HALIFAX — Une juge de la Cour provinciale de la Nouvelle-Écosse a acquitté mardi un homme de Halifax accusé d’une agression sexuelle commise en 2018, après avoir conclu que la victime ne pouvait pas formellement l’identifier comme l’un des deux hommes qui l’avaient violée il y a cinq ans.
Cette décision ouvre par ailleurs la voie à un examen visant à déterminer si la police de Halifax a recueilli adéquatement toutes les preuves clés dans cette affaire.
La juge Jill Hartlen a indiqué mardi qu’elle reconnaissait entièrement que Carrie Low avait été agressée sexuellement par deux hommes dans une résidence en banlieue de Halifax, dans la nuit du 18 mai 2018. La juge a qualifié le témoignage de la victime de troublant et crédible.
Mais la juge estime que les brefs souvenirs que Mme Low a fournis de cette nuit-là au tribunal n’ont pas prouvé hors de tout doute que Brent Alexander Julien était l’un de ses agresseurs. La juge a aussi souligné qu’il n’y avait aucune preuve ADN impliquant l’accusé.
«Sur la base de toutes les preuves et de l’absence de preuves (…) je ne suis pas convaincue au-delà de tout doute raisonnable que le deuxième homme qui a eu des relations sexuelles avec Mme Low était M. Julien, et il est acquitté», a déclaré la juge Hartlen.
La juge a conclu qu’un troisième homme, que l’on voit dans une séquence vidéo de l’intérieur du bar que Mme Low avait fréquenté ce soir-là, portait des vêtements qui correspondaient davantage à la description qu’elle avait faite de l’un de ses agresseurs.
S’appuyant sur des preuves entendues au procès, la juge a relaté que Mme Low avait été conduite dans une voiture d’un bar de Halifax jusqu’à une caravane à la périphérie de la ville, alors qu’elle perdait conscience puis la retrouvait. Mme Low s’est réveillée le lendemain matin meurtrie, sur un matelas, à moitié nue, vêtue seulement d’un soutien-gorge et d’un débardeur.
Mme Low a demandé — et obtenu — une ordonnance du tribunal qui permet de l’identifier.
«Enquête bâclée»
Elle a par ailleurs allégué que la police de Halifax avait mal géré des preuves clés dans son dossier, en ne se rendant pas sur les lieux du crime peu de temps après l’agression sexuelle.
Elle a déclaré mardi à sa sortie de la salle d’audience qu’elle pouvait désormais intenter une poursuite au civil contre la police. L’audition longtemps reportée de sa plainte devant la Commission de révision de la police de la Nouvelle-Écosse doit par ailleurs commencer le 10 juillet.
L’avocate de Mme Low, Emma Halpern, directrice de la «Elizabeth Fry Society of Mainland Nova Scotia», a déclaré mardi que la police avait raté une occasion clé de recueillir des preuves ADN dans cette affaire.
«Ils ne sont pas allés sur les lieux du crime, a déclaré Me Halpern. Ils n’ont jamais récupéré les sous-vêtements (de Mme Low). Nous savons qu’il y avait un problème d’ADN dans cette affaire. Il y avait l’ADN (d’une deuxième personne), mais ce n’était pas suffisant pour pouvoir correspondre à qui que ce soit.»
Mme Low a déclaré qu’elle était mentalement préparée à un acquittement, mais qu’elle avait trouvé cela «choquant à entendre».
«Quand j’ai signalé (l’agression sexuelle), si la police l’avait prise au sérieux et avait enquêté en quelques heures et quelques jours, je ne pense pas que nous serions ici avec la même conclusion», a-t-elle déclaré.
L’accusation d’agression sexuelle contre Julien est la deuxième poursuite criminelle dans cette affaire qui remonte à cinq ans. La police de Halifax avait aussi accusé, en 2021, Alexander Thomas, d’East Preston, mais il avait été retrouvé mort avant le début du procès. La police a qualifié sa mort d’homicide.
En dehors du tribunal, la procureure de la Couronne Alicia Kennedy a déclaré qu’il y avait de solides preuves ADN contre Thomas, et que le spécimen aurait aidé dans sa poursuite si son affaire avait été jugée.