Les médecins ont le droit de s’incorporer depuis 2007, un procédé tout à fait légal qui est utilisé par 48 % des médecins du Québec afin d’économiser des milliers de dollars en impôt… et qui prive Québec et Ottawa de 150 millions de dollars par année.
Voyons comment cela fonctionne avec l’exemple fictif de Dr Stéthoscope.

En s’incorporant, Dr Stéthoscope devient actionnaire de son entreprise. Cette dernière facture à la RAMQ tous les actes médicaux posés par Dr Stéthoscope, que ce soit dans un hôpital ou dans une clinique.
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Imaginons qu’en 2015, l’entreprise du Dr Stéthoscope réclame ainsi 384 000 dollars, la rémunération brute moyenne d’un médecin spécialiste au Québec.
L’argent ne va pas dans les poches de Dr Stéthoscope, mais dans le compte bancaire de sa compagnie. C’est là que le médecin pige pour couvrir ses dépenses «d’entreprise», tels les repas d’affaires, les frais de congrès, les assurances, les frais liés à sa voiture, notamment.
Disons que ces dépenses totalisent, en 2015, 40 000 $. Il reste donc 344 000 $ à la banque.
Évidemment, Dr Stéthoscope a aussi besoin d’argent pour payer l’épicerie, l’hypothèque, ses vêtements, etc. Son entreprise lui verse donc, à titre «d’employé», un salaire tout juste suffisant pour subvenir à ses besoins et cotiser à son REER.
Dr Stéthoscope touche donc, pour 2015, un salaire de 75 000 $.
Pourquoi pas davantage? Parce qu’en se versant 75 000 $ plutôt que de 344 000 $, Dr Stéthoscope paiera 28% d’impôt moyen plutôt que 45 %.
À la fin de l’année, il reste donc 269 000 $ dans les coffres de l’entreprise*. Ces «profits» sont imposés au taux avantageux de 19 %.
En incluant ses impôts personnels et ceux de sa compagnie, Dr Stéthoscope donne un total de 71 895 $ aux deux paliers de gouvernement. S’il n’était pas incorporé, il aurait payé 172 287 $.
Après impôts, le compte en banque de la compagnie affiche 217 890$. L’argent peut s’y accumuler année après année, tant et aussi longtemps que le Dr Stéthoscope le désire, même s’il ne pratique plus la médecine. Pour y toucher, il se verse un dividende, qui sera moins imposé qu’un salaire.
Mais ce n’est pas tout. «L’incorporation permet aux médecins de fractionner leurs revenus avec leur conjoint, d’avoir un régime de retraite dans l’entreprise et de créer une fiducie familiale», indique Frédéric Assal, comptable chez Assal Conseils. Des outils qui permettent de diminuer, une fois de plus, le fardeau fiscal de notre cher Dr Stéthoscope.
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Soyons clairs: tous les avantages énumérés ci-dessus sont accessibles à n’importe quel propriétaire d’entreprise incorporée. Ils ont été consentis au fil des ans par les gouvernements pour balancer les risques inhérents à l’entrepreneuriat et stimuler — en théorie — la création d’emplois.
Or, les risques d’affaires d’un médecin sont généralement faibles. Il a des clients à volonté. Il est assuré d’être payé. Et, à moins d’être propriétaire ou copropriétaire d’une clinique privée, il est le seul employé de son entreprise. Bref, nos médecins ont le beurre et l’argent du beurre.
Ce cadeau est relativement récent. Il a été offert en 2001 par le gouvernement de Bernard Landry, qui voulait faire plaisir… aux avocats et aux comptables.
À l’époque, les cabinets du Québec étaient confrontés à la concurrence féroce de firmes incorporées provenant de l’extérieur de la province. Pour livrer bataille ici et à l’étranger, avocats et comptables réclamaient le droit d’utiliser les mêmes armes que leurs adversaires.
Québec a dit oui… à l’ensemble des professions régies par l’Office des professions! Cela inclut les comptables et les avocats, évidemment, mais aussi les chimistes, les agronomes, les ingénieurs et les 49 autres professionnels reconnus dans la province, dont les médecins.
Mais il y a un mais: un professionnel peut s’incorporer uniquement si son Ordre a adopté un règlement en ce sens.
