OTTAWA — Des leaders féministes du monde entier, qui se sont réunies cette semaine à Ottawa, rappellent qu’elles ont déjà quelques idées nuancées pour lutter contre les discriminations et les inégalités, mais elles ne sont pas certaines d’être entendues au cours des prochains sommets du G7.
Eleanor Blomstrom, codirectrice de l’Organisation des femmes pour l’environnement et le développement (WEDO), établie à New York, près du siège des Nations unies, espère que les délibérations du «W7», cette semaine à Ottawa, pousseront les leaders du G7 à adopter une approche féministe en matière de politiques intérieures et étrangères, à l’occasion du sommet de La Malbaie en juin. Mais Mme Blomstrom est consciente aussi que les femmes sont souvent laissées sur la touche au cours de ces grands sommets.
Le premier sommet «Women 7» (W7) s’est clôturé vendredi après trois jours de discussions qui ont réuni à Ottawa plus de 60 femmes de 20 pays. Le groupe formulera des recommandations pour aider le Canada et les autres pays du G7 à atteindre l’égalité entre les sexes dans des secteurs comme les changements climatiques, à lutter contre la violence faite aux femmes et à soutenir des mouvements féministes forts et inclusifs, notamment.
Les recommandations finales seront présentées au premier ministre Justin Trudeau et à la ministre de la Condition féminine, Maryam Monsef, en mai, avant le sommet du G7, les 8 et 9 juin.
On peut déjà prévoir que le W7 recommandera aux leaders du G7 d’investir dans des normes du travail et du logement décentes, dans les services publics universels, dans un filet social basé sur les besoins réels, et dans une réduction du travail non rémunéré des femmes. Les militantes voudront aussi que le Canada demeure ferme en matière de droits relatifs à la santé sexuelle et reproductive — notamment l’avortement — et de lutte contre la violence envers les femmes.
Scepticisme prudent
Le gouvernement libéral a fait de l’égalité des sexes un thème central de sa présidence du Groupe des sept pays les plus industrialisés (G7). En obtenant la présidence du G7, M. Trudeau a mis sur pied le Conseil consultatif sur l’égalité des sexes, afin que cette question soit intégrée dans les autres thèmes abordés au sommet de Charlevoix. Les membres de ce conseil consultatif se réunissaient d’ailleurs pour la première fois en personne cette semaine, à Ottawa.
Des participantes au sommet du W7 ont par ailleurs été étonnées de la facilité avec laquelle ces femmes d’horizons divers avaient pu dégager des consensus sur ce qui devrait constituer les priorités des chefs de gouvernement du G7. Mais certaines demeuraient sceptiques sur le sort qui sera réservé à leurs recommandations par les leaders du G7 — et même par le premier ministre Trudeau.
Francyne Joe, de l’Association des femmes autochtones du Canada, a notamment rappelé à ses consoeurs que quatre ans après de fortes inondations en Alberta, des femmes autochtones vivent encore à l’hôtel à Calgary. Cette situation illustre, selon elle, les impacts des changements climatiques sur les populations, mais aussi les graves problèmes de logement que vivent les femmes autochtones au Canada.
Mais Avvy Go, directrice d’une clinique d’aide juridique pour immigrantes asiatiques à Toronto, estime que le sommet du W7 n’aura pas été vain même si M. Trudeau, qui se décrit comme un féministe, ne «livre pas la marchandise» à La Malbaie. Ces recommandations pourront toujours servir de base aux revendications par la suite au Canada.
Le W7 d’Ottawa a été organisé par Oxfam Canada, Inter Pares, le Fonds MATCH international pour la femme, l’Initiative des femmes Nobel, Action Canada, la Fondation canadienne des femmes et Canada sans pauvreté.