Que celui ou celle qui n’a pas dans sa garde-robe un chandail un peu trop grand acheté il y a quelques années sur un coup de tête ou une tenue de mariage portée une seule fois me lance le premier cintre. Pour leur donner une seconde vie (et récolter quelques dollars), vous pouvez tenter votre chance sur une des nombreuses plateformes d’achat et de vente d’articles usagés entre particuliers.
En marge des populaires Marketplace (de Facebook) ou Kijiji, nombre d’entreprises ont fait des vêtements, chaussures et accessoires d’occasion leur spécialité. Parmi ces applications — ou sites Web — qui vous permettent d’afficher un article à vendre, en espérant qu’un autre utilisateur décidera de l’acheter, j’en ai testé deux : la lituanienne Vinted et la québécoise Upcycli. Bien d’autres sont accessibles aux utilisateurs du Québec, comme la plateforme québécoise Bon magasinage ou l’américaine Poshmark. Envie d’un sac à main Gucci ou d’un polo Louis Vuitton ? La française Vestiaire Collective ou l’américaine TheRealReal se consacrent aux produits usagés haut de gamme.
La revente de vêtements gagne en popularité sur la planète. Un rapport publié par thredUP — une des entreprises actives dans ce secteur — prévoit que la valeur du marché d’occasion (revente en ligne et friperies combinées) doublera à l’échelle mondiale de 2021 à 2026, passant de 96 à 218 milliards de dollars américains. Ce ne sont donc pas les plateformes ou l’engouement qui manquent.
Trouver preneur
J’ai d’abord trouvé quelques articles à afficher sur les deux plateformes mises à l’essai, ayant bon espoir d’intéresser des acheteurs. Vinted revendique 75 millions de membres dans 18 pays en Europe et en Amérique du Nord — elle est offerte au Canada depuis mai 2021, mais refuse de dévoiler le nombre de membres canadiens —, tandis qu’Upcycli compte 20 000 utilisateurs, tous au Québec.
Après avoir téléchargé l’application de chacune et ouvert mon compte, j’ai pu publier les photos de mes vêtements et leur attribuer un prix de vente : un polo bleu foncé pour 10 dollars, des chaussures pour le même prix et une chemise griffée presque neuve pour 50 dollars. Les plateformes demandent ensuite d’inscrire la taille, la couleur, la marque et l’état de chaque article (de « satisfaisant » à « neuf avec étiquette »), en plus d’une courte description.
L’interface et le fonctionnement des deux applications sont très semblables, à quelques différences près. Dans les deux cas, le vendeur peut livrer ses articles par la poste — c’est l’acheteur qui paie les frais de livraison — ou les remettre à l’acheteur en mains propres. Sur Vinted, cette seconde option n’est possible que si le vendeur et l’acheteur habitent dans un rayon de 10 km. La localisation des utilisateurs n’est pas affichée publiquement sur Vinted, mais elle l’est de façon approximative sur Upcycli, à partir du code postal fourni lors de l’inscription.
Le cofondateur d’Upcycli, Christopher Montoya, 32 ans, affirme que la majorité des utilisateurs de sa plateforme vivent dans la région de Montréal et privilégient la remise en mains propres. Et contrairement à Vinted, qui peut mettre en relation des utilisateurs de n’importe quelle province canadienne, Upcycli fait le choix de ne pas franchir les frontières du Québec. « On ne va pas promouvoir le fait d’acheter des articles usagés qui vont parcourir ensuite des milliers de kilomètres », dit celui qui se décrit comme un entrepreneur « à impact social et environnemental ».
Les frais d’utilisation des deux plateformes sont également différents. Sur Vinted, une somme fixe de 1,10 $ est perçue sur chaque transaction, peu importe le nombre d’articles achetés, à laquelle s’ajoutent des frais équivalant à 5 % de la valeur totale du panier d’achat, avant taxes. Sur Upcycli, les frais de service et les taxes sont inclus dans le prix affiché aux acheteurs. La plateforme prélève 2 dollars sur chaque vente de 10 dollars ou moins ; 50 cents et 15 % de la valeur du panier d’achat lorsque la transaction dépasse 10 dollars.
Si vous parvenez à vendre un article sur l’une ou l’autre des applications, le paiement est acheminé directement dans votre compte de banque lorsque l’acheteur confirme la réception du colis. Vinted fait affaire avec le fournisseur de services de paiement Stripe, tandis qu’Upcycli vous demande de donner vos informations bancaires (le site est sécurisé).
Il m’aura fallu patienter quelques semaines, mais j’ai finalement réussi à trouver preneur pour un de mes trois articles. Un utilisateur de Vinted qui habite à Magog m’a offert 7 dollars pour mes souliers, et j’ai accepté. J’ai imprimé l’étiquette d’expédition fournie par l’application et envoyé le colis par l’entremise du service de livraison désigné. Il ne me reste plus qu’à attendre le paiement. Sur Upcycli, j’ai reçu une question au sujet de mon polo, mais pour le reste, aucun acheteur n’a communiqué avec moi. Difficile de savoir pourquoi : peut-être mes articles étaient-ils trop chers, ou ils n’ont tout simplement plu à personne…
Chose certaine, les acheteuses sont beaucoup plus nombreuses que les acheteurs : les femmes représentent près de 90 % des membres d’Upcycli, estime Christopher Montoya, et elles sont majoritaires sur Vinted, indique la porte-parole Katryna Szagala.
Attirer plus d’hommes fait partie des chantiers d’Upcycli, tout comme ce « score d’écoresponsabilité » sur lequel travaille l’entreprise. Une note serait ainsi attribuée à chaque article en tenant compte de plusieurs critères, comme les matériaux qui le composent ou sa provenance. Une veste en polyester recyclé fabriquée au Canada obtiendrait par exemple une meilleure note qu’un chandail de coton neuf (la culture de cette fibre exige énormément d’eau) fabriqué en Chine.
Je ne perds pas espoir de vendre mes autres pièces. Et en attendant de faire de l’argent, je peux essayer d’en économiser. Il y a notamment cette chemise habillée qui me fait de l’œil. Elle coûte 13 dollars, soit moins du quart de sa valeur en magasin. De quoi faire plaisir à mon portefeuille et à la planète.