C’est ce qu’ont fait, sans surprise, le Barreau et l’Ordre des comptables agréés. Mais pas l’Ordre des infirmières, notamment. «Une infirmière qui s’incorporerait serait dans l’illégalité», affirme la directrice des communications, Colette Ouellet.
Au Collège des médecins, le débat a duré jusqu’en 2007. «Le Collège était frileux», raconte Charles Bernard, son PDG depuis 2010. Les inquiétudes portaient essentiellement sur l’indépendance—que faire d’un médecin qui voudrait s’incorporer avec un pharmacien, par exemple?
N’empêche, «c’était un droit que réclamaient nos membres. Nous sommes allés de l’avant, mais avec des règles très strictes». Interdit, entre autres, de s’associer avec un pharmacien.
Depuis, chaque médecin est libre de s’incorporer ou non.
Des voix commencent à s’élever pour critiquer ce droit. Au cours de la course à la chefferie du Parti québécois, Bernard Drainville a dit y voir un problème «d’éthique fiscale».
Dans son dernier budget, Québec a annoncé que le taux d’imposition des PME de trois employés et moins passerait de 8 % à 11,9 % en 2017. «Cette mesure vise spécifiquement les médecins, mais affectera bien des professionnels incorporés, critique le comptable Frédéric Assal. Ça aurait été mal vu de s’attaquer à un seul groupe.»
Des mesures plus ciblées pourraient être mises sur pied. Le Collège des médecins pourrait resserrer ses règles «strictes» et interdire certains stratagèmes fiscaux, telle la fiducie familiale. Ou même retirer, purement et simplement, le droit à l’incorporation.
*Les charges sociales ont été exclues afin de simplifier le calcul.
Je ne sais pas pourquoi mais je n’ai plus beaucoup de respect pour les médecins. Aux prochaines élections, je vais probablement voter pour le parti qui va vouloir reprendre le contrôle. Parce que là, visiblement, ce sont les médecins qui l’ont…
Remarquez, ils ne sont pas les seuls. C’est vrai pour les politiciens, magistrature, etc.
Bon, je retourne à ma lecture: le rapport de la Commission sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction…
Aux prochaines élections, le parti politique qui promettra de changer le mode de facturation des médecins aura mon vote. Qui osera s’attaquer à cet énorme dossier? Ils se plaignaient que leurs salaires étaient moins élevés qu’en Ontario alors maintenant c’est surement le contraire….
75 000 $, « un salaire tout juste suffisant pour subvenir à ses besoins et cotiser à son REER. » J’admire votre sens de l’humour.
Le coût de la vie est tel que c’est probablement ce que bien des contribuables ont besoin pour vivre et contribuer à leur REER.
Je suis retraité vivant à Montréal, mais avec 2 enfants de plus de 18 ans à la maison, dont un à l’université (environ $3,500 de frais). J’ai une maison très moyenne (valeur de $300,000) et une voiture payées, et ma conjointe travaille (salaire $45,000). Ça me coûte $40,000 clair par année, et je ne voyage pas beaucoup là-dessus. Si je devais payer de l’impôt, j’aurais besoin de $55-60,000. Avec un REER à payer, ajoutez un autre $5-10,000. Si j’avais des paiements à faire sur une maison ou une voiture, ça augmenterait mon fardeau fiscal. Alors je comprends le $75,000 pour subvenir à ses besoins et cotiser à son REER.
Si vous vivez bien avec moins que ça, donnez-moi votre recette.
Monsieur Belley, votre commentaire confirme qu’on peut très bien vivre avec moins de 75 000 $ par année.
Ce qui m’a fait sourire dans le texte de monsieur Sabourin, c’est qu’il utilise l’expression « tout juste » qui signifie à peine, alors que la majorité des Québécois comble ses besoins avec beaucoup moins dont vous-même et votre famille.
Effectivement, il faudrait plutôt lire « 75 000$ est le salaire qui permet à l’employé d’atteindre le plafond de cotisation en RÉER ».
À cela il faudrait mentionner que « l’entreprise » peut aussi contribuer l’équivalent (environ 13 500$) au RÉER de « l’employé ».
Cet article n’apporte rien de nouveau au débat. Tout ce qui est écrit ici a déjà été publié dans les nombreux articles sur les médecins dans les quotidiens montréalais. Doctor bashing qui continue…
C’est un résumé de l’information qui est effectivement déjà accessible, mais il n’y a aucune insulte dans le texte, ce n’est pas du bashing.
