D’autres virus viendront. D’autres catastrophes frapperont le Québec. Pas de sitôt, espère-t-on. Mais en tirant des leçons de la dernière — et éprouvante — année, il est possible d’être mieux préparés pour faire face au prochain coup dur qui ébranlera la province. Voici l’un des chantiers à mettre en œuvre afin de ne plus jamais vivre des temps aussi difficiles.
La pandémie a fait prendre conscience de la trop grande place occupée par l’auto en milieu urbain, au détriment des espaces verts. Est-ce le choc dont nous avions besoin afin de réaménager nos villes à hauteur d’humain ?
Quand le premier confinement a été annoncé en mars 2020, les citadins ont envahi autant les espaces verts que les Costco les samedis matin. Les déplacements en voiture ont été réduits au minimum. Le brouhaha urbain a laissé libre cours au chant des oiseaux. Du coup, la pandémie nous a fait entrevoir de nouvelles possibilités pour la ville.
« Ce ne sont pas seulement les espaces verts montréalais qui ont connu un boum de popularité. Les parcs de banlieue aussi. La hausse de leur fréquentation nous a montré combien ces espaces sont importants dans nos vies et pour notre résilience collective », affirme Christian Savard, directeur général de Vivre en ville, un organisme qui promeut un aménagement durable de nos villes.
Les experts en aménagement sont unanimes : il faut procéder à un verdissement accéléré de nos villes afin de les rendre plus résilientes aux crises futures, que celles-ci soient de nature sanitaire ou climatique. « On ne doit pas sous-estimer le pouvoir des arbres. Non seulement ils purifient l’air et rafraîchissent la température ambiante, ce qui aide à contrer le phénomène des îlots de chaleur, mais beaucoup d’études ont démontré que leur présence contribue à l’amélioration de la santé mentale des populations, en abaissant le stress et l’anxiété », explique Claudel Pétrin-Desrosiers, médecin résidente et présidente de l’Association québécoise des médecins pour l’environnement, qui compte plus de 200 membres.
Si les oasis de verdure manquent dans nos villes, elles sont encore moins nombreuses dans les quartiers défavorisés et plus densément peuplés, comme Parc-Extension à Montréal ou Vanier à Québec. « L’accès à la nature doit être un droit inclusif et non un privilège des populations plus riches, qui peuvent aussi sortir de la ville en voiture plus facilement », dit Cyril Frazao, directeur exécutif de Nature Québec.
Le problème actuel, c’est que les critères de santé sont encore rarement pris en considération dans les aménagements urbains. « La Loi sur l’aménagement et l’urbanisme, qui date de 40 ans, axe tout sur l’automobile et sur la construction immobilière », déplore Isabelle Bérubé, de la Société pour la nature et les parcs, section Québec.
Cette loi est en cours de modification. La ministre des Affaires municipales et de l’Habitation, Andrée Laforest, a récemment lancé une conversation nationale sur l’urbanisme et l’aménagement du territoire.
Et puis, les choses bougent à certains endroits. À Montréal, le maire de l’arrondissement de Rosemont–La Petite-Patrie, François William Croteau, a dévoilé à la fin de 2020 un plan de transition écologique et de résilience, qui revoit en profondeur les principes de l’aménagement urbain. Cette politique accorde une grande place à l’amélioration des écosystèmes naturels en ville afin notamment de favoriser la biodiversité. « Plus les écosystèmes sont résilients, mieux ils peuvent nous rendre service, par exemple en captant les eaux de pluie et en devenant des îlots de fraîcheur », soutient François William Croteau. En ce qui a trait à l’ensemble de la métropole, le Plan climat de la Ville de Montréal prévoit la plantation de 500 000 arbres d’ici 2030.
Le maire de Rosemont–La Petite-Patrie remet aussi en question l’accaparement des rues par l’automobile. Ces espaces publics sous-estimés occupent un grand pourcentage du sol. La multiplication des pistes cyclables n’est pas l’unique solution afin de rompre ce monopole. « Les commerces pourraient occuper davantage de cet espace public, animer le quartier et contribuer à la vitalité des artères commerciales, lesquelles sont frappées de plein fouet par la vague du magasinage numérique », dit François William Croteau. Celui-ci étudie également la possibilité de permettre aux citoyens de prendre possession de places de stationnement sur rue en vue d’y aménager des terrasses ou des jardins.
La ville postpandémie sera-t-elle plus verte et inclusive ?
Cet article a été publié dans le numéro d’avril 2021 de L’actualité.
Bravo pour cet article!
Il y a donc de l’espoir dans l’air… C’est le cas de le dire :o)
Oui, les arbres sont un facteur apaisant. Ils ont aussi une valeur esthétique en masquant des façades de commerces désolantes de banalité ou en ombrageant des avenues résidentielles, par exemple.Ils ont aussi une portée éducative : le vivant fait aussi partie des villes.
Verdir les villes, bien sûr. C’est une des raisons pour lesquelles j’aime tant Paris. Quand j’y séjourne, ma femme et moi allons tous les jours sur la Coulée verte, qui traverse le 12e arrondissement. Parfois, nous poussons la promenade jusqu’au Bois de Vincennes et ses kilomètres de boisés. Nous fréquentons aussi le Jardin des Plantes et le Jardin du Luxembourg. C’est l’abondance. À Montréal heureusement, nous avons le Mont-Royal. Mais il manque d’arbres.