
Il se dit à propos de Jacco Gardner que c’est un enfant sage qui fait de la musique de drogué. L’image lui sied bien, même si ce garçon timide natif des environs d’Amsterdam n’a jamais mis les pieds chez un apothicaire local.
Inconnu il y a encore trois ans, Gardner fascine aujourd’hui avec une pop baroque et un rock psychédélique de haute volée, celui-là même qui s’est infusé chez les Beatles, Jimi Hendrix ou Pink Floyd, entre autres : une musique censée procurer des effets similaires à ceux des drogues en vogue à cette période-là, sous-jacente à une forte vague créative entre affranchissement des formes, expérimentation à tout va et détournement des techniques d’enregistrement traditionnelles. Un chaotique remue-méninges, qui chamboule encore la jeune génération, dont ce Néerlandais est le dernier millésime.
Cet hyperactif dopé à la mélancolie lancinante et aux orchestrations vaporeuses inocule son virus à quiconque l’écoute. Sur Cabinet of Curiosities, qui l’a révélé en 2013, il a composé, produit et joué tous les instruments (sauf la batterie). Sur son second opus, Hypnophobia (la peur de dormir), paru ce mois-ci et qu’il viendra défendre au Québec en juin, il réitère l’expérience avec brio : aux premiers coups de butoir de l’album, on a déjà les pieds pris dans les sables mouvants de son monde fantasmagorique.
À croire que le jeune homme ne s’est jamais vraiment remis de l’écoute de ses glorieux aînés Syd Barrett, Brian Wilson (des Beach Boys) et Curtt Boettcher, ou de celle de l’album Odessey & Oracle, des Zombies. Et peu lui importe s’il n’était pas né à leur époque. N’allez surtout pas le traiter de faussaire : ce puriste est en quête, comme il le dit lui-même, de « la bande-son idéale du monde parallèle où il se situe ». Pourvu qu’il la cherche encore longtemps.
(Le 16 juin au Ritz P.D.B., rue Jean-Talon Ouest, à Montréal)