Régime enregistré d’épargne-invalidité (REEI) : voici comment ça fonctionne

Le régime enregistré d’épargne-invalidité est aussi avantageux que sous-utilisé. L’ouvrir sans même y mettre un sou peut permettre de toucher 20 000 dollars.

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Vous connaissez sans doute le REER, véhicule d’épargne pour la retraite, et le CELI, pour l’épargne tout court. Possiblement aussi le REEE pour les études des enfants, et peut-être même le tout nouveau CELIAPP, pour l’achat d’une première propriété. Mais connaissez-vous le régime enregistré d’épargne-invalidité (REEI) ? Cet outil aussi avantageux que sous-utilisé permet aux personnes ayant des limitations physiques ou mentales de toucher de généreuses subventions gouvernementales. Vous pourriez même empocher 20 000 dollars simplement en ouvrant un compte, sans y mettre un sou. Voici à qui le REEI s’adresse, et comment en profiter.

Dans l’ombre des autres comptes d’épargne, le REEI n’a pourtant rien à leur envier. Il ne réduit pas le revenu imposable comme le ferait un REER, mais il offre jusqu’à 90 000 dollars de subventions à vie. Cela en fait le champion incontesté en la matière, loin devant le généreux Régime enregistré d’épargne-études (REEE) et ses subventions maximales de 10 800 dollars par enfant.

Malgré ses avantages, le REEI est largement méconnu : moins d’un Canadien admissible sur trois et moins d’un Québécois admissible sur sept en a un, selon des études réalisées récemment par Statistique Canada et Raymond Chabot Grant Thornton (pour le compte de l’organisme québécois Finautonome). Dans bien des cas, la raison est simple : les personnes qui y auraient droit n’en ont jamais entendu parler.

« De nombreux Québécois ont le droit d’ouvrir un REEI, mais plusieurs ne le font pas par manque d’informations ou à cause des divers obstacles qu’ils rencontrent sur leur chemin », constate Pascale Pilon, directrice générale de l’organisme Finautonome, dont la mission est d’aider les personnes en situation de handicap à obtenir de l’aide financière.

Voici, en gros, comment ça fonctionne : on peut ouvrir un REEI pour soi-même ou pour un proche, comme un enfant ou un conjoint. Les sommes qui y sont déposées peuvent en être retirées par la personne bénéficiaire plus tard dans sa vie ou par le proche qui a cotisé pour payer des soins de santé ou du soutien à domicile, par exemple. 

Le REEI fonctionne un peu comme un REER : les revenus de placement s’accumulent à l’abri de l’impôt tant qu’ils restent dans le compte. C’est au moment où les sommes sont retirées qu’elles sont imposables — sachez qu’il n’y a pas d’impôt à payer sur les cotisations (l’argent que vous avez versé) ; seuls les subventions et les intérêts accumulés au fil des ans s’ajouteront au revenu imposable du bénéficiaire du REEI.

Avant le REEI, le crédit

Pour ouvrir un REEI, il faut avoir moins de 60 ans et avoir droit au crédit d’impôt pour personnes handicapées (CIPH) du gouvernement fédéral. Ce crédit ratisse un peu plus large que son nom ne le laisse entendre. Pour l’obtenir, vous devez démontrer que vous n’êtes pas en mesure d’accomplir certaines actions du quotidien (se nourrir, s’habiller, marcher, parler, etc.) ou que ces actions vous prennent trois fois plus de temps que pour une personne d’âge similaire qui n’a pas de déficience, et ce, malgré différentes mesures mises en place. Les personnes recevant des soins thérapeutiques essentiels, comme des injections d’insuline ou de la dialyse, sont aussi admissibles si ces soins exigent au moins 14 heures par semaine.

De sérieux problèmes d’audition, un trouble du déficit de l’attention sévère ou un diabète de type 1 peuvent donc tous faire de vous un candidat potentiel à ce crédit. Pour éviter les déceptions, assurez-vous de respecter tous les critères d’admissibilité avant de le demander.

C’est au moment de demander le crédit que ça se corse trop souvent, déplore Pascale Pilon. Pour l’obtenir, il faut qu’un professionnel de la santé (dans bien des cas un médecin) atteste votre déficience en remplissant le formulaire T2201. Or, certains médecins refusent de le faire sous prétexte qu’à leur avis, leur patient n’a pas droit au crédit, dénonce la directrice générale de Finautonome. Pas de formulaire signé, pas de crédit. Pas de crédit, pas de REEI.

Et vu les difficultés d’accès au réseau de la santé, pas si simple de se tourner vers un autre professionnel… Au Collège des médecins, la porte-parole Leslie Labranche affirme que le syndic (qui reçoit les demandes d’enquête du public) voit « de temps à autre » des plaintes concernant le refus d’un médecin de remplir un formulaire, y compris le T2201, et qu’il lui rappelle alors ses obligations déontologiques. En bref, ce n’est pas au médecin de juger si vous êtes admissible au crédit pour lequel il vous faut sa signature, explique-t-elle. En cas de besoin, vous pouvez demander à Finautonome de vous donner un coup de main pour sensibiliser ce professionnel de la santé récalcitrant.

Multiplier sa mise

Une fois que le gouvernement fédéral vous a accordé le CIPH, c’est parti. Vous pouvez ouvrir un REEI auprès d’une institution financière, ou bien faire appel à une entreprise comme Terry (en référence au coureur handicapé Terry Fox), qui se spécialise dans ce type de régime. « Les gens peuvent communiquer avec nous pour comprendre comment le régime fonctionne. Ça fait partie de notre mission », explique son patron, Michel-Alexandre Riendeau.

Une fois votre compte ouvert, vos cotisations seront investies selon vos préférences. Gardez cependant en tête que les types de placements offerts (fonds négociés en bourse, fonds communs, certificats de placement garanti, etc.) peuvent varier d’une institution à une autre, tout comme les frais de gestion.

Ensuite, à vous les subventions. La subvention canadienne pour l’épargne-invalidité permet, selon votre revenu familial, de doubler, tripler ou même quadrupler le montant de vos cotisations (jusqu’à un maximum de 3 500 dollars par année et 70 000 dollars à vie). Et grâce au bon canadien pour l’épargne-invalidité, vous obtiendrez jusqu’à 1 000 dollars par année dans votre REEI (jusqu’à un maximum de 20 000 dollars à vie), que vous y cotisiez ou non, si votre revenu familial est de 50 197 dollars ou moins (pour l’année 2022). 

Par exemple, une personne dont le revenu familial est de 30 000 dollars qui parvient à verser 1 500 dollars dans son REEI se retrouvera à la fin de l’année avec 6 000 dollars, tandis qu’une autre qui épargne la même somme, mais dont le revenu familial est de 120 000 dollars, aura 2 500 dollars. Et faites vite, les subventions peuvent être versées jusqu’à la fin de l’année où vous aurez 49 ans. Pas plus ! Entre 50 et 59 ans, vous pouvez encore ouvrir un REEI, mais vous ne recevrez rien de l’État, ce qui rend ce véhicule d’épargne moins intéressant.  

Le mot d’ordre ici : patience. La dernière subvention doit avoir été reçue il y a au moins 10 ans avant de commencer à retirer des sommes du REEI. Seule exception : si votre espérance de vie est de cinq ans ou moins, vous pouvez commencer à encaisser l’argent sans attendre. Autrement, laissez-le fructifier sans y toucher. Car vous pourriez devoir rembourser jusqu’à 10 ans de subventions si vous décidez d’empocher votre magot trop tôt. 

Ce serait dommage de laisser filer de l’argent aussi… facilement gagné.

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