Ce qui se cache derrière D’une caresse patentée

Le recueil D’une caresse patentée, de Louise Marois, est en lice pour les Prix littéraires du Gouverneur général 2021 dans la catégorie Poésie.

Montage L'actualité

Louise Marois naît à Montréal en 1960. Elle adore les hangars et les ruelles, les trottoirs, et déteste l’école. Elle barbouille, dessine et, plus tard, écrit de la poésie. Son premier recueil, La peau des yeux, reçoit le prix Jacqueline-Déry-Mochon. La cuisine mortuaire et D’une caresse patentée sont finalistes aux Prix littéraires du Gouverneur général dans la catégorie Poésie. Elle se consacre à l’écriture pour ne pas mourir et dessine pour survivre.

Comment s’est déroulée la création de ce livre ?

Depuis quelques années, l’écriture est jumelée au dessin et vice versa. Il s’agit davantage d’un travail de mémoire, de sensation, d’états difficiles à décrire, donc à écrire. Le dessin vient souvent au secours de l’écriture, alors l’écriture n’est plus seule. Le dessin dans le recueil est en écho au poème, jamais en appui. D’une caresse patentée est un poème sur mon père. Un père ouvrier, taciturne, gris. J’ai voulu extraire des images restées là, dans le cœur, dans les larmes, dans l’attente d’une réelle rencontre avec lui.

Mes dessins accompagnent le recueil. Ce sont pour la plupart des dessins au graphite, à partir de photomatons. Comme si on pouvait tout refaire, alors que tout reste intact. Les poèmes sont des scènes qui s’entremêlent autour d’un seul et même sujet. Les lieux de l’enfance durant les vacances d’été, la campagne, scène principale du recueil. Le constat qu’il était le même partout, que sa tristesse, il la traînait comme une ligne au fond d’une eau boueuse. Tenter de m’en approcher d’autant de manières différentes ne me servirait à rien. Je suis donc devenue observatrice.

Que souhaitez-vous que les lecteurs retiennent de votre livre ?

Les rencontres sont possibles, et souvent d’une manière que nous n’aurions pas imaginée. Elles existent, je crois, quand nous permettons à l’événement de survenir, quand nous lui laissons suffisamment d’espace pour faire cohabiter êtres et sentiments.

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Un extrait du recueil D’une caresse patentée

auréole de thé noir
tu bois dans ta tasse
tu poses tes lois tes coudes
le souper déjà dans l’évier
maintenant n’a pas faim

je prends le temps débarrassé
pour te chercher
je te donne un nom
te fais une place,
mais le cœur n’y est pas

en cette maison
où pas une seule porte n’est creuse ni pleine
de ta présence

la forêt te travaille t’effeuille
les aiguilles de pin la gomme l’âge du cerf de l’empaumure
le rite du rut
les rivières et les lacs à la ligne blanche
la babiche d’un seul peuple

affolée que tu m’oublies
gémissante
sur le rond de tes épaules
ascension de petite taille