
Ellen et Benoît voyagent beaucoup pour le travail. Dans l’éventualité où un accident mortel ou incapacitant surviendrait, ils ont pris des dispositions testamentaires pour désigner qui s’occuperait de leurs jumeaux encore mineurs et gérerait leur héritage.
Au Québec, chaque année, quelque 2 500 enfants perdent un parent. Du nombre, 2 000 ont droit à la rente d’orphelin de Retraite Québec (238 dollars par mois en 2016), et ce, jusqu’à l’âge de 18 ans, à condition que le parent ait cotisé suffisamment au Régime de rentes du Québec. Toutefois, selon un sondage de la Chambre des notaires du Québec, moins de la moitié des parents qui ont un testament — donc moins du quart de la population — ont pris des dispositions concernant la tutelle de leurs enfants mineurs.
Pour désigner un tuteur, Ellen et Benoît n’ont pas eu besoin de réécrire leurs testaments, rédigés alors qu’ils n’avaient pas d’enfants: une simple modification notariée a suffi, qui a nommé tutrice une amie de la famille et deux substituts, qu’ils ont évidemment consultés tous les trois. Les parents auraient aussi pu choisir de faire simplement une déclaration écrite au Curateur public, le représentant de l’État qui veille à la protection des personnes jugées inaptes, dont les mineurs.
Pour gérer l’héritage (une maison, des REER, une assurance vie), Ellen et Benoît ont créé une fiducie testamentaire comprenant des instructions précises: pourvoir au bien-être des enfants, avec priorité à l’éducation. Pour éviter que les ados ne flambent l’héritage à 18 ans, le couple a aussi prévu des versements: 10 % du patrimoine sera remis aux jumeaux lorsqu’ils auront 18 ans, 40 % lorsqu’ils atteindront 22 ans, et le solde à 27 ans. Pour gérer la fiducie, le couple a désigné la tutrice et le frère de Benoît, lequel tranche en cas de désaccord.
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«C’est une bonne idée de séparer la tutelle et la fonction de fiduciaire», dit Me Michel Beauchamp, notaire chez Beauchamp & Gilbert et chargé de cours à la Faculté de droit de l’Université de Montréal. Il arrive en effet que des tuteurs peu scrupuleux dilapident le bien. «Ça prend un garde-fou.»
Même si les décès simultanés de parents sont rares, il n’en demeure pas moins que ceux qui négligent de prendre des dispositions testamentaires exposent le conjoint survivant, et les enfants, à des tracas financiers facilement évitables.
Des tracas, Beth en a eu lorsque son mari est décédé, à 50 ans. Beth est certes demeurée tutrice légale de leurs enfants, mais pour ce qui touche l’argent, elle a eu quelques surprises. D’abord, en l’absence de testament, les deux enfants ont hérité des deux tiers de la succession — 200 000 dollars chacun, soit autant que leur mère, qui n’a eu droit qu’au tiers.
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Deuxième surprise: le parent n’est pas maître des sommes dont hérite un mineur. Au Québec, tout enfant qui reçoit plus de 25 000 dollars en héritage se voit imposer par le Code civil un cadre de gestion très strict. Ainsi, Beth, en tant que tutrice, administre les biens de ses enfants sous la surveillance d’un conseil de tutelle de trois personnes, nommées par une assemblée de parents, de membres de la famille par alliance et d’amis. Le conseil aussi doit se conformer à une série de règles sous la supervision du Curateur public. Jusqu’au jour où chaque enfant aura atteint 18 ans et reçu ce qui reste de son héritage.
(Les noms et certains détails personnels décrits dans les témoignages ont été modifiés pour protéger la vie privée des gens.)
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