Assurance invalidité : en avez-vous besoin ?

Assurer son salaire est tout aussi important qu’assurer sa maison ou son auto. C’est à cela que sert l’assurance invalidité.

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Ce serait regrettable qu’une blessure ou une maladie physique ou mentale vous empêche un jour de travailler. Ce le serait encore davantage si cette invalidité devait soudainement vous faire basculer dans la pauvreté. Pour vous protéger, il est fortement recommandé de souscrire une assurance… mais pas n’importe laquelle. Voici comment vous y retrouver.

Une assurance invalidité remplace un certain pourcentage de votre salaire, pour une durée plus ou moins longue, si vous n’êtes plus en mesure de travailler. Annie Pelletier, conseillère en sécurité financière chez GPS Équipe conseil, la qualifie de « primordiale », tandis que Martin Boyer, professeur de finance à HEC Montréal et spécialiste du secteur des assurances, va encore plus loin. « De toutes les assurances qu’on devrait avoir comme travailleur, c’est probablement la plus importante », dit-il.

Beaucoup de gens en ont une parmi les avantages sociaux offerts par leur employeur. Mais elle est parfois limitée — elle ne remplace que 60 % du salaire, par exemple, ou ne dure que deux ans. La première chose à faire est donc de vérifier la couverture dont vous disposez au boulot.

Si vous n’avez pas d’assurance invalidité parce que vous êtes travailleur autonome ou que cela ne fait pas partie de vos avantages sociaux, vous devriez songer sérieusement à en obtenir une. Même chose si celle offerte par l’assurance collective de votre employeur n’est pas très généreuse ; vous gagneriez alors à contracter une assurance invalidité supplémentaire.

« L’assurance invalidité permet de pallier les problèmes financiers quand une personne n’est plus capable de travailler, quelle que soit la raison ou presque », résume Martin Boyer, en précisant que des exclusions s’appliquent. Par exemple, la plupart des assurances ne couvrent pas l’invalidité en raison d’une maladie ou d’une incapacité que vous aviez déjà au moment de signer le contrat, comme un cancer ou de l’arthrose sévère.

Dans le cas d’une maladie dont vous avez été atteint récemment et dont vous êtes remis, comme une dépression, il se pourrait que l’assureur exige l’absence de récidive depuis au moins cinq ans, sans quoi il inclurait également cette affection dans les exclusions du contrat.

Pour le reste, c’est le fait d’être invalide qui détermine si vous pouvez être indemnisé, et non le diagnostic d’une maladie bien précise (comme dans le cas de l’assurance maladies graves, on y reviendra).

Choisir la protection voulue

Avant de commencer votre magasinage auprès des compagnies d’assurances ou d’un courtier, vous devez vous demander quel pourcentage de votre revenu habituel vous souhaitez remplacer en cas d’invalidité (la plupart du temps de 60 % à 85 % du salaire, selon les assurances). Les prestations sont généralement non imposables si vous payez les primes d’assurance entièrement de votre poche, mais elles peuvent l’être si votre employeur paie une partie ou la totalité des primes de votre assurance collective. Tenez-en compte dans vos calculs. 

Vous devez ensuite choisir le délai de carence, c’est-à-dire la période d’attente avant de recevoir des prestations au moment d’une invalidité. Cette période peut être plus ou moins longue (de quelques semaines à quelques mois). À noter que pour certains types de problèmes de santé (comme une hospitalisation urgente), ce délai peut être inexistant.

Finalement, on détermine la durée de l’assurance, c’est-à-dire la période pendant laquelle vous recevrez des prestations. L’assurance invalidité de courte durée vous couvre habituellement pendant un maximum de six mois, tandis que l’assurance de longue durée offre des prestations qui peuvent s’échelonner sur quelques années ou jusqu’à un âge précis (65 ans, par exemple).

Annie Pelletier conseille généralement à ses clients l’assurance offerte jusqu’à 65 ans. « Deux ans, par exemple, ça peut être court pour se remettre de certaines maladies ou blessures », souligne-t-elle. Les séquelles d’un traumatisme crânien ou d’un AVC peuvent mettre énormément de temps à se résorber, à titre d’exemples. Martin Boyer est parfaitement d’accord : mieux vaut prévoir le pire et s’assurer contre une « catastrophe », c’est-à-dire une invalidité de très longue durée.

Choisir sa durée… et son prix

Évidemment, comme au magasin de tissus, plus la couverture que vous choisissez est grande, plus elle vous coûte cher. Une assurance qui vous verse des prestations jusqu’à 65 ans est plus onéreuse qu’une autre qui se limite à deux ans. Une protection qui verse 80 % d’un salaire annuel de 100 000 dollars sera pas mal plus coûteuse qu’une autre qui offre 60 % d’un salaire de 45 000 dollars. Et gardez en tête que la prime que vous payez est également établie en fonction de votre âge, de votre état de santé et du délai de carence choisi.

