
Alain Bellemare, le nouveau président et chef de la direction de Bombardier, se retrouve ce matin devant un gigantesque défi.
Il doit trouver des capitaux pour s’assurer que l’entreprise dispose de tout l’argent dont elle a besoin dans les prochains mois, en plus de s’assurer de l’homologation rapide de la CSeries, de son succès auprès des compagnies aériennes et de sa mise en production. Il devra aussi regarnir le carnet de commandes des secteurs aéronautique et de transport sur rail et réconforter les marchés qui ont perdu confiance dans l’entreprise.
Ce ne sera pas une mince tâche.
L’entreprise n’est pas à la veille de s’écraser au sol, mais ce que l’on voit sur le tableau de bord rend les actionnaires nerveux. Les liquidités à court terme à la disposition de l’entreprise pour maintenir son exploitation ont diminué de 1 milliard de dollars, à 3,8 milliards à la fin du dernier exercice.
L’entreprise «brûle» beaucoup d’argent, et l’on craint qu’elle n’en ait pas assez pour se rendre à destination. La destination, c’est d’amener en production la CSeries et d’en dégager des revenus rentables.
L’entreprise disait qu’il ne fallait pas s’inquiéter. L’annonce d’un plan de financement pouvant atteindre 2,1 milliards de dollars (jusqu’à 1,5 milliard en dettes et 600 millions obtenus d’une nouvelle émission d’actions), le tout accompagné d’une suspension du dividende versé aux actionnaires, montre que la préoccupation des analystes financiers était légitime.
Alain Bellemare doit maintenant convaincre les prêteurs de lui avancer des capitaux à un taux raisonnable, malgré les difficultés de Bombardier. Il n’est pas non plus facile d’écouler des nouvelles actions quand le titre est sur une pente descendante. Le titre a chuté de 15 % dans les heures qui ont suivi l’annonce des résultats, après avoir subi d’importants reculs au cours des dernières semaines.
Bombardier se réserve le droit de ne pas aller se refinancer sur les marchés si ceux-ci lui sont trop défavorables. Auquel cas l’entreprise pourrait devoir se départir de l’une ou de certaines de ses unités, ou se trouver un partenaire.
La meilleure façon d’éviter les scénarios trop dramatiques, c’est de s’assurer que la CSeries obtienne son homologation d’ici la fin de l’année, comme cela est maintenant prévu. Les tests de vol se déroulent bien et, au 10 février, 967 heures de vol avaient été accomplies pour le SC100, le plus petit des deux appareils du programme. Le vol inaugural du SC300 doit avoir lieu d’ici la fin mars.
Ces bonnes nouvelles devraient favoriser les ventes. Bombardier vise 300 ventes d’ici la mise en service de l’appareil, mais il n’y en a que 243 qui sont conclues. À titre de comparaison, Airbus a vendu 4 000 avions A320neo, qui rivalisent sur le même marché. La semaine dernière, Air Canada annonçait l’achat de 61 Boeing 737 Max, la nouvelle version remotorisée de son populaire avion — un autre concurrent de la CSeries.
La partie n’est donc pas gagnée pour Bombardier, d’autant que la mise en production de nouveaux avions constitue toujours un beau défi en soi.
Les résultats ne sont pas si désastreux pour Bombardier si l’on exclut la perte causée par la pause dans le programme d’avions d’affaires Learjet 85. Les ventes du secteur aéronautique ont augmenté de 11,9 % en 2014, à 10,5 milliards de dollars. Elles ont également augmenté de 9,7 % dans la division transport, à 9,6 milliards.
À première vue, on peut se réjouir de constater que Bombardier ait vendu 290 avions en 2014, contre 238 en 2013. Le problème est du côté du carnet de commandes, qui est passé de 388 avions à 282 appareils. Au moment même où Bombardier est engagée dans un colossal programme d’investissement, les livraisons prévues devraient être moindres.
Alain Bellemare se retrouve avec une entreprise qui a un magnifique héritage et, peut-être, un avenir merveilleux, s’il parvient à faire décoller la CSeries et à traverser le plus rapidement possible la forte zone de turbulences.
La tempête est forte, et il faudra un bon capitaine.
* * *
À propos de Pierre Duhamel
Journaliste depuis plus de 30 ans, Pierre Duhamel observe de près et commente l’actualité économique depuis 1986. Il a été rédacteur en chef et/ou éditeur de plusieurs publications, dont des magazines (Commerce, Affaires Plus, Montréal Centre-Ville) et des journaux spécialisés (Finance & Investissement, Investment Executive). Conférencier recherché, Pierre Duhamel a aussi commenté l’actualité économique sur les ondes du canal Argent, de LCN et de TVA. On peut le trouver sur Facebook et Twitter : @duhamelp.
