Éloge de la lenteur

Si boire tranquillement un verre de vin va de soi, la production viticole mondiale croît à toute allure. 

Photo : Jon Sullivan/Wikimedia Commons
Photo : Jon Sullivan/Wikimedia Commons

En réponse aux façons de faire industrielles dictées par la productivité, une tendance se dessine toutefois depuis quelques années : le Slow Wine. Promouvant une viticulture à échelle humaine, respectueuse de l’environnement et des terroirs, il siège à la même table que Slow Food, première organisation à s’opposer, dès 1986, au développement effréné de l’industrie agroalimentaire. Et les vins conçus dans son esprit sont pleins de goût — et d’histoire.

Bien que les enjeux de la production viticole ne revêtent pas la même importance que ceux liés aux denrées alimentaires, le sujet n’en mérite pas moins d’être abordé avec sérieux. La disparition imminente de plusieurs cépages anciens, l’utilisation intensive de pesticides (la viticulture est l’un des secteurs agricoles les plus polluants) ainsi que le recul des vendanges traditionnelles — la machine à vendanger ramasse près de 80 % de la récolte française — ne sont que quelques thèmes qui devraient soulever des débats dans la communauté écogastronome, afin que celle-ci statue clairement sur les critères d’adhésion au mouvement Slow Wine, encore officieux.

L’agriculture biologique connaît de plus en plus d’adeptes. En France seulement, la superficie du vignoble cultivée en agrobiologie a pres-que triplé en quatre ans et représente maintenant 7,4 % du vigno-ble national. On voit aussi les conserva-toires de vieux cépages se multiplier dans plusieurs régions d’Europe. Ces collections de vignes anciennes prolifèrent non seulement en France, mais également en Italie, en Grèce, en Turquie et en Géorgie, berceaux de la viticulture.

Loin d’être défaitiste par rapport à la crise à laquelle se heurte l’Europe, tiraillée entre les impéra-tifs économiques et le développement durable, le fondateur de Slow Food, le Piémontais Carlo Petrini, y voit plutôt une occasion de remise en question, de redéfinition des besoins et de changements de certaines habitudes quotidiennes.

Entre la sauvegarde du patrimoine génétique de la vigne et la quête d’un rapport harmonieux avec l’environnement, l’avenir comporte de nombreux défis, tant pour les viticulteurs que pour les consommateurs, en butte à l’explosion de l’offre.

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Voici deux suggestions qui s’inscrivent à merveille dans la philosophie Slow Food / Slow Wine :

Domaine Papagiannakos, Savatiano 2011, Vin de pays de Markopoulo (11097451 ; 15,60 $)

Ce producteur de l’Attique, en Grèce, mise à fond sur le savatiano, un cépage autochtone surtout connu pour ses vins blancs minces et très acides, mais qui, avec une viticulture soignée et des rendements limités, peut donner d’excellents résultats. Ce vin sec se distingue par sa texture, son caractère désaltérant et par ses fines tonalités iodées sur un fond de fruits exotiques. Un régal d’originalité et de fraîcheur !

Vignoble de la Bauge, Novembre 2010, Vendange tardive (10853189 ; 17,40 $ — 375 ml)

Rien de mieux que de consommer localement, surtout lorsque les vins sont bons ! La famille Naud élabore, à Brigham, au Québec, ce vin blanc issu de cépages hybrides, récoltés en novembre et vinifiés à la manière des vins de Moselle. Léger
en alcool, arrondi par un reste de sucre, agrémenté de notes florales et porté par une bonne acidité. Plaisir garanti à l’apéritif ou avec des plats asiatiques relevés !