OTTAWA — La Cour suprême du Canada a statué qu’un enseignant d’une école secondaire ontarienne qui utilisait un «stylo caméra» pour filmer à leur insu ses étudiantes — et en particulier leur poitrine — s’était rendu coupable de voyeurisme.
Dans une décision publiée jeudi, qui infirme deux décisions d’instances inférieures, le plus haut tribunal du pays conclut que les adolescentes étaient en droit de s’attendre à ce que leur enseignant ne les filme pas à leur insu.
Ryan Jarvis avait été accusé de voyeurisme lorsqu’on a découvert près d’une trentaine de vidéos sur son stylo caméra. Or, plusieurs de ces images mettaient l’accent sur la poitrine et le décolleté d’élèves de son école secondaire de London, en Ontario.
Jarvis avait tourné ses vidéos en 2010 et 2011 dans différents endroits de l’école, notamment dans les couloirs, les salles de classe, la cafétéria et les bureaux du personnel. Sa caméra se posait la plupart du temps sur le visage des adolescentes, mais elle se concentrait aussi longuement autour de leur poitrine.
L’enseignant avait été acquitté en première instance parce que le juge n’était pas convaincu que les vidéos avaient été tournées à des fins sexuelles — même s’il reconnaissait que les étudiantes avaient une attente raisonnable de protection en matière de vie privée.
La Cour d’appel a maintenu l’acquittement, mais pour des motifs différents. Une majorité de juges a conclu que les vidéos avaient effectivement été prises à des fins sexuelles, mais les juges ont estimé que les étudiantes ne devraient pas avoir d’attente de protection en matière de vie privée dans les zones publiques de l’école. Comme l’un des juges de la Cour d’appel avait émis une opinion dissidente, la porte était ouverte à un recours en Cour suprême.
Les neuf juges du plus haut tribunal conviennent à l’unanimité que Jarvis devait être reconnu coupable, mais ils fournissent deux types de motifs concordants.
Le juge en chef Richard Wagner a écrit pour une majorité de six juges qu’une élève assistant à un cours, déambulant dans un couloir de l’école ou parlant à son enseignant s’attend certainement à ce qu’elle ne soit pas filmée.
«L’accent explicite des vidéos sur les corps des élèves filmées, y compris leurs seins, ne laisse planer aucun doute dans mon esprit que les vidéos ont été produites en contravention des attentes raisonnables des élèves en matière de protection de la vie privée», écrit le juge Wagner pour la majorité.
Les trois autres juges conviennent de la culpabilité de l’enseignant, mais ils interprètent un peu différemment le principe d’«attente raisonnable de protection en matière de vie privée».