À quelques jours du scrutin, le Parti libéral est donné gagnant par la majorité des maisons de sondage*. Si l’avance des libéraux était confirmée lundi, on peut s’attendre à des changements importants en matière de finances publiques et de fiscalité et à une légère inflexion de la politique économique du gouvernement central.
Disons d’emblée que personne ne s’attend à des changements révolutionnaires au Canada et on n’observe aucune inquiétude ou nervosité particulière sur les marchés même si les libéraux sont en avance dans les sondages. Après tout, les libéraux ont dirigé le Canada pendant plus de la moitié de son existence et les deux derniers premiers ministres de ce parti ont remis les finances publiques en parfait état.
Des analystes du courtier japonais Nomura croient même que les marchés boursiers seront plus performants sous un gouvernement libéral minoritaire.
Les marchés obtiendraient d’ailleurs de meilleurs rendements sous les libéraux que sous les conservateurs. Sous les gouvernements de Louis Saint-Laurent (1948-1957), de Pierre Trudeau et de Jean Chrétien, le rendement annuel composé de l’indice de la bourse de Toronto a été de 6,8 %. Sous Diefenbaker (1957-1963), Brian Mulroney et Stephen Harper, la hausse n’aura été que de 2,2 %.
On observe d’ailleurs le même phénomène aux États-Unis, alors que la bourse tend à faire meilleure figure sous les présidents démocrates que républicains.
Il y a sans doute une part de hasard dans ces données, mais elles montrent surtout que les gouvernements ont peu de contrôle sur les tendances macro-économiques mondiales. Justin Trudeau aura l’air d’un génie si l’économie performe bien et d’un cancre si le pays subit une récession, mais il n’y sera pour rien (ou pour si peu) dans les deux éventualités.
Voilà pourquoi je pense que cette élection se joue plutôt sur d’autres enjeux comme les valeurs, la politique extérieure, l’environnement, la culture, la science ou l’éthique. Ou, tout simplement, un profond désir de changement après dix ans de Stephen Harper. L’économie n’est qu’un facteur parmi d’autres, même si son impact se fait sentir dans toutes les facettes de la vie.
Ceci dit, il y a dans le «plan» libéral, deux éléments qui marquent une nette rupture avec les conservateurs.
D’abord, Justin Trudeau a promis trois déficits budgétaires de 10 milliards de dollars alors que les conservateurs se font une gloire d’avoir rétabli l’équilibre dans les finances publiques.
Ce n’est pas tant l’ampleur du déficit, l’équivalent de 3 % du budget, ou son poids dans une économie de 1 655 milliards de dollars qui me dérangent. À court terme, il serait même surprenant que la cote de crédit du pays soit affectée si les choses en restent là.
Je n’aime quand même pas qu’on banalise l’endettement public après six années de déficits. Je crains qu’un gouvernement Trudeau ne soit laxiste en matière de dépenses publiques puisqu’il a intégré l’idée que les déficits ne sont pas graves et qu’ils s’avèrent la meilleure solution pour relancer l’économie. Ce qui se passe dans d’autres pays comme le Japon, la France ou l’Italie me font douter du pouvoir magique des dépenses publiques sur le développement économique.
La deuxième différence de taille avec les conservateurs, c’est que la campagne libérale s’est articulée autour de la défense de la classe moyenne et la réduction des inégalités grâce à la fiscalité.
Le taux d’imposition pour les revenus supérieurs à 200 000 dollars serait haussé de 29 % à 33 %. Les sommes ainsi récoltées permettraient de financer une baisse des impôts payés pour les revenus entre 44 701 dollars à 89 401 dollars. Le taux d’imposition serait ramené dans cette catégorie de revenus de 22 % à 20,5 %.
Les libéraux comptent aussi remplacer la prestation universelle pour la garde d’enfants, éliminer le fractionnement du revenu pour les familles avec enfant et la hausse du compte d’épargne libre d’impôt (CELI), des mesures du gouvernement conservateur qui favoriseraient les mieux nantis.
