Les 10 meilleurs livres québécois de 2022

Notre chroniqueuse a dévoré près de 100 nouveautés cette année. Celles de Sophie Bienvenu, David Goudreault, Louise Penny et Stéphane Rousseau, entre autres, se taillent une place dans son palmarès des 10 ouvrages les plus mémorables de 2022.

montage : L’actualité

Mélasse de fantaisie

de Francis Ouellette

Ce premier roman était fort attendu, son auteur ayant remporté deux fois le Prix du récit de Radio-Canada. Mélasse de fantaisie ne décevra pas les amateurs de la plume crue, mais littéraire, de Ouellette. On y rencontre le petit Francis, curieux et allumé, élevé par une mère toxicomane dans le brouhaha du Centre-Sud, quartier bourré de paradoxes. Coup de foudre pour ses personnages plus grands que nature (mais qui existent, nous jure l’auteur !) dans un milieu difficile où la lumière finit par poindre.

(La Mèche, 216 p.)

Ma fin du monde

de Simon Roy

L’auteur à qui on doit des textes fascinants (Ma vie rouge Kubrick, entre autres) a eu recours récemment à l’aide médicale à mourir, lui qui souffrait d’un cancer du cerveau devenu inopérable. Son dernier livre, tout en fragments, est un testament fidèle au style qui l’a fait connaître, valsant entre la réalité et la fiction, des frontières floues avec lesquelles il joue de manière habile. Dans ce cas-ci, il s’intéresse à La guerre des mondes, cette adaptation radiophonique annonçant une invasion de Martiens. Et si tout devait se terminer maintenant, que resterait-il de nous ?

(Boréal, 136 p.)

Quatre histoires de famille

de Bernard Émond

On ne peut qu’être impressionné par l’économie de mots de ce recueil de nouvelles, qui est ciselé avec tant de finesse qu’on s’arrête fréquemment pour admirer le paysage littéraire où défilent les thèmes chers au cinéaste : la famille, l’amour perdu et retrouvé, la fin sous toutes ses formes. L’histoire d’une femme qui revient terminer sa vie auprès de l’homme et de l’enfant qu’elle a abandonnés plusieurs décennies plus tôt est notre préférée, mais les quatre nouvelles sont si uniques que le lecteur trouvera son compte dans chacune d’elles.

(Leméac, 128 p.)

Soudain le Minotaure

de Marie Hélène Poitras

L’autrice revisite son premier roman, qui n’a (tristement) pas pris une ride depuis son lancement. Deux voix racontent leur rencontre et la trajectoire qui s’ensuivit. Ariane se remémore un voyage en Allemagne où elle a tenté de comprendre les racines de la violence, alors que Mino, qui croupit dans un pénitencier, essaie de comprendre l’origine de ses pulsions. Marie Hélène Poitras a retouché le texte et y a aussi fait une importante modification pour inverser la structure du récit. À relire, absolument !

(Alto, 176 p.)

Les ombres blanches

de Dominique Fortier

Ce livre nous a offert une pause appréciée entre les polars haletants et les romans bigarrés de 2022. Même s’il s’agit de la suite de l’excellent Les villes de papier (Renaudot, 2020), elle accepte les nouveaux lecteurs sans les plonger dans l’obscurité. À sa mort, la poète américaine Emily Dickinson laisse derrière elle d’innombrables poèmes. Des femmes de son entourage (sa sœur, la maîtresse de son frère et sa belle-sœur) uniront leurs forces pour mener son œuvre à la publication. Quand l’auteur n’est plus là pour expliquer son texte, comment traduire sa pensée fidèlement ? Beau défi ! Véritable travail d’orfèvre, ce livre mérite d’être dégusté sans précipitation.

(Alto, 248 p.)

Maple

de David Goudreault

Si vous avez lu la trilogie de La bête, vous aurez grand plaisir à retrouver Maple, cette prostituée au langage coloré qui sévissait dans le dernier tome (nul besoin d’avoir lu la trilogie pour s’attacher à ce personnage trash). Fraîchement sortie de prison, Maple tentera d’aider les policiers à élucider des meurtres qui ne semblent pas liés entre eux… et pourtant ! Célébrons le retour de l’humour noir et des critiques sociales cinglantes de cet auteur qui possède un réel talent pour faire parler ceux que la société préfère ne pas entendre.

(Stanké, 240 p.)

Famille royale

de Stéphane Rousseau

Voici le portrait de la famille un peu « tout croche » dans laquelle a grandi Stéphane Rousseau. La plume de cet artiste n’étonne pas par son sens de l’humour – évidemment ! –, mais plutôt par la tendresse et parfois le désarroi qu’elle exprime devant les malheurs qui semblent vouloir s’acharner sur le narrateur. Un récit très humain où on découvre Rousseau en tant que fils, conjoint et papa, des facettes qu’il n’a pas l’habitude de dévoiler.

(KO Éditions, 264 p.)

Le pendu

de Louise Penny

Elle est bien chouette, cette novella sur laquelle est basé le scénario des deux premiers épisodes de la télésérie Le village de Three Pines, diffusée depuis peu sur la plateforme Prime Video. Le célèbre inspecteur Armand Gamache doit enquêter sur un client de l’auberge du village, retrouvé mort dans les bois. Nul besoin d’avoir lu les romans précédents de la série pour plonger dans celui-ci, puisque le livre inclut une liste des personnages. 

(Traduction de Lori Saint-Martin et Paul Gagné, Flammarion Québec, 128 p.)

La fin du commencement

de Fadi Malek et Anne Villeneuve

On avait apprécié son coup de crayon et son ambiance à l’aquarelle dans Une longue canicule (Mécanique générale, 2017), et on a retrouvé Anne Villeneuve cette année avec ce livre où elle raconte l’enfance et le déracinement de Fadi (un pseudonyme), un immigrant libanais. Ayant fui son pays en raison de la guerre, mais aussi parce que l’homosexualité y est encore taboue, le jeune homme fait partager en toute simplicité ses doutes et ses questionnements. Un roman graphique touchant.

(Nouvelle Adresse, 184 p.)

J’étais un héros

de Sophie Bienvenu

Yvan est un père alcoolique, éloigné de sa fille Gabrielle depuis près de 20 ans. Quand l’homme reçoit un sombre pronostic de cancer, il choisit de faire du ménage dans sa vie. Mais réparer les liens avec Gabrielle avant de partir n’est pas si aisé. Va-t-il enfin réussir à arrêter de boire, comme le réclame son entourage depuis toujours ? Sera-t-il capable d’avouer à sa fille qu’il pense à elle tous les jours et que la fin approche pour lui ? Court et percutant, ce roman prend au cœur : accrochez-vous bien !

(Le Cheval d’août, 176 p.)