Bel exemple des risques d’affaires que doivent gérer les entreprises innovatrices et leurs gestionnaires. L’ancien président a été forcé par les actionnaires de la compagnie à passer le volant à un autre, ces sont les règles de jeu en affaire, M. Beaudoin aura probablement fait le plus très grand bout à gérer la turbulence mais les marchés eux veulent un vrai signal d’espoir, ce changement de PDG en envoie un.
Bombardier a déjà un partenaire très solide avec Pratt & Witney dans l’aventure de la CSerie et il y a certainement de clients dans le marché capables et même désireux d’acheter autre chose que « de l’IBM de l’aéronautique », je reste confiant que les gens de Bombardier et leurs partenaires sauront tirer leur épingle du jeu avec la CSerie.
Ces nouvelles concernant Bombardier confirment que le niveau d’endettement de cette compagnie est élevé. Ce que je notais d’ailleurs voici quelques semaines sur votre blogue.
À moins d’offrir un bon plan de redressement avec des objectifs clairs et des commandes fermes, je ne suis pas certain que le titre de Bombardier soit si attractif que cela, se porter acquéreur de nouvelles actions est plutôt risqué.
Pour moi, c’est ce que j’avais écrit voici quelques semaines également, Bombardier ferait mieux de racheter ses propres actions, puisqu’elles sont basses actuellement, plutôt que de diluer encore le capital par l’émission de titres de nouvelle jouissance.
Le travail ingrat que monsieur Bellemare va devoir entreprendre dès son entrée en fonction, c’est un vaste plan de restructuration de l’entreprise. Ce qui signifie des transferts d’unités de productions, notamment vers le Mexique et peut-être ailleurs notamment en Chine. Détenir plus de 79 unités de production dans pratiquement 27 pays est à toutes fins pratiques : insoutenable à long terme.
La rentabilité ne passant pas seulement par le nombre de pièces vendues, elle passe par la rationalisation couplée à une réduction drastique des coûts de production, doublée d’une présence accrue sur les marchés susceptibles d’acheter leurs produits de transportation.
Selon-moi, l’avenir à long terme de cette compagnie pourrait être désormais compté, du moins avec sa structure actuelle. Bombardier devra conclure des partenariats, des alliances et même envisager d’être racheté pour une ou plusieurs de ses divisions. Cette entreprise devra probablement à un moment donné, choisir entre les transports sur rail ou l’aviation.
Soutenir avec le même succès deux spécialités en même temps, viser la rentabilité dans les plus brefs délais sur l’ensemble des produits, cela relève du prodige ou bien du « vœux pieux » ou de l’inconscience à tous les niveaux.
Comme monsieur Bellemare vient de l’aéronautique, la logique voudrait que ce soit le transport ferroviaire qui soit le premier à écoper. Mes avis en telle configuration que les beaux wagons du métro de Montréal ne sont pas sur le point d’être livrés. Peut-être que Alstom allié de General Electric pourrait envisager de reprendre à son seul compte le carnet de commande.
« Bombardier ferait mieux de racheter ses propres actions »
Quand même difficile à accomplir quand tu t’apprêtes à chercher du financement.
@ Simon Lussier,
Sur les 2,5 milliards dont Bombardier a besoin pour pouvoir financer ses opérations, seulement 20% de cette somme serait recherchée par l’émission de nouvelles actions, laquelle est encore conditionnelle à l’intérêt que pourrait susciter sur le marché l’introduction de ces nouveaux titres.
Compte-tenu du niveau actuellement bas de l’action, Bombardier qui forme un « holding » — ce que certainement vous savez -, aurait intérêts à réduire le nombre d’actions en circulation, car la dissolution de son actionnariat engendre pour ce titre un plus grand risque au niveau de la volatilité.
Confier au holding (donc aux actionnaires de contrôle) le soin de racheter maintenant le titre pour consolider l’actionnariat historique de la compagnie, permettrait de stabiliser la valeur du titre. Advenant un retour prochain de la rentabilité des métiers opérés, avec la confiance du public retrouvée, l’action aurait certainement de bien meilleures chances de s’apprécier.
Au terme de l’exercice, Bombardier prendrait une très bonne initiative en profitant du bas prix de la valeur de ses actions. Il disposerait à plus long terme de marges de manœuvres supplémentaires pour financer ses opérations futures.
Hélas, l’option qui se pointe plutôt à l’horizon est d’une autre nature, ce holding serait prêt à se départir de plusieurs de ses activités peu ou moins rentables, dans le domaine du transport (non aérien) ou des activités de services connexes pour soutenir le pôle aérien qui théoriquement offre les meilleures perspectives à moyen-long terme. Cela signifie dans ce cas, que l’objectif recherché est de dégager des bénéfices pas la session d’activités et non dans un premier temps par l’accroissement des commandes. C’est peut-être le constat fait par le milieu financier.
Rien n’indique cependant que Bombardier soit assez solide (en raison notamment de son endettement) pour tenir la dragée haute aux avionneurs américains, russes ou européens sans devoir conclure avec l’un ou plusieurs d’entre eux des ententes de partenariat… qui pourraient être à terme, le signe d’un rachat. D’autre part, nous savons également que les chinois nourrissent présentement les plus grandes ambitions dans le secteur aéronautique.
— C’est donc la stratégie d’affaire de Bombardier qui est encore imprécise actuellement et non ma suggestion de consolider son actionnariat qui manquait d’à-propos. Bref cela signifie simplement que les actifs détenus au nom de la compagnie, valent en théorie plus chers pris séparément que la somme des actions. Avis aux futurs actionnaires !
Il n’y a pas de comparaison à faire entre le A320 et A320neo puisque ce sont des avions de 150 à 180 passagers en plus de 17 tonnes de cargaison dont l’autonomie varie entre 3,300 et 4,000 miles nautiques ce qui en font des transatlantiques. C’est la même chose avec le 737.
La CSerie de Bombardier est essentiellement des avions de bien moindre capacité pour 90 à 135 passagers pour des services transcontinentaux (pour l’Amérique du nord ou l’Europe) avec une très basse capacité de cargaison. C’est comme comparé un camion lourd de 53 pieds de long qui traverse le continent avec un camion de 24′ pieds qui sert à de la livraison régionale et locale.
Les A320 et Boeing 737 sont d’excellents avions mais pour un marché différent. Je vois mal ces bolides sur des vols pour les destinations vacances vers le sud alors qu’il n’y aurait aucun cargo à bord mais seulement des passagers. C’est la même chose pour tous les vols intérieurs au pays, en Amérique du nord et en Europe pour leurs vols intérieurs.
Puisque le pétrole est de plus en plus dispendieux hormis la diminution qui ne durera pas très longtemps, le nombre de milliers de tonnes de cargo a diminuer sur les vols intérieurs de tous les marchés. C’est pour cette raison que Airbus et Boeing ont changé leurs modèles d’antan pour en faire des avions transatlantiques mais pour les services intérieurs, ils ne sont pas vraiment pas appropriés.
Malgré la popularité du A320neo il n’en demeure pas moins que le A320 (sous sa forme originale) continue de se vendre comme des petits pains chauds puisqu’il est beaucoup moins dispendieux, les ventes du A320 dépassent les ventes du A320neo pour la même période.
Il est tout de même stupéfiant que les A318 qui ne sont plus en fabrication après des ventes de 79 avions et le A319 qui a pourtant atteint des ventes de 1521 copies ne sont plus dans le discours de personne. Ils étaient pourtant du même calibre que la CSerie avec leurs 100 à 135 sièges. Pourquoi, parce que ces bolides étaient énergivores et auraient entaché l’image de Airbus lorsque comparées aux bolides de la CSerie. C’et la même chose, côté Boeing.
Nous verrons lorsque les prix du pétrole remonteront en flèche et que la situation économique mondiale rependra son cours vers une baisse annoncée et attendue. Ce n’est qu’une question d’une année ou deux sans plus.
Les commentaires de M Drouginsky sont assez glaçants merci. Ils rejoignent ceux d’un nombre impressionnant de prophètes de malheur qui rodent au-dessus de Bombardier comme des charognards depuis l’existence même de l’entreprise. Cela dit, je suis certain que la nouvelle direction n’aura de choix que de corriger certaines faiblesses qu’il met en lumière à juste titre. Pour l’instant, je me réjouit d’apprendre que notre fleuron a commencé à assemblé le deuxième CS100 de série à ses nouvelles installations de Mirabel. On ne parle pas ici de véhicule d’essais en vol (FTV).
Merci monsieur Terrien de me citer dans vos commentaires. Néanmoins lorsque vous parlez de « charognards », savez-vous exactement de quoi vous parlez ?
En ce qui me concerne, j’ai toujours admiré cette histoire et cette saga familiale qui commençât avec Joseph-Armand Bombardier. Mais objectivement que serait cette entreprise si elle n’avait pas profité de l’argent de multiples épargnants qui aujourd’hui se sont fait fourrer ?
