MONTRÉAL — Un entrepreneur en excavation a été reconnu coupable jeudi d’homicide involontaire de l’un de ses employés, mort enseveli dans une tranchée en 2012.
Sylvain Fournier avait été accusé d’homicide involontaire et de négligence criminelle causant la mort, pour avoir failli à son obligation de sécuriser un chantier.
Le juge Pierre Dupras, de la Cour du Québec, a conclu dans sa décision rendue jeudi que la Couronne a rempli son fardeau sur les deux chefs d’accusations, mais en vertu de la règle qui prohibe les déclarations de culpabilité multiples, il a prononcé un arrêt conditionnel des procédures sur l’accusation de négligence criminelle.
Tout cela découle d’une journée d’avril 2012, lors de laquelle l’entrepreneur Sylvain Fournier s’est rendu à Lachine, à Montréal, en compagnie de quelques employés, dont Gilles Lévesque, afin d’y remplacer une conduite d’égout.
Pendant les travaux, un éboulement survient sur Gilles Lévesque alors qu’il travaille dans la tranchée qu’ils ont creusée. Il est complètement enseveli. M. Fournier est lui-même coincé jusqu’à la taille.
Des secours arriveront bientôt, mais on mettra beaucoup de temps pour réussir à dégager Gilles Lévesque dont on ne pourra que constater le décès, peut-on lire dans la décision. Il est admis qu’il est décédé d’un traumatisme crâniocérébral.
Quant à Sylvain Fournier, il a subi des fractures aux deux jambes et a été hospitalisé durant une dizaine de jours, dont quelques-uns aux soins intensifs.
Le juge Dupras retient de la preuve présentée que M. Fournier n’a pas respecté les règles visant à protéger ses employés.
Selon lui, la conduite de l’accusé constitue un acte illégal, une contravention claire aux obligations édictées au Code de sécurité pour les travaux de construction.
Un expert qui a témoigné avait notamment relevé que la méthode de travail utilisée par l’entrepreneur au site de Lachine n’était pas sécuritaire en ce que les pentes de l’excavation étaient trop raides, qu’aucun système n’a été utilisé pour soutenir les côtés de la fosse pour éviter qu’elle ne s’écroule et que des matériaux ont été empilés trop près des limites de l’excavation. Une façon de faire qui n’était ni prudente ni raisonnable, a conclu l’expert.
La situation était même «épeurante», selon un inspecteur de la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité au travail, et aurait dû nécessiter un arrêt immédiat des travaux.
Le juge conclut aussi que, selon ce qui a été rapporté au sujet des conditions du chantier, le risque de lésion corporelle était «évident».
«Le Tribunal a retenu qu’aucune des mesures imposées par la réglementation ou par la loi n’a été mise en place pour assurer la sécurité de M. Lévesque. De surcroît, il retient que l’accusé n’a accordé aucune attention à ce risque grave et évident pour la sécurité de M. Lévesque qu’il a lui-même créé», écrit le magistrat dans son jugement.
La peine sera déterminée ultérieurement.
La FTQ-Construction a accueilli favorablement le verdict et a invité les entrepreneurs en construction à prendre acte du jugement, qui énonce clairement qu’ils doivent assurer la sécurité de leurs travailleurs en toutes circonstances.
«Que le message soit clair: la santé et la sécurité sur les chantiers n’est pas négociable puisqu’elle peut avoir des conséquences graves», a écrit jeudi le syndicat dans un communiqué.