Les conservateurs disent que les libéraux veulent alourdir le fardeau fiscal des Canadiens. Ils n’ont pas tort. Les libéraux rétorquent que les familles de la classe moyenne verront leur fardeau fiscal diminuer et ils ont raison.
Même si je n’aime pas les hausses de taxes, je peux convenir que la croissance du pouvoir d’achat de la classe moyenne devrait avoir un effet stimulant sur l’économie.
Hélas, cela ne se passe pas nécessairement comme cela dans la vraie vie. Une conjoncture plus mauvaise que prévu, des recettes fiscales plus faibles du côté des riches et des dépenses plus élevées une fois tous les engagements électoraux réalisés, pourrait signifier un déficit encore plus élevé et des impôts plus lourds pour tous.
Le plan de Justin Trudeau est séduisant, mais il n’est pas prudent.
* L’issue du scrutin est toutefois loin d’être assurée en raison de doutes sur la fiabilité des sondages, du faible écart entre les partis compte tenu de la marge d’erreur et de plusieurs luttes à trois ou à quatre dans les circonscriptions qui rendent les prévisions particulièrement difficiles.
Le vaste programme libéral des infrastructures , à qui profitera-t-il? Aux firmes d’ingénieurs, et de constructions.., s’endetter pour engraisser les amis du régime, une vieille recette libérale, avec cette fois, un jeune chef …
Le plan de Justin Trudeau est séduisant, mais il n’est pas prudent»
Certain que s`est pas prudent. Il va dépenser pour sa gloire personelle alors qu`on est même pas en récession. Dans une vrai récession, les revenus des gouvernement chutent drastiquement, c`est pour ça que tous les gouvernements tombent en lourd déficit. Quand la vrai récession va frapper, on va déjà être dans le trou à cause de Trudeau.
Si les dettes seraient si bonne pour l`économie, l`économie mondiale devrait connaître une période phénoménale de croissance économique. Car les gouvernements du monde entier ont jamais été aussi endetté. Mais c`est pas le cas. La croissance mondiale en arrache. Même aux USA qui se sont endettés de trillards supplémentaire depuis 2008, la croissance est pas trop forte et le taux d`emploi a jamais été aussi bas depuis 38 ans.
«L’endettement mondial a enflé de 57.000 milliards de dollars depuis 2007. Une dérive de plus en plus incontrôlable s’agissant de la dette souveraine de certains grands pays développés, comme la France, l’Italie ou l’Espagne.»
http://www.lefigaro.fr/conjoncture/2015/02/05/20002-20150205ARTFIG00011-le-monde-est-toujours-plus-accro-a-la-dette-surtout-les-etats.php
Le taux d`emploi aux USA :
http://data.bls.gov/timeseries/LNS11300000
En place de faire des nouveaux déficits, le gouvernement fédéral avec ses surplus devrait réduire la dette du Canada qui s`est amplifié de plus que d`une centaine de milliards pour contrer la dernière crise économique. Car une autre crise économique va venir d`en pas grand temps.
« Ce qui se passe dans d’autres pays comme le Japon, la France ou l’Italie me font douter du pouvoir magique des dépenses publiques sur le développement économique. »
Tout est question de la façon dont cet argent est dépensé. Si on dépense par exemple dans des infrastructures (routes, ponts, viaducs, canalisations), ce seront des investissements qui (si les structures sont bien construites) permettront de stimuler l’économie bien après que les travaux soient effectués. Ou encore ils permettront d’éviter les dépenses onéreuses liées aux réparations d’urgence et autres coûts économiques liés aux bris.
La recherche est une autre forme d’investissement qui rapporte beaucoup, tout comme l’éducation et si l’on en croît Duceppe, il semblerait que les investissements en culture (si les produits peuvent être exportés j’imagine) ont un très bon retour sur investissement.
Il faudrait donc regarder comment les dépenses des pays mentionnés sont utilisés. Probablement l’exemple le plus impertinent serait celui du Japon qui utilise environ la moitié de ses recettes fiscales pour le service de la dette. Personne ne croît que ce genre de dépense serve à stimuler l’économie.
