Rassurez-moi : il n’y a pas de mal à publier des photos de mon si bel enfant sur Facetwitstagram, non ?

Je m’appelle Mathieu Charlebois et chaque mois, je réponds à vos grands questionnements existentiels.

Illustration : Stéphanie Aubin

Quand ma tante Marguerite prenait un morceau de sucre à la crème, elle l’accompagnait systématiquement de la phrase « 10 secondes dans la bouche, 10 ans dans les fesses ». Elle soulignait par ce fin trait d’esprit que les plaisirs passagers ont des conséquences à long terme. 

Il en va de même de la photo de nos enfants qui se préparent pour leur premier jour d’école : la petite dose d’endorphines qui vient avec chaque nouveau J’aime pourrait bien se payer de façon inattendue dans l’avenir.

Alors que la reconnaissance faciale est une technologie en plein essor, Facebook et les autres réseaux sociaux sont plus qu’heureux que nous documentions l’évolution d’un visage de l’enfance jusqu’à l’adolescence, voire jusqu’à l’âge adulte. Ils se retrouvent avec une belle collection de photos à partir desquelles créer des algorithmes capables de reconnaître n’importe qui, même sur l’image noir et blanc pixelisée et floue d’une caméra de surveillance. 

En publiant cette photo où l’adorable petite William-Emma s’est mis du gâteau partout, vous la faites entrer dans un système dont on commence seulement à voir les contours. Des contours aux vagues allures de dystopie science-fictionnesque où chaque citoyen est fiché et peut être trouvé en un clin d’œil par un logiciel qui scanne les caméras de la ville. Soudainement, tout ça est moins adorable.

Les parents prennent chaque jour des décisions pour leurs enfants, comme le nombre de biscuits qu’il est acceptable de manger et si ceux-ci peuvent être trempés dans le lait (pour ma mère, c’était « deux » et « non »). On prend ces décisions pour leur bien immédiat et leur bien-être futur. Publier des photos de nos enfants ne fait du bien qu’à nous, et met en danger leur bien-être futur.

Dans 40 ans, alors qu’il se cachera dans les décombres d’une station de métro pour échapper aux robots qui domineront la planète, votre enfant vous remerciera d’avoir gardé son visage hors des bases de données.

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Est-ce correct d’utiliser une place de stationnement réservée aux familles même si je n’ai pas d’enfants ?

Personne ne peut vous empêcher de prendre cette place. Pas même la police, puisque son statut n’est pas reconnu par le Code de la sécurité routière, contrairement à celui des espaces réservés aux personnes handicapées.

Voilà pour l’aspect légal. Maintenant, doit-on vraiment parler de l’aspect « vous risquez de passer pour un égoïste », de l’aspect « vous obligez des enfants à traverser un stationnement où ils peuvent se faire écraser » et de l’aspect « si vous vous sentez à l’aise de laisser une femme enceinte marcher pour rien, vous manquez peut-être de cœur », ou vous commencez déjà à comprendre ?

Ces gens ont probablement passé tout le trajet à gérer deux enfants se chicanant sur la banquette arrière. Laissez-leur la place de stationnement près de la porte. C’est à peu près le seul bonheur qui leur reste.

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Ce commentaire sur la publication de photos, amusant par lui-même, l’est devenu encore plus quand une publicité d’Amazon pour la caméra GoPro est venue s’insérer dans le texte. Il n’y a pas d’hasard?