Ce qui se cache derrière Onze jours en septembre

Le roman Onze jours en septembre, traduit par Sophie Voillot, est en lice pour les Prix littéraires du Gouverneur général 2019 dans la catégorie Traduction. 

Née à Marseille, Sophie Voillot a grandi au Québec et vit à Montréal. Elle a remporté un premier prix littéraire du Gouverneur général en 2006 grâce à Un jardin de papier de Thomas Wharton. Finaliste aux GG en 2007 pour La fin de l’alphabet de C.S. Richardson, puis en 2008 pour le Logogryphe de Thomas
Wharton, Sophie Voillot a également traduit le premier roman de Rawi Hage, Parfum de poussière, qui a remporté le Prix des libraires ainsi que le Combat des livres en 2009. Sa traduction du second roman de Rawi Hage, Le Cafard, lui a valu un nouveau GG en 2010. Après avoir figuré parmi les finalistes du prix du Gouverneur général 2011 pour sa traduction du roman de David Homel Le droit chemin, publié chez Leméac/Actes Sud, Sophie Voillot reçoit le prix du Gouverneur général une troisième fois en 2013 avec L’enfant du jeudi d’Alison Pick, paru aux Éditions du Boréal. Le sous-majordome de Patrick deWitt, paru chez Alto, se classe parmi les finalistes en 2017.

Comment s’est déroulée la création de l’œuvre ?

J’ai vécu de longs mois en compagnie de Jimmy et de Sophie, prénommée comme moi, qui m’a aidée à me projeter dans le récit de cette longue errance entre Québec et Montréal, le fleuve et la Montagne, le passé et le présent. Un parcours empreint d’empathie pour James Wolfe, antihéros s’il en est un, tristement célèbre pour avoir fait tomber Québec aux mains des Anglais. Cet exercice périlleux, Kathleen Winter a réussi à le mener en toute lucidité, sans fermer les yeux sur ses actes de cruauté.

Le travail le plus important se situait au niveau du style, puisqu’il fallait rendre aussi bien le registre soutenu des échanges épistolaires entre Wolfe et sa mère que celui, familier, des dialogues entre Jimmy et Sophie, longtemps habituée à la vie de la rue. Sans parler de l’immense poésie qui colore tout le texte, de l’Élégie écrite dans un cimetière de campagne chère à James Wolfe aux vers de Vigneault, en passant par les listes rédigées par Sophie et qui évoquent les inventaires de Prévert. Il s’agissait aussi de recréer une mosaïque de détails, souvenirs de fleurs au parfum subtil, oiseaux au chant porteur d’espoir ou de solitude insoutenable.

Je retiens entre toutes la scène, imaginée par l’auteure, où Wolfe et Montcalm se retrouvent en secret à l’abri du carnage, dans la fraîcheur d’une clairière pailletée de lumière, habitée de libellules et d’oiseaux. Échappant aux contraintes imposées par leur rang égal à la tête d’armées ennemies, sans jamais cesser d’être de dangereux adversaires, ils s’offrent une trêve ensoleillée, arrosée de cognac et de café distillé sur un brasero de fortune, et compatissent un instant l’un pour l’autre avant de retourner au combat qui aura une issue fatale pour l’un comme pour l’autre. Alors je me suis surprise à rêver d’une trêve perpétuelle.

///

Un extrait de Onze jours en septembre

Le marquis de Montcalm et moi avions été abreuvés de fables identiques. Sous la tonnelle d’émeraude, profitant d’une accalmie entre deux tirs de mousquets, deux missions incendiaires au bord de l’eau, nous en évoquions les extravagantes péripéties. Demi-heures volées ici, une ou deux heures là, à l’abri du carnage… un dimanche, au pire moment de mon infirmité physique et du chagrin de Montcalm à l’annonce du décès de sa fille, nous eûmes un après-midi entier pour sceller dans la fraîcheur pailletée notre ultime accord, le plus secret : inaudible quoiqu’épié par les fourmis, invisible mais palpitant dans le bleu fulgurant de la libellule qui s’est posée sur ma manche alors que Montcalm me prenait par la main.

Nous sachant observés, nous n’avions pas émis un soupir, pas une larme. Mais il est vrai que les petits oiseaux disent toutes sortes de choses, et il s’en trouvait de nombreux dans les parages. Aujourd’hui que je lis mon histoire dans les livres en termes si nets, si définis, je sais que nous pouvions compter sur leur absolue discrétion. Que notre secret n’a voyagé ni par terre ni par mer, ni, plus tard, par voie ferroviaire ou télégraphique. Hier comme aujourd’hui, on pouvait leur faire confiance, aux petits oiseaux, pour taire notre déloyauté mélancolique, pour élever bien haut nos idées noires, pour muer et adoucir le désespoir suicidaire d’un homme – ou de deux – parvenus devant cette tombe, dans ce Nouveau Monde ; et pour y instiller l’espoir avec leur chant, ces petites notes qui jaillissent, affranchis de la fange où se vautre l’humanité, emportées tel du pollen par le vent, et libre à ceux, en bas, de saisir leur lumière, leur amour.

***

Onze jours en septembre, de Kathleen Winter, traduit par Sophie Voillot, Les Éditions du Boréal

Les commentaires sont fermés.

C’EST LA RECOLONISATION QUI ATTEND LE QUÉBEC:
Maintenant l’Angleterre, pour mieux passer à la France, comme suceur (Directe dans l’UQAM de l’indépendance) de notre propriété intellectuelle. Nous parlons de la nouvelle histoire du Québec, pas reluisante, à voir toutes les industries qui s’envolent au vent des multinationales,comme Alcan, Bombardier, Institut Frappier, Ubisoft, Power Corporation, GM (en Ontario) etc…etc… Mais on conserve LES JOBS ! Avec des Québécois qui ne savent plus lire, depuis la transformation de cet enseignement du français à rabais (des cordes et des phonems (1976) et l’anglais sous le tapis. Commet faire une relève qui veut se tenir debout, quand on lui a coupé une jambe, et l’autre qui manque d’argent pour se faire du commerce. Selon notre bonne vieille mère patrie de monsieur Landry, nous ne savons pas manger, nous ne savons pas parler, nous ne savons pas traduire des films, nous ne savons pas faire des avions plus »cheap », nous ne savons pas faire l’indépendance, nous ne savons pas administrer Ubisoft etc..Etc…Autrement dit, tassez-vous on vient vous sauver. N’était-ce pas là la raison de faire apparaître une illusion d’indépendance entretenue pendant +ou- 50 ans, pour affaiblir une colonie prometteuse? Ne jamais oublier, notre littoral est une carte importante, il est double, en plus. Depuis Kessinger (1976), la CIA travaille au Québec, pour l’accès très important, des Grand-Lacs, et bien autres choses qui regardent nos richesses naturelles.