Que serait cette entreprise si elle n’avait pas pleinement profité de toutes sortes d’aides publiques un peu partout dans le monde ?
Que serait cette entreprise si divers Fonds de pensions ne lui avaient pas fait aveuglément confiance ?
Que serait Bobardier sans la Caisse de dépôt de Placement du Québec qui a investi près de 300 millions de dollars dans cette affaire ?
Que serait cette entreprise, si elle n’avait pas profité des déboires d’autres entreprises pour accroitre ses positions dans le domaine des transports partout dans le monde ? Tant en Europe qu’en Amérique.
Que serait la division aéronautique de Bombardier si elle n’avait pas absorbé Canadair et en partie de Havilland Canada avec la Q Series.
Que serait le rêve de Laurent Beaudoin avec la Cseries s’il n’y avait pas eu la Q Series avant ?
Qu’y puis-je si l’action ne cesse de plonger ? Si ce titre est désormais considéré par plusieurs comme spéculatif. Qui pilotait la gestion dans cette entreprise ?
Qu’est-ce que j’y peux si cette compagnie vit au-dessus de ses moyens ? Si son niveau d’endettement fait craindre le pire pour divers analystes.
Est-ce que c’est moi qui aie choisi monsieur Bellemare pour faire le ménage ou la haute direction de Bombardier ? Et pourquoi cette urgence de faire table rase de la gestion passée ?
Qu’est-ce que cela peut me rapporter d’après-vous si Bombardier finit tôt ou tard par se faire racheter par morceaux ? — À ma connaissance rien !
Y suis-je pour quelque chose si les créanciers réclament des résultats et des garanties ? Qui peut se faire prêter 2 milliards et demi sur de seules promesses ? Bombardier sans doute pour sa bonne mine lorsque tous les autres pas.
Pourquoi est-ce que la famille Bombardier-Beaudoin n’y met pas de son propre argent ?
— Mais « très » intelligent comme vous l’êtes, vous accuserez toujours les autres d’être des charognards, d’être des prophètes de malheur et vous vous réjouirez de tout et de rien parce que c’est votre propre nature d’être méprisant envers le genre humain, plus spécifiquement des gens qui comme moi ont des patronymes de consonance étrangère. Recouvrir de vos immondices les immigrants, ça ne cause pas de tort, c’est bien évident !
Et si vous vous imaginez que Bombardier retrouvera le chemin de la rentabilité avec la seule Cseries, vous vous mettez le doigt dans l’œil jusqu’au coude. Au même titre que l’assemblage des appareils sur le seul site de Mirabel-PQ. Cela montre qu’en matière de processus industriels vous n’y connaissez rien. Et s’il reste un avenir pour Bombardier, c’est par l’Asie, le Mexique, les pays du Golfe arabo-persique et non pas par le Québec que cela se passera.
Je ne maitrise pas assez ce dossier pour émettre une opinion définitive sur l’avenir de Bombardier et de ses industries. Par contre comme investisseur les problèmes ne font aucun doute, BBD est quant à moi depuis longtemps un titre éminemment spéculatif et je m’en tiens bien loin, depuis quelques années ce ne sont pas les occasions meilleures qui ont manqué.
Pire, je pense que sans le soutien implicite des gouvernements la chute aurait été encore plus brutale, sinon fatale, autour de moi les connaissances qui achètent ou conserve du BBD se disent que de toute façon le gouvernement interviendra, ce qui par ailleurs n’est pas faux mais ça ne garantit en rien le capital des actionnaires.
Pour le financement c’est pareil, je vois difficilement comment BBD pourra obtenir les milliards dont elle a besoin sans une participation quelconque des gouvernements, ça tombe bien, au Québec l’état est toujours «willing» alors qu’au fédéral il y a une élection bientôt et le bar à salade risque d’être ouvert.
Qui sait peut-être qu’à la fin la CSeries sera un succès et tout le monde sera content, mais d’ici là on est en droit d’en douter sérieusement et en droit de déplorer qu’une si grande part du risque repose sur les épaule d’un contribuable pourtant déjà fort sollicité ailleurs.
Bombardier perd du poil.
Bombardier avait des intérêts dans le TGV Transsibérien. À cause des sanctions économiques des USA appliqués par l’UE, la Russie c’est tournée vers la Chine un contrat de 250 milliards.
De plus, les CL 215 ont une forte compétition avec Beriev Be-200 de la Russie. C’est un avion multi rôle qui filer à 700 kmh.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Beriev_Be-200