Un musée pour les cœurs brisés de Croatie

À Zagreb, la capitale croate, un musée dévoile les histoires d’amour déchu d’innombrables âmes en peine. Un endroit aussi intéressant à parcourir que libérateur pour ceux qui viennent s’y épancher.

Photo : Museum of Broken Relationships

Que ne ferait-on pas par amour ? En 1990, le petit ami d’une étudiante en biologie s’est gravement blessé dans un accident de moto. Par crainte de le perdre un jour, celle-ci a conservé un échantillon de sang coagulé provenant d’une plaie de son amoureux… pour pouvoir le cloner, s’il venait à mourir prématurément. Mais sa crainte permanente de perdre sa tendre moitié a fini par se retourner contre elle : son conjoint, las de partager sa vie avec une perpétuelle paranoïaque, l’a un jour laissée.

Vingt-sept ans plus tard, l’échantillon d’hémoglobine durci fait partie de la collection du Museum of Broken Relationships de Zagreb, en Croatie, accompagné de l’anecdote qui en explique la présence.

Photo : Museum of Broken Relationships

Fondé en 2006 par Olinka Vištica et Dražen Grubišić, un couple d’artistes croates qui a rompu après quatre ans de relation, cet étrange musée du cœur continue d’accumuler des objets de toutes sortes liés à des histoires d’amour déchu.

Cette montre déglinguée ? Elle appartenait à un Suisse qui l’a portée pendant 15 ans à son poignet droit pour qu’elle lui indique l’heure du Brésil, où vivait la femme qu’il aimait, tandis que la montre qu’il portait au poignet gauche le maintenait les pieds sur terre en lui donnant l’heure juste.

Photo : Museum of Broken Relationships

Cette carte postale jaunie ? Elle a été glissée sous la porte d’une jeune Arménienne par celui qui l’aimait secrètement, avant qu’il se jette du haut d’une falaise en apprenant que les parents de sa dulcinée ne lui accorderaient jamais sa main. Quant à ce nain de jardin, la note qui l’accompagne raconte son vol plané après qu’un amant l’eut lancé à la tête de sa future ex-conjointe, au terme de 20 ans de mariage.

Photo : Museum of Broken Relationships

Si toutes ces choses sont réunies ici, c’est pour aider les gens à se remettre d’une séparation, les consoler en leur permettant de comparer leur histoire avec celles des autres, leur donner la chance de se départir d’un objet lourdement symbolique et qui représente la douleur, la fin d’une relation amoureuse ou même familiale.

Photo : Museum of Broken Relationships

À Zagreb, ce « musée des ruptures » est stratégiquement situé entre deux églises où les futurs mariés vont se faire croquer le portrait, juste avant de convoler. Comme pour leur rappeler ce qui les attend, s’ils ne se chérissent pas l’un et l’autre.

Les articles présentés sont souvent insolites et intriguent par leur seule présence : un frisbee, des pilules, une tresse rasta (dreadlock) coupée net comme la relation qui l’a vue naître… D’autres sont des objets du quotidien (un tire-bouchon, une loupe, un grille-pain, une cafetière), fort souvent enfantins (poupées, figurines et autres toutous) ou pas du tout (comme des talons aiguilles ou un godemiché noir).

Photo : Museum of Broken Relationships

Pas moins de 100 000 visiteurs fréquentent annuellement ce musée des cœurs brisés, sans compter ceux qui s’arrêtent dans la « succursale » de Los Angeles, inaugurée en 2016, ou ceux qui parcourent les allées virtuelles du site Web du musée, qui présente les mêmes objets et d’autres témoignages d’âmes éprouvées par une séparation ou… un échec.

Ainsi, au cours des prochaines semaines, la collection du musée s’enrichira peut-être d’un ballon de soccer ou d’un maillot à damier rouge et blanc, accompagné de la note d’un amateur de sport éploré…