TORONTO — Les adolescents qui vapotent courent plus de risques de passer plus tard à la cigarette, selon une vaste étude menée au Canada. Mais les chercheurs se demandent si ces jeunes n’auraient pas déjà tendance à adopter de toute façon des comportements à risque, quels qu’ils soient.
L’étude, menée auprès de plus de 44 000 élèves du secondaire en Ontario et en Alberta, établit en tous cas un lien très étroit entre le vapotage et le passage au tabagisme un an plus tard seulement.
L’étude s’est penchée sur le vapotage chez les élèves de la première année du secondaire jusqu’à la dernière, en 2013-2014, avec un suivi un an plus tard. Les chercheurs ont constaté que les jeunes qui vapotaient déjà au moins 30 jours avant le début de l’étude couraient plus de risques, un an plus tard, d’avoir essayé la cigarette — et de devenir fumeurs au quotidien.
Mais selon le chercheur principal, David Hammond, professeur à la faculté de santé publique de l’Université de Waterloo, la vraie question est de savoir si ces jeunes fument parce qu’ils ont d’abord vapoté, ou parce qu’ils adoptent de toute façon des comportements plus à risque, comme éventuellement l’alcool et la marijuana. Ces jeunes «à risque» pourraient donc se tourner d’abord vers la cigarette électronique tout simplement parce qu’elle est plus facilement accessible que les autres substances, suggère le professeur Hammond.
Le Canada n’a pas approuvé la vente de cigarettes électroniques contenant de la nicotine par les détaillants traditionnels de cigarettes comme les dépanneurs ou les supermarchés. Par contre, les produits de vapotage sont facilement accessibles en ligne ou dans des petites boutiques spécialisées, qui ont poussé comme des champignons depuis quelques années.
La vente des cigarettes électroniques sans nicotine, disponibles dans une vaste gamme de saveurs, n’est pas réglementée au Canada, mais cela pourrait changer bientôt. Le Sénat a adopté en juin un projet de loi, actuellement étudié par les députés, qui réglementerait ce secteur. Ce projet de loi interdirait notamment la vente de produits de vapotage aux mineurs, et l’interdiction de saveurs destinées à attirer une jeune clientèle — comme on l’a fait pour la cigarette «aromatisée».
L’Association médicale canadienne (AMC) recommande que les provinces imposent aux cigarettes électroniques les mêmes restrictions de vente que pour les produits du tabac. «Les résultats de cette étude apportent des arguments supplémentaires pour inciter le gouvernement à limiter davantage encore la vente de produits souvent conçus expressément pour séduire les jeunes gens», estime le docteur Laurent Marcoux, président de l’AMC.
Les résultats de l’étude dirigée par le professeur Hammond sont publiés dans le Journal de l’AMC, qui jouit toutefois d’une indépendance éditoriale face à l’association médicale.