Les chefs (3): la recette de Jