Êtes-vous proche aidant sans le savoir ?

Si vous vivez avec une personne âgée de 70 ans ou plus, vous pourriez toucher un généreux crédit d’impôt. Même si cette personne est en parfaite santé.

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Jacob Wackerhausen / Getty Images / montage : L’actualité
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Pas besoin de prendre soin d’une personne malade pour être considéré comme un proche aidant… et bénéficier du crédit d’impôt de 1 299 dollars offert par le gouvernement du Québec.

Le crédit d’impôt remboursable pour personne aidante du gouvernement provincial comporte deux volets. Le premier correspond à l’image qu’on se fait généralement d’un proche aidant. Mais le deuxième, plutôt méconnu, ratisse beaucoup plus large. Pour en profiter, il suffit essentiellement d’habiter avec un proche âgé de 70 ans ou plus, sans être son conjoint ou sa conjointe. 

Dans ce cas, la personne aidée n’a pas besoin de présenter une déficience physique ou mentale. Une femme qui vit avec son père de 75 ans peut avoir droit au crédit de 1 299 dollars… même si le paternel pratique encore le tennis et le parapente. Attention, il faut cependant cohabiter 365 jours par année, dont au moins 183 pendant l’année visée par la déclaration — sauf si la personne aidée décède durant l’année. Cette dernière ne doit pas habiter dans une résidence pour aînés ou un centre d’hébergement et de soins de longue durée (CHSLD), ça va de soi.

Le gouvernement a mis en place ce crédit pour « reconnaître le geste social accompli par les personnes aidantes en leur apportant un soutien financier », explique le ministère des Finances dans un récent document sur la fiscalité.

Si vous pensez que vous étiez admissible à ce crédit d’impôt au cours des dernières années mais que vous ne l’avez pas réclamé, sachez que vous pouvez revenir jusqu’à 10 ans en arrière. Gardez toutefois en tête que les critères d’admissibilité ont changé au fil des ans. 

Vous pourriez également demander à recevoir des versements mensuels anticipés du crédit 2023 dès maintenant, plutôt qu’après avoir produit votre déclaration de revenus l’an prochain.

D’autres crédits d’impôt méconnus

Même le volet 1 du crédit provincial, celui conçu pour donner un coup de pouce à ceux qui correspondent à l’idée qu’on se fait d’un proche aidant, n’est pas si connu. Il s’adresse aux personnes qui prennent soin d’un adulte ayant une déficience physique ou mentale « grave et prolongée ». Par exemple, une femme qui s’occupe de son conjoint souffrant d’alzheimer ou un homme qui aide son père en fauteuil roulant à s’habiller et à s’alimenter au quotidien. Si le proche aidant cohabite avec la personne aidée, le crédit peut atteindre 2 598 dollars.

Le gouvernement fédéral offre aussi un crédit d’impôt non remboursable, comme l’explique ma collègue dans ce texte publié l’an dernier.

« Beaucoup de Québécois pourraient bénéficier de ces crédits, mais n’en profitent pas. C’est une certitude », affirme Guillaume Joseph, directeur général de l’Appui pour les proches aidants, un organisme sans but lucratif financé par le gouvernement du Québec. « Plusieurs personnes qu’on rencontre ne connaissent même pas l’existence de ces crédits », déplore-t-il.

Des dizaines de milliers de dollars non réclamés

Prenez la MRC de Coaticook, en Estrie. L’an passé, la « clinique d’impôts » du centre d’action bénévole (CAB) local s’est mise à la recherche de proches aidants qui ne se considéraient pas comme tels, et son travail a porté des fruits. Elle est parvenue à aider une trentaine de personnes à récupérer plus de 80 000 dollars en crédits impayés au cours des dernières années.

C’est le cas de Lisette Cliche, une dame de 78 ans qui a pris soin de son conjoint atteint d’un trouble neurocognitif majeur jusqu’à son décès en 2022. Elle l’a aidé à accomplir ses tâches quotidiennes à la maison pendant trois ans, ce qui lui a valu des crédits provinciaux totalisant près de 5 000 dollars. « Quand j’ai obtenu l’argent, je n’en croyais pas mes yeux, raconte-t-elle. Ça m’a permis de payer les dépenses qui s’étaient accumulées dans les dernières années. » Et ce n’est que la pointe de l’iceberg, estime Serge Fournier, travailleur de milieu auprès des aînés au CAB. « D’importantes sommes d’argent dorment dans les coffres du gouvernement », dit-il.

Selon Julie Bickerstaff, directrice d’Info-aidant, un service d’information pour les proches aidants offert par L’appui, les contribuables ne réclament pas les crédits parce qu’ils ne les connaissent pas, parce qu’ils ne se considèrent pas comme des proches aidants, ou encore parce qu’ils craignent de pénaliser la personne aidée. « Certaines personnes aidées qui ont une déficience mentale ou physique pensent que le gouvernement va leur retirer leur permis de conduire, alors que ce n’est pas automatique », souligne-t-elle.

La somme que vous pourriez recevoir en crédits d’impôt dépend du volet auquel vous êtes admissible (pour ce qui est du crédit provincial) et, dans certains cas, du revenu de la personne que vous aidez. Puisque chaque crédit a ses propres critères à respecter et qu’il est facile de s’y perdre, la manière la plus simple de savoir si vous y êtes admissible est d’utiliser cet outil créé par la Chaire en fiscalité et en finances publiques (CFFP) de l’Université de Sherbrooke. Vous pouvez également jeter un coup d’œil à la section « questions et réponses » du site de Revenu Québec.

C’est maintenant à vous de jouer pour déterminer si vous ou un membre de votre entourage êtes proches aidants sans le savoir. Au CAB de Coaticook, Serge Fournier, lui, en a fait une mission personnelle. « On a trouvé huit autres cas au cours des deux dernières semaines, s’enthousiasme-t-il. Et ce n’est pas fini ! »

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