
La place des Festivals, à Montréal, a beau être occupée l’été durant par les amateurs de musique en tout genre, la métropole est loin d’avoir le monopole du mélomane. Aussi surprenant que cela puisse paraître, à quelque 600 km de la rue Jeanne-Mance, en Abitibi-Témiscamingue, on sent vibrer la musique comme rarement ailleurs dans la province.
Il doit y avoir quelque chose dans l’eau là-bas; l’agenda musical des villes de cette vaste région de l’Ouest québécois est fort rempli, bien plus que ne pourrait le laisser présager sa population d’environ 150 000 habitants. Début août, il y a Osisko en lumière, à Rouyn-Noranda, puis au même endroit, pendant la fin de semaine de la fête du Travail, s’ébranle le réputé Festival de musique émergente (FME). Val-d’Or a le FRIMAT, et Amos, la FÉE (Fête éclectique envahissante), deux festivals axés sur la découverte musicale. Ajoutons à cela le Festival des guitares du monde, qui papillonne dans plusieurs villes abitibiennes. Et on en passe.
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Le journaliste, auteur et passionné de musique Félix B. Desfossés est retourné vivre dans son Abitibi natale il y a quelques années. Il y constate cette concentration «anormale» de rendez-vous, et croit que ces nouveaux piliers culturels sont en quelque sorte les rejetons du grand Festival du cinéma international en Abitibi-Témiscamingue, qui fêtera à l’automne ses 35 ans. «En recevant dans le passé des gros noms comme Gainsbourg, Pierre Richard, Sylvie Vartan, le Festival a donné à tout le monde l’inspiration et la confiance pour faire de grandes choses ici.»
C’est à croire que le leitmotiv abitibien est: «Il suffit de le faire.» Félix B. Desfossés, qui prépare un livre sur l’histoire de la musique à Rouyn-Noranda, rappelle que l’Abitibi est encore très jeune — «quand tu y penses, mon grand-père est plus vieux que la région ici!» — et que «tout est à créer». Un peu comme un jeune adulte qui veut tout apprendre, l’Abitibi s’organise pour nourrir sa curiosité.
Autres cordes à l’arc de l’Abitibi: d’une part, elle bénéficie de subventions, auxquelles ont également accès différentes régions, pour encourager ces manifestations; de l’autre, la culture entrepreneuriale y est forte. Et les exemples sont nombreux en musique. Notamment Sandy Boutin, cofondateur du FME, qui est devenu au fil des années un acteur important de l’industrie musicale au Québec, avec le Festival et aussi avec son étiquette de disques, Simone Records (Louis-Jean Cormier, Marie-Pierre Arthur, Ariane Moffatt). Autre exemple: Steve Jolin, alias Anodajay, patron de l’étiquette 7e Ciel, qui à partir de l’Abitibi en mène large sur la scène rap de la province, avec des artistes comme Koriass, Brown et Manu Militari.
«Et ce qui est beau, c’est qu’ici il y a des artistes qui viennent nous voir à l’année, et pas juste dans les festivals», de conclure Félix B. Desfossés. Comme disait le héros abitibien Richard Desjardins: «Tout l’monde est arrivé, le show peut commencer.»
À La Sarre (en Abitibi-Ouest), nous offrons aussi les Jeudis sous les étoiles qui sont une série de 6 concerts gratuits en plein-air tous les jeudis de juillet à août. Cette année, la programmation était particulièrement riche d’artistes offrant des compositions originales. Merci pour ce bel article!