À titre d’exemple, voici la prime mensuelle que devrait payer une adjointe administrative de 30 ans, non fumeuse, pour remplacer son salaire brut de 50 000 dollars à 72 %, selon deux assureurs : 

2 ANSJUSQU’À 65 ANS
Assureur A
34,70 $ par mois
62,90 $ par mois
Assureur B
54,12 $ par mois
83,04 $ par mois
Soumission réelle effectuée par Annie Pelletier auprès de deux assureurs.

Avant de signer, assurez-vous de comprendre la définition du mot « invalidité » prévue à votre contrat. Certaines assurances versent des prestations lorsqu’une personne n’est plus en mesure d’exercer « tout type d’emploi », tandis que d’autres (plus chères) indemnisent une personne incapable d’exercer « son propre emploi ». Prenons un pompier qui se retrouve en fauteuil roulant à la suite d’un bête accident à la maison qui l’a blessé à la jambe. Il peut encore occuper un emploi de bureau : il recevra donc des prestations s’il est couvert pour une invalidité liée à son propre emploi, mais ne touchera rien si son contrat prévoit une invalidité pour tout type d’emploi et qu’il a les qualifications pour pourvoir un autre poste, à la caserne ou ailleurs. (Fait à noter : s’il s’était blessé au travail, c’est la CNESST qui lui verserait des prestations et non son assurance invalidité.)

Et si vous songez à accepter l’assurance invalidité que vous offre votre prêteur hypothécaire pour couvrir le solde de votre prêt, sachez qu’elle comporte deux inconvénients importants. De un, cette assurance ne servira qu’à rembourser le prêt hypothécaire, et rien d’autre. Ça donne un bon coup de pouce puisqu’il s’agit souvent du plus gros poste budgétaire, mais vous ne recevrez pas de prestations pour payer l’épicerie ou un prêt-auto.

De deux, « puisque l’assurance offerte par la banque se renouvelle [en même temps que votre prêt hypothécaire] et que le coût de la prime augmente en fonction de votre âge à chaque renouvellement, vous vous retrouvez à payer plus cher pour toucher une prestation plus basse », souligne Annie Pelletier.

L’assurance maladies graves : avec précaution

Lors de votre recherche d’assurances, vous pourriez tomber sur l’assurance maladies graves, un produit qui, contrairement à ce que son nom peut laisser croire, est très différent de l’assurance invalidité. Elle verse une somme unique (un seul paiement de 500 000 dollars, par exemple, plutôt que des prestations mensuelles pendant deux ans), mais seulement lorsque l’assuré est atteint d’une des maladies graves prévues à son contrat, et que celle-ci correspond à la définition exacte. Un exemple de contrat mis en ligne par RBC Assurances précise par exemple que les cancers sont couverts, sauf dans le cas, notamment, de « tout cancer de la peau, autre qu’un mélanome, en l’absence de métastases ».

« L’assurance maladies graves nous protège si nous avons la chance d’avoir exactement une des maladies couvertes, dans notre malchance d’être malade. […] C’est l’équivalent d’acheter un billet de loterie », affirme Martin Boyer, de HEC Montréal.

Des cas d’assurés qui n’ont pas reçu les prestations auxquelles ils s’attendaient ont fait les manchettes en 2019, puis l’Autorité des marchés financiers (AMF) a publié un rapport en décembre 2021, dans lequel elle exige que les assureurs qui proposent ce type d’assurance « évitent de créer de la confusion ou d’induire une compréhension erronée du produit chez le consommateur ». Le document évoque par exemple les publicités utilisant des statistiques sur la prévalence d’une maladie qui peuvent laisser croire au client que tous les stades de cette maladie sont couverts, alors que ce n’est pas le cas. Depuis, les assureurs ont modifié certaines de leurs pratiques pour aider le consommateur, souligne le porte-parole de l’AMF, Sylvain Théberge. Ils ont notamment révisé leur vocabulaire technique, publié des guides explicatifs et ajouté des foires aux questions sur leur site Internet. 

La conseillère en sécurité financière Annie Pelletier reconnaît que l’assurance maladies graves est un produit plus « restrictif » que l’assurance invalidité, mais elle soutient que la somme forfaitaire qu’elle offre peut notamment être utile pour payer des soins de santé privés ou permettre à un conjoint d’arrêter de travailler. « Je prends le temps d’expliquer le contrat et ce que ça couvre, dit-elle. Malheureusement, ce type d’assurance n’est pas toujours bien compris. »

Autrement dit : ouvrez grand les oreilles au moment de faire votre choix.

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