Mariage pour tous !

Le designer rebelle Jean Paul Gaultier présente ses plus beaux habits nuptiaux au Musée des beaux-arts de Montréal.

Jean Paul Gaultier (né en 1952), collection Le mariage homosexuel, modèle Les mariés, prêt-à-porter homme printemps-été 2005. (Photo : © Patrice Stable / Jean Paul Gaultier)

Oubliez la robe blanche et le smoking classiques. Entre les mains de Jean Paul Gaultier, les habits de noces se font vertigineux et épousent toutes les déclinaisons possibles des amours contemporaines. Une exposition du Musée des beaux-arts de Montréal présente, jusqu’au 9 octobre, les plus belles pièces nuptiales du célèbre couturier français.

Love Is Love est en quelque sorte le dernier tableau de La planète mode de Jean Paul Gaultier. Créée par le MBAM en 2011, cette exposition à succès a été vue depuis par deux millions de personnes dans 12 villes du monde. Gaultier lui-même présente l’aventure ainsi : « Comme la tradition veut que les défilés de haute couture se terminent avec la mariée, et afin de remercier les Québécois de leur enthousiasme pour mon travail, ainsi que l’équipe créative du MBAM derrière cette tournée record, le bouquet final devait se faire avec mes plus belles robes de mariée. »

Jean Paul Gaultier (né en 1952), collection Les cutters, modèle La mariée, haute couture printemps-été 2001. (Photo : © Patrice Stable / Jean Paul Gaultier)

Thierry-Maxime Loriot, commissaire de La planète mode et de Love Is Love, explique la démarche qui a mené à ces créations, grâce auxquelles couples homosexuels, transsexuels et interculturels sont aussi invités à la fête. « Cette réflexion a débuté il y a longtemps chez Jean Paul Gaultier. Souvenons-nous des mannequins au look androgyne qu’il engageait dans les années 1980. Alors jugés atypiques, ils sont aujourd’hui omniprésents dans les défilés. Puis il y a eu sa collection Le mariage homosexuel, en 2005, où son mannequin fétiche Tanel Bedrossiantz fermait la présentation aux côtés de son “mari”. » En 2011, Gaultier présentait sa collection Punk Cancan. Là encore, la mariée était incarnée par un homme, Andrej Pejic, qui d’ailleurs est devenu une femme trois ans plus tard.

Ancien mannequin-vedette, Loriot est convaincu que, si la recherche du couturier demeure d’abord esthétique, elle est en partie modelée par des enjeux politiques. « En 2013, alors que la France est déchirée par le débat sur le mariage pour tous, lui conçoit sa collection 61 façons de se dire oui, dont les tenues auront pour nom “To Be or Not to Bi” ou encore “La mariée bipolaire”. » En s’impliquant de la sorte dans le débat social, dit-il, Gaultier fait mentir l’idée que la mode n’est que l’univers du frivole et du superficiel. « Avec lui, on est loin du salon de la mariée ! »

Jean Paul Gaultier (né en 1952), collection Élégance parisienne, modèle Les mariés, haute couture automne-hiver 1998-1999. (Photo : © Patrice Stable / Jean Paul Gaultier)

Le titre de l’expo — dans sa forme complète Love Is Love : Le mariage pour tous selon Jean Paul Gaultier — est d’ailleurs un clin d’œil au discours prononcé le 26 juin 2015 par le président des États-Unis, Barack Obama, qui avait employé la formule pour célébrer la légalisation du mariage homosexuel dans tous les États américains. Loriot va plus loin : « Je trouve important que les plus jeunes, pour qui l’homosexualité, du moins au Québec, est devenue quelque chose de tout à fait accepté, au point qu’on pourrait tenir son acceptation pour acquise, aient l’occasion de réfléchir au chemin qui a été parcouru en la matière depuis un quart de siècle. »

En tout, on pourra voir au MBAM 36 robes et habits nuptiaux conçus de 1990 à 2017. La scénographie, nous explique Loriot, comprend un gâteau de mariage démesuré, pièce montée sur laquelle figureront des mannequins incarnant des couples de toutes les configurations possibles. Le visage de certains sera animé par des projections audiovidéos mises au point par Denis Marleau et Stéphanie Jasmin, de la compagnie de théâtre montréalaise UBU. Elles mettront en vedette des personnalités telles Melissa Auf der Maur, Virginie Coossa, Ève Salvail et Gaultier lui-même.

Bienvenue aux noces !

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