Y`a pas assez déjà de travaux d`infrastructures à Montréal ? On est pris dans les bouchons de circulation steady. Détour par dessus détour. Perte de temps immense. Tellement que les compagnies de transport surcharge leurs clients pour perte de temps dans le traffic.
Le plan Trudeau pour moi, c`est un plan à la va-vite pour remplir les coffres du parti comme les libéraux savent si bien le faire. Collusion/corruption annoncé.
Et il faut savoir que les compagnies de construction surcharge lorsqu`ils ont trop d`ouvrage. Car elles devront payer de l`overtime. Et l`overtime, ça coûte très cher dans le secteur de la construction. Exemple, un chauffeur de pelle mécanique à temps double, ça gagne proche 70$ de l`heure. Après ça, la population va se plaindre que ça coûte cher et qu`ils sont pris dans le traffic encore plus…
Trudeau a fait croire à son public-cible qu’il avait inventé les dépenses en infrastructures, mais Harper (et Charest) ont déjà mis des dizaines de milliards là-dedans.
En principe un « bon gouvernement » se devrait d’être rigoureux en matière de finances publiques en tout temps. C’est pour cette raison que plusieurs économistes établissent une distinction entre ce qui relève du déficit structurel, des déficits primaires et de ce qui relève des déficits d’investissements. Idéalement, un gouvernement bien géré devrait produire des excédents primaires années après années.
Bien sûr, la notion de déficit structurel doit être prise avec délicatesse. Si par exemple les dépenses en santé augmentent légèrement plus vites que les recettes de l’État. La question est de savoir si cette augmentation est due à une gestion déficiente du système de santé ou si ces dépenses additionnelles supportent une meilleure qualité de soins.
Dans un premier cas, c’est un manque de rigueur dans la gestion de ce poste de l’État, dans le second cas, c’est un investissement profitable en santé qui devrait permettre aux canadiens de vivre plus longtemps en bonne santé. On peut donc regarder dans ce cas, la productivité améliorée du système de santé.
Ce simple exemple était destiné à montrer que ce qui est important, peu importe le gouvernement, ce sont les choix. Les conséquences d’un mauvais choix ou d’un choix discutable peuvent être désastreuses à un moment, lorsqu’un choix bien pesé et bien pensé pourra apporter du bien pour tous.
Aussi le déficit public est un outil parmi d’autres qui est offert à tous chefs d’État. Ce n’est pas le seul. Ce sont les grandes orientations politiques et économiques qui permettront de vérifier si le cadre financier des partis se tient, s’il est suffisamment rigoureux ou alors bien pas.
Pratiquement, aucun déficit n’a réellement d’intérêt, s’il n’est pas accompagné en même temps d’une masse supplémentaire critique en matière d’investissements. Les gros déficits post-crise de 2008, n’ont pas apporté de suppléments d’investissements privés. C’est plutôt le contraire qui s’est produit. Les entreprises qui disposaient d’excédents de trésoreries ont préféré investir leurs fonds dans des produits financiers considérés comme plus performants.
Un des défis du Premier ministre, sera de rendre le Canada plus attractif pour que la finance décide d’y accroitre l’investissement.
Selon moi, on ne peut concevoir un meilleur Canada sans investissements massifs en éducation. Sans développer les pôles de recherche et de développement, sans pousser les start-ups, sans créer une structure performante pour accueillir ces entreprises naissantes et cela, sans allouer une part plus importante au capital risque.
De telles dispositions prendront du temps pour se mettre en place. Car il ne suffit pas seulement d’aller voter. Puis par la suite, de baisser ou d’augmenter ici et là des impôts et des taxes. C’est tout le paradigme culturel du Canada qu’il faudrait pour bien faire changer.
Quel que soit le parti qui prendra le pouvoir lundi prochain. Il faudra bien se rendre compte et admettre que maintenant, cette longue récréation a assez durée.
Que j’aime vos analyses éclairantes, monsieur Drouginsky. Merci à vous.
Vous me donnez presque envie de voter libéral!!!!!!!!