Il est facile de faire du sensationnalisme dans vos articles et de dresser la population contre les médecins, vous êtes-vous réellement informé avant d’écrire ce torchon? Savez-vous pourquoi les infirmières ne peuvent pas s’incorporer? Entre autre parce qu’elles sont salariées. Les médecins sont des travailleurs autonomes. Il est temps que la population le comprenne. Ils n’ont pas de pause/heure de diner payée/vacance/congé de maternité/fond de pension, ETC. C’est une différence énorme! Savez-vous que plusieurs professionnels peuvent s’incorporer, dentistes, pharmaciens, ect. Mais cela non plus vous n’en parlez pas, il est beaucoup plus intéressant d’aller dans la saveur du mois et de faire du « doctor basching ». Finalement, le plus important, je doute que vous compreniez vraiment le système d’imposition. L’argent laissé dans la compagnie est imposée à 20% sur le coup, mais quand le médecin retire cette argent ensuite, il doit payer la différence d’imposition qu’il n’a pas payer au départ donc au final il paie beaucoup plus d’impôt. Je vous invite à aller consulter la loi sur l’impôt pour vous renseigner. A oui et au passage, je constate que vous avez l’air en désaccord avec la salaire des médecins. Si vous jugé qu’une personne qui fait entre 7 et 10 ans d’université, qui travaille de jour/soir/nuit parfois 7 jours de garde 24/24 de suite sans avoir droit a des pauses, qui travaille des fins de semaine sans avoir pour autant de congé dans la semaine ne mérite pas ce salaire, qui selon vous le mérite???
« En incluant ses impôts personnels et ceux de sa compagnie, Dr Stéthoscope donne un total de 71 895$ aux deux paliers de gouvernement. S’il n’était pas incorporé, il aurait payé 172 287$. »
sauf que c’est un peu malhonnête comme comparaison ; vous oubliez de charger l’impôt sur le 217 000$ qui reste dans la compagnie (c’est un report d’impôt). Si le médecin se verse le tout en dividende, il devra payer un autre 36% d’impôts soit 78 000$.
La comparaison devient donc 149 895 en étant incorporé vs 172 287 $ pour avoir tout l’argent gagné utilisable dans son compte de banque.
« *Les charges sociales ont été exclues afin de simplifier le calcul. » … et accroître l’avantage apparent de l’incorporation ?
les charges sociales du md incorporé / président de son entreprise lui coûterons environ 5-6000$ de + que s’il n’était pas incorporé.
« sauf que c’est un peu malhonnête comme comparaison ; vous oubliez de charger l’impôt sur le 217 000$ qui reste dans la compagnie (c’est un report d’impôt) »
Le bénéfice net fiscal est imposé au complet pour l’exercice, il n’y a aucun report d’impôt qui s’applique peu importe que l’entreprise le verse en dividende, le met dans sa caisse ou le dépense autrement. Uniquement les intérêts tirés de revenus de placement vont être imposés ultérieurement.
« Si le médecin se verse le tout en dividende, il devra payer un autre 36% d’impôts soit 78 000$. »
S’il le fait oui, l’avantage fiscal vient justement de ne pas faire ce versement l’année même…
Mon médecin travaille dans une clinique qu’il partage avec une dizaine d’autres médecins. Dans cette clinique, il y a plusieurs autres enployées pour la prise de rendez-vous, la gestion des dossiers, etc. Qui paie pour çes employées, le loyer et les autres frais? La RAMQ ou les médecins eux-mêmes? Lorsque l’on parle de la rémunération brute des médecins, est-ce avant ou après la déduction des frais d’opération de la clinique? La plupart des médecins travaillant en clinique sont-ils incorporés individuellement ou suffit-il d’incorporer la clinique qui paie ensuite un salaire à chacun des médecins. Je n’ai jamais rien vu à ce sujet dans les articles qui traitent de la rémunération des médecins.
En dehors de l’hôpital les médecins payent pour les bureau et employés de la cliniques, et ce montant (autour de 40 000 – 50 000$) doit être déduit du revenu brut de la RAMQ. La plupart des médecins (tous ?) sont incorporés individuellement.
