dans les organismes publics «alors que les tendances démographiques révèlent un accroissement significatif de leur nombre et de leur poids dans la population québécoise et canadienne», est-il noté dans le rapport.
Quant aux personnes autochtones, leur représentation n’a pas connu de variation significative entre 2009 et 2019: elle est demeurée à 0,3 %.
C’est la Sûreté du Québec qui possède la représentation la plus élevée d’Autochtones, celle-ci étant passée de 0,7 % en 2009 à 1,2 % en 2019. Mais c’est aussi dans la police (dans le réseau des régies intermunicipales) qu’il y en a le moins, avec le plus faible taux de représentation: un éloquent 0,0 %.
Mais peu importe le secteur d’emploi, la représentation des Autochtones demeure «très faible», note la CDPDJ.
«Les chiffres que nous dévoilons aujourd’hui révèlent que les programmes d’accès à l’égalité en emploi ne sont pas appliqués de façon optimale», a déclaré dans un communiqué Me Philippe-André Tessier, le président de la Commission.
Et les femmes?
Les femmes représentent le groupe visé qui a connu au Québec la plus forte hausse de leur représentation dans les organismes publics, passant de 53,9 % en 2009 à 65,3 % en 2019.
«Elles sont représentées dans presque tous les regroupements d’emploi, à l’exception des emplois-cadres et ceux des métiers traditionnellement masculins. Bref, il s’agit d’une belle avancée dans les emplois professionnels et techniques pour les femmes», peut-on lire dans le rapport.
Les plus faibles taux de représentation des femmes sont observés dans les sociétés de transport et à la Sûreté du Québec, pour ses effectifs policiers, avec 23,2 % dans les deux cas. Toutefois, c’est la Sûreté du Québec qui a connu la hausse la plus marquée des femmes entre 2009 et 2019, soit une augmentation de 10,2 %.
Adoptée en décembre 2000, la Loi sur l’accès à l’égalité en emploi dans les organismes publics institue un cadre normatif particulier d’accès à l’égalité en emploi pour corriger les situations de discrimination envers cinq groupes historiquement discriminés, note la Commission qui a aussi surveillé la situation en emploi des minorités ethniques — non visibles — et des personnes handicapées.
Aucun porte-parole de la Commission n’était disponible pour commenter le rapport mardi, même si elle avait choisi la journée de sa diffusion.