Un rôle élargi à l’essai pour une vingtaine d’ambulanciers de la Montérégie

CHÂTEAUGUAY, Qc — Le ministère de la Santé et des Services sociaux pige dans sa propre cour pour tenter de réduire les effets néfastes de la pénurie de main-d’œuvre dans le réseau de la santé.

Après avoir lancé un cri du cœur aux infirmières qui ont quitté le réseau il y a deux semaines, le gouvernement Legault mettra en place un projet-pilote afin d’élargir les pouvoirs des paramédics.

De passage à Châteauguay, en Montérégie, le ministre de la Santé Christian Dubé a annoncé lundi qu’une vingtaine de techniciens ambulanciers de la région auront la permission d’entrer faire du travail dans les hôpitaux pour venir en aide au personnel débordé, à partir du 9 octobre.

Ces travailleurs recevront une formation spécialisée dans les prochains jours et seront appelés à venir prêter main-forte au personnel des hôpitaux «seulement si la situation le permet, sans nuire au mandat premier des équipes des services préhospitaliers d’urgence, qui est de répondre aux besoins des personnes en détresse».

En conférence de presse, M. Dubé a expliqué que cette solution était attendue depuis longtemps dans le réseau, mais qu’elle a souvent été écartée.

«Ce sont des règles qui ont toujours un peu été prises dans le béton et qu’on n’a pas regardées avec un peu de recul pour voir si on ne pouvait pas faire les choses autrement», a-t-il mentionné.

«Mais lorsqu’on est pris devant une pandémie et qu’on regarde nos choix, on voit des choses que nous n’osions pas faire avant, mais qui sont possibles maintenant.»

D’abord mise à l’essai en Montérégie en collaboration avec la Coopérative des techniciens ambulanciers de la Montérégie (CETAM), cette initiative pourrait donner envie à d’autres centres intégrés de santé et services sociaux (CISSS) d’emboîter le pas, selon M. Dubé.

Le ministre n’a d’ailleurs pas caché que d’autres annonces pourraient être faites dans les prochaines semaines pour donner plus de pouvoirs à certains corps d’emploi. Il a cité en exemple les infirmières auxiliaires.

«On a besoin de victoires rapides (quick wins)», a mentionné M Dubé. «Quand j’ai entendu ça, j’ai dit ‘où est-ce que je signe?’»

Déshabiller Paul pour habiller Jacques

En réaction à cette annonce, la Fédération des employés du préhospitalier du Québec (FPHQ) a salué l’initiative du gouvernement, mais a prévenu que cette solution pourrait causer des ennuis si elle n’est pas mise en place adéquatement.

«Nous mettons donc en garde le MSSS de ne pas dégarnir le réseau préhospitalier pour garnir le réseau hospitalier. Nous devons stabiliser (les) régions problématiques avant de penser à envoyer des paramédics dans les salles d’urgence», a mentionné la Fédération, qui appuie néanmoins l’idée de donner un plus grand rôle aux ambulanciers.

De son côté, la Confédération des syndicats nationaux (CSN) a déploré ne pas avoir été prévenue qu’une telle annonce était en préparation.

«Nous l’avons appris par les médias», a affirmé le représentant du secteur préhospitalier à la Fédération de la santé et des services sociaux (FSSS-CSN), Jean Gagnon.

M. Dubé a reconnu en conférence de presse que ce dossier avait bougé rapidement.

Se positionnant aussi en faveur de l’élargissement des pouvoirs des paramédics, M. Gagnon a aussi exprimé des réserves quant aux problèmes que cette solution pourrait créer pour le milieu ambulancier, déjà en pénurie de main-d’œuvre.

«Comment cet arrêté sera appliqué dans ce contexte? Clairement, en ne nous consultant pas, on a mal attaché certains fils. Nous invitons le ministre de la Santé à s’asseoir avec nous pour discuter en connaissance de cause de ces questions», a-t-il ajouté.

Quelques mots sur la COVID-19

Avant de procéder à son annonce sur le rôle des paramédics, M. Dubé a rapidement abordé la situation de la COVID-19 au Québec.

Il s’est notamment réjoui des chiffres annoncés lundi, alors que la province a signalé 402 nouveaux cas et six décès supplémentaires.

Le ministre a toutefois prévenu que le mois d’octobre pourrait amener son lot de défis.

«Il va faire plus froid, donc il va y avoir plus de contacts à l’extérieur», a-t-il rappelé.

«On commence à voir les résultats de nos efforts, mais restons prudents.»