La RAMQ verse un supplément aux médecins en cliniques afin de couvrir ces dépenses supplémentaires (Alain Vadeboncoeur avait produit un article sur le sujet cette année), alors pour répondre à votre : c’est la RAMQ qui paie pour ces dépenses.
Est-ce un article de nouvelles ou bien un billet de commentateur? Un journaliste se doit de dire les faits seulement sans se positionner dans le débat, or ici on voit bien de quel bord le journaliste est, avec des phrases telles que « les médecins ont le beurre et l’argent du beurre ». L’incorporation est un report d’impot consenti a ceux qui n’ont pas de fonds de pension. Pourquoi serait-ce correct pour un avocat et pas pour un médecin? Le médecin engage du personnel aussi, a des loyers a payer et des dépenses de la meme maniere que les autres professionnels. Pourquoi s’acharne-t-on sur les médecins? Je ne comprends pas le but encore de cet article, puisque l’incorporation est acceptée déja depuis 2007!
Votre article trompe, par le choix de ses mots, par celui de ses omissions et par ses sous-entendus qui laissent le lecteur dans son ignorance et voilent la vérité. Vous siégez au Conseil de presse, quelle réputation donnez-vous à la presse par votre biais apparent? Vous avez rédigé un petit spectacle qui se lit avec du pop-corn et du fiel.
Si vous aviez fouillé votre sujet au-delà de vos biais, vous auriez nuancé vos écrits. Vous auriez spécifié que l’impôt n’est pas « sauvé », mais reporté comme c’est le cas pour un REER. Dénoncez-vous aussi les REER ? Vous auriez nuancé en parlant des psychologues incorporés, des dentistes incorporés, des physiothérapeutes incorporés, des plombiers incorporés, des ostéopathes incorporés, des artistes incorporés, des coiffeuses incorporées, des audiologistes incorporées, des concierges incorporés, des infirmières incorporées, car il y en a bel et bien. Vous vous en prenez à un seul groupe professionnel, ce qui est vicieux, au lieu de questionner la pratique de l’incorporation en soi, ce qui serait déjà élever le débat sur les idées.
Vous laissez planer l’impression que les médecins fraudent le fisc, dissimulent de l’argent et se paient des pseudo-repas d’affaires et des voitures avec leur incorporation. Les médecins n’invitent pourtant pas leurs clients au restaurant, et sauf exception, ne vont pas voir leurs clients à domicile. Ces dépenses ne sont pas admissibles. Les dépenses d’entreprise sont liées aux frais de gestion des cabinets médicaux, salaires des secrétaires, des réceptionnistes et des infirmières qu’ils emploient, location de l’immeuble, électricité, téléphone, ménage, fournitures, matériel médical, cotisations professionnelles, assurances professionnelles, sécurité, informatisation, logiciels, références médicales, comptabilité et facturation, frais d’avocats, toutes des dépenses que vous évitez si bien d’énumérer, car elles rendraient vos allusions suspectes et moins intéressantes pour le lecteur en mal de cynisme.
Pour le spectacle, vous grossissez vos chiffres en évitant de choisir la rémunération moyenne des médecins et en « excluant les charges sociales pour simplifier le calcul ». C’est votre article et votre raisonnement que vous simplifiez ainsi. Quand parlez-vous de la valeur d’un fonds de pension, des vacances payées, des congés de maladie payés et des assurances payées pour un employé salarié qui prend sa retraite à 55-60 ans, avantages que les médecins et autres travailleurs non salariés n’ont pas, et qu’ils peuvent tenter de constituer par le véhicule corporatif.
Vous omettez, et cela sert le ressentiment antimédecin qui transpire de votre article, de mentionner que le dividende est versé après impôt payé une première fois dans la corporation. L’impôt personnel sur le dividende est moindre pour cette raison, car le dividende a déjà été imposé une première fois. Tout comptable vous dira que cette double imposition n’est pas vraiment plus avantageuse qu’un salaire, contrairement à ce que vous laissez entendre.