Je vais voter Bloc of course, mais ca va faire du bien d’avoir enfin un gouvernement qui ne pense pas qu’aux riches
Quant à votre énoncé sur les Conservateurs qui ont rétabli l’équilibre financier,faut-il rappeler qu’ils l’ont fait après avoir accumuler 150 milliards de déficit. Pis là, ils capotent parce que Trudeau s’enligne sur 30 milliards de déficit en 3 ans. Quelle belle bande d’hypocrites.
La différence, c`est que les conservateurs ont dû faire face à la pire crise économique depuis les années 30. Et les libéraux et le NPD voulaient encore plus de déficit pour contrer la crise. Ils ont même menacés de défaire les conservateurs qui étaient minoritaires à l`époque. Mais les conservateurs ont ce qu`ils avaient à faire. Éliminer le déficit avant la prochaine crise économique mondiale. Trudeau veut nous remettre en déficit avant la prochaine crise.
Taxer les riches ? Trudeau viendra jamais à bout de financer sa baisse d`impôt de la classe moyenne avec ça. Jamais.
D`ailleurs, si ça serait si payant une taxe sur les riches, la France l`aurait pas annuler :
http://affaires.lapresse.ca/economie/international/201501/03/01-4832221-la-france-enterre-sa-taxe-sur-les-super-riches.php
Regardez bien Trudeau allez( just watch me), il va remonter la TPS à 7 % , augmenter la taxe sur l`essence ou des tarifs fédéraux pour se reprendre. Garanti.
D`ailleurs, les libéraux de Trudeau, Dion en tête, vont sûrement être les premier arriver à Paris. Conférence dont le but avoué est de taxer les pays supposément riches à hauteur de 100 milliards par année à envoyer dans les pays supposément pauvres.
«Taxer les riches ? Trudeau viendra jamais à bout de financer sa baisse d`impôt de la classe moyenne avec ça. Jamais.»
Evidemment, voter Trudeau c’est voter pour des hausses d’impôt à plus ou moins brève échéance. Et ça pense pouvoir compétitionner avec les USA…
N’oubliez pas taxation-carbone ou verte.
Voter pour des pompom girls qui demeurent sur les lignes de côté… M’enfin…
Pourquoi voter pour un fantôme ? Fantôme de son père ou fantôme de la Commission Gomery ? Déjà oublié le « libérez-nous des libéraux » ! Bref… l’Orange est pas mal, c’est plein de soleil et vitamines avec carences en produits conservateurs et autres corruptibles… Qu’on se le dise !
Justin va mettre le Canada dans le trou comme l’avait fait son papa. Ensuite viendra le retour de balancier, mais cette fois ça pourrait bien être une grosse boule de démolition.
Très fâché de la perte du CELI. C’est un affront que je n’oublierai pas.
Les déficits fédéraux peuvent êtres financés par la création monétaire, le fédéral ayant sa souveraineté monétaire. La question est davantage de savoir combien de $CAN peuvent êtres créés avant que l’inflation ait un effet néfaste sur l’économie réelle.
Je vous propose de prendre connaissance du MMT (modern monetary theory), qui s’intéresse à cette question (l’effet du « deficit spending » sur l’inflation). En gros, en période de récession, les ressources réelles (physiques) de l’économie sont sous-utilisés (un chomeur est l’exemple par excellence d’une ressource non utilisée), cela fait en sorte que que l’accroissement de la demande due à un déficit gouvernemental ne devrait pas être inflationiste, si (et seulement si) la demande deumeure en deça de l’offre. En temps de récession c’est précisément ce qui se produit : l’économie tourne au ralentie faute de demande, la capacité de production (offre) est plus grande que la demande, qui est anémique faute de pouvoir d’achat agrégé (aggregate demand) de la population. Le « deficit spending » peut donc faire accroitre la demande, et tant que la demande aggrégé ne dépasse pas la pleine capacité de production, il ne devrait pas avoir d’inflation.
Pour une intro au MMT : google « angry bird approach to understanding deficits »
Si on veut résumer ça en une phrase : la capacité de dépense d’un gouvernement ayant la souveraineté monétaire est contrainte par l’inflation, et non ses revenus fiscaux.
Je prédis une taxe de vente à 20% d’ici 2 ans.