Naïveté et autres suicides…

Parce que Michel Tremblay raconte bien.

Le jeune chansonnier avait du talent et du front. Et la naïveté de croire que c’était suffisant pour que les Québécois des années 60 l’acceptent comme il est vraiment. C’est-à-dire homosexuel.

L’obscurantisme l’a brisé. Il ne s’en est jamais remis.

Le dernier Michel Tremblay (Quarante-quatre minutes, quarante-quatre secondes) pourrait ressembler à du grattage de vieux bobos, à une énième complainte des années 60 qu’on n’en peut plus d’entendre ressassée. Pourtant on embarque.

Parce que Tremblay raconte bien. Que la structure romanesque est intéressante. Et, surtout, que l’émotion sonne vrai. Le cri du coeur du nain Carmen, un personnage pourtant secondaire, tire les larmes. Et on finit par compatir avec le héros, injustement puni pour avoir mal jaugé son époque, même si, tout de même, il n’a pas passé sa vie à compter des boutons rue Chabanel. On pense une certaine chanteuse dont la carrière fut torpillée pour la même raison et à la même époque, mais qui n’a pas eu, elle, en guise de prix de consolation, un poste permanent de réalisateur à la radio d’État. (Leméac/Actes Sud, 358 pages, 29,95 $)