Votre affirmation sur le risque est surprenante. Est-ce qu’une entreprise bien établie, qui est peu à risque de perdre ses clients, devrait ne plus avoir le droit d’être incorporée? Le dentiste, le pharmacien, le psychologue et le croque-mort sont-ils plus à risque de manquer de clients que le médecin? L’incorporation n’est pas liée au risque, elle est une décision d’affaire, le libre choix de l’entrepreneur de constituer son entreprise. Elle n’est pas, contrairement à vos propos trompeurs, une manière d’esquiver l’impôt comme l’est par exemple un paradis fiscal ou la falsification de sa déclaration d’impôts. L’entreprise médicale ne diffère en rien des autres entreprises, même si la naissance, la maladie et la mort de ses clients lui garantiront toujours des revenus (et non l’État). Car la pratique de la médecine présente aussi un risque, et ce risque est lié à la réputation du médecin auprès de ses clients et au maintien de son excellence. Cette dernière obligation est visiblement optionnelle chez les journalistes.
Peut-être ne savez-vous pas que l’État pousse ses médecins de famille et spécialistes en dehors des hôpitaux, pour leur transférer les frais de gestion énumérés ci-haut? Demandez aux médecins du CHUM et du CUSM. L’incorporation est de plus en plus nécessaire pour les médecins du Québec, qui ont à assumer ces dépenses sans pouvoir facturer leurs clients directement, au contraire des « avocats et comptables » et de tous les autres professionnels incorporés du Québec.
Merci de publier ce commentaire.
Votre commentaire trompe, par le choix de ses mots, par celui de ses omissions et par ses sous-entendus qui laissent le lecteur dans son ignorance et voilent la vérité.
« Si vous aviez fouillé votre sujet au-delà de vos biais, vous auriez nuancé vos écrits. Vous auriez spécifié que l’impôt n’est pas « sauvé », mais reporté comme c’est le cas pour un REER. »
Il n’est pas uniquement reporté. Il y a bel et bien une économie d’impôt avec le versement de dividendes plutôt que de salaires. Il y aussi des économies importantes avec le fractionnement et la fiducie. Ce ne sont pas des reports, une fois les montants versés il y a bel et bien un total en impôts payés largement inférieur.
« Vous vous en prenez à un seul groupe professionnel, ce qui est vicieux, au lieu de questionner la pratique de l’incorporation en soi, ce qui serait déjà élever le débat sur les idées. »
Je vous invite à relire l’article avant d’accuser l’auteur de ne viser qu’un seul groupe professionnel, en l’occurrence le passage suivant met clairement en évidence la situation pour l’ensemble des ordres professionnels : « Québec a dit oui… à l’ensemble des professions régies par l’Office des professions! Cela inclut les comptables et les avocats, évidemment, mais aussi les chimistes, les agronomes, les ingénieurs et les 49 autres professionnels reconnus dans la province, dont les médecins. »
Vous dites également que « Vous laissez planer l’impression que les médecins fraudent le fisc, dissimulent de l’argent et se paient des pseudo-repas d’affaires et des voitures avec leur incorporation. »
Si vous trouvez que l’auteur laisse planer cette impression, alors c’est ce que vous avez manqué un élément important de la toute première phrase de l’article : « un procédé tout à fait légal ».
Vous faites références aux dépenses courantes d’entreprises, hors il est très avantageux d’enregistrer la voiture utilisée à des fins personnelles au nom de l’entreprise, ceci représente une charge admissible pour l’entreprise quitte à être un avantage imposable à « l’employé ». Ça reste très très avantageux quand même.
Je trouve ça intéressant que vous mentionnez justement les assurances professionnelles dans la liste des dépenses admissibles alors que c’était justement un des 4 éléments cités par l’auteur. Et je note au passage que vous avez fait omission des frais de congrès ainsi que les frais de représentation (les repas mentionnés par l’auteur) qui sont expressément admis.
« Pour le spectacle, vous grossissez vos chiffres en évitant de choisir la rémunération moyenne des médecins »
Vous semblez, une fois de plus, avoir fait abstraction d’un élément important de l’article : « Dr Stéthoscope réclame ainsi 384 000 dollars, la rémunération brute ***moyenne*** d’un médecin spécialiste au Québec. »
« Quand parlez-vous de la valeur d’un fonds de pension, des vacances payées, des congés de maladie payés et des assurances payées pour un employé salarié qui prend sa retraite à 55-60 ans, avantages que les médecins et autres travailleurs non salariés n’ont pas, et qu’ils peuvent tenter de constituer par le véhicule corporatif. »
Depuis quand est-il nécessaire pour un médecine de s’incorporer pour obtenir ce genre d’avantages? Les associés d’une société (par exemple les médecins qui travaillent dans leur propre cabinet) peuvent tout à fait établir un régime de pension, des assurances collectives et autres avantages et profiter du même traitement fiscal qu’une autre entreprise incorporée. Idem pour le médecin qui est travailleur autonome.
« L’impôt personnel sur le dividende est moindre pour cette raison, car le dividende a déjà été imposé une première fois. Tout comptable vous dira que cette double imposition n’est pas vraiment plus avantageuse qu’un salaire, contrairement à ce que vous laissez entendre. »
En ce qui me concerne, c’est de la rhétorique comptable que d’affirmer qu’il y a double imposition et cet argument est utilisé invariablement par ces contribuables qui ne désirent qu’une seule chose de tout gouvernement : qu’ils baissent les impôts. Mais je ne ferai pas qu’utiliser de rhétorique, je vais vous expliquer pourquoi cet argument ne tient pas la route.
Tout d’abord la double imposition prend comme prémisse que le bénéfice net après impôt devrait être utilisé comme dividence, ce qui n’est évidemment pas le cas de la totalité de bénéfice net après impôt : il peut très bien être utilisé en investissement ou être laissé dans la caisse. La corporation reçoit le statut légal de personne en vertu des lois et comme toute personne, elle doit payer un impôt. Le gouvernement a eu la générosité de réduire cet impôt pour diverses raisons, mais les montants que la corporation verse à d’autres individus n’est pas plus doublement imposé que le salaire versé aux employés : la seule différence étant que toutes les personnes en cause ne paient pas un montant identique en impôt.
Finalement, vous faites la prémisse que la totalité des bénéfices après impôt et intérêts sont versés en dividendes, alors que l’avantage fiscal de s’incorporer – tel qu’expliqué dans l’article – provient justement de la possibilité de différer le versement du montant à un moment plus opportun point de vue fiscal (et de profiter de revenus de placements avec un capital moins imposé entre-temps). Alors qu’il n’est pas possible de différer un revenu d’entreprise ou un salaire.
« Peut-être ne savez-vous pas que l’État pousse ses médecins de famille et spécialistes en dehors des hôpitaux, pour leur transférer les frais de gestion énumérés ci-haut? Demandez aux médecins du CHUM et du CUSM. L’incorporation est de plus en plus nécessaire pour les médecins du Québec, qui ont à assumer ces dépenses sans pouvoir facturer leurs clients directement, au contraire des « avocats et comptables » et de tous les autres professionnels incorporés du Québec. »
Et dans votre argument vous prenez soin, du moins si on applique votre propre raisonnement, d’omettre de mentionner que la RAMQ compense davantage les opérations médicales effectuées hors-hôpitaux pour compenser ces dépenses supplémentaires.
Je conseille à tous les intéressés de lire les commentaires de Johanie et Vincent Demers. Vous aurez enfin l’heure juste dans ce débat inutile.
Voire ma réponse à Vincent : vous n’aurez pas du tout l’heure juste en lisant son commentaire, vous aurez par contre une perspective différente, celle des individus qui cherchent à justifier par tous les moyens de payer moins d’impôts.
Moi je conseille de lire les commentaires de Simon-Pierre Lussier.
L’article aurait pu être mieux fait mais il expose une situation problématique: la rémunération des médecins. Les deux personnes que vous avez mentionnées soulèvent des lacunes ou des omissions mais on peut repasser sur leurs commentaires afin d’apporter quelques éléments qui vont aller dans le sens de l’article. Par exemple, le fait qu’il est normal que les médecins puissent s’incorporer puisque ce sont des travailleurs autonomes. Par contre, ceux-ci ne sont pas réellement régis par les lois du marché, comme tout travailleur autonome, puisque l’Ordre des médecins contribue à cette situation.
Et vous pensez que les gens fond du médecins-bashing inutilement? Je n’ai jamais rencontré quelqu’un qui remettait le salaire élevé des médecins en doute. Par contre, là, ça dépasse les bornes. Pendant qu’on dit à la plèbe de se serrer la ceinture, le gratin (dont fait partie les médecins) voit ses conditions nettement s’améliorer. Vous pensiez que les gens allaient être contents?