MONTRÉAL — Une caricature associant la Coalition avenir Québec (CAQ) au Ku Klux Klan (KKK) qui a été rejetée par le quotidien The Gazette a suscité de vives réactions après s’être retrouvée sur les réseaux sociaux.
C’est son auteur, le caricaturiste Terry Mosher qui signe sous le nom d’Aislin, qui l’a mise en ligne sur ses comptes Twitter et Facebook avec la mention: «The Gazette n’imprimera pas cette caricature CAQ KKK. Qu’en pensez-vous? L’auriez-vous publiée?» (Gazette won’t print this KKK CAQ Kartoon. What do you think? Would you have let it run?).
L’image montre simplement le logo de la CAQ dans lequel le «A» est remplacé par le capuchon conique blanc caractéristique du KKK dans lequel sont dessinés des yeux, ce qui ne laisse aucun doute possible sur l’intention de l’auteur.
L’affaire a rebondi jusqu’au premier ministre François Legault qui, lors d’un passage à Beauceville, s’est limité à un très bref commentaire invoquant à la fois la liberté de presse, tout en ajoutant qu’il trouvait ce dessin «vraiment exagéré».
«Beaucoup, beaucoup trop loin»
En entrevue avec La Presse canadienne, l’éditrice de The Gazette, Lucinda Chodan, a raconté que «quand j’ai vu cette caricature, j’ai pensé qu’elle n’était pas juste pour la CAQ, notre gouvernement démocratiquement élu, ceux qui ont voté pour et aussi pour les gens qui ont été des victimes du KKK».
«Ça allait beaucoup, beaucoup trop loin pour moi.»
Le mot censure est revenu à plusieurs reprises dans certains médias et, surtout, sur les réseaux sociaux, mais Mme Chodan y voit plutôt une question de jugement éditorial comme celui qui s’applique à tous les contenus publiés par le quotidien anglophone.
Et elle prend soin d’ajouter que Terry Mosher «n’a jamais utilisé le mot censure avec moi ou dans ses partages sur les réseaux sociaux et ça, c’est important à mon avis. Il a simplement dit que la Gazette a décidé de ne pas publier et a demandé aux gens ce qu’ils en pensaient.»
Un rituel quasi annuel
D’ailleurs, ce manège est une constante entre Aislin et The Gazette, explique-t-elle.
«À peu près une fois par année, je donne un coup de fil à Terry et je lui dis « non, celle-là, je ne pense pas » ou « pouvez-vous changer la caricature? ». Parfois il dit oui, mais pour cette caricature, évidemment, le concept ne se prêtait pas à une modification.
«Et il a dit comme toujours, chaque fois que ça se passe, qu’il mettrait la caricature sur les réseaux sociaux. Et il a fait la même chose qu’il fait toujours, soit de demander à ses abonnés ce qu’ils pensent. (…) Mes refus ne sont jamais présentés comme de la censure par Terry.»
Mme Chodan reconnaît également que jamais un chroniqueur ne ferait une telle comparaison entre la CAQ et le KKK à l’écrit, mais qu’une caricature «c’est toujours exagéré, c’est toujours de l’hyperbole et les caricaturistes ont plus de latitude pour exagérer parce qu’il leur faut des images très fortes.»
«Il y a toujours une zone grise, ajoute-t-elle, mais pour moi celle-là était évidemment trop.»
Terry Mosher n’a pas donné suite aux demandes d’entrevue de La Presse canadienne, mais au micro de la radio anglaise de Radio-Canada, il a dit ne pas avoir voulu suggérer que les caquistes sont racistes, mais bien que leurs politiques encouragent le racisme.
Quant à ses publications sur les réseaux sociaux, celles-ci ont provoqué, sans surprise, une avalanche de propos dont, malheureusement, seule une très faible minorité étaient posés et visaient la discussion, le reste étant un reflet de l’incivilité qu’on y retrouve très souvent, en particulier sur les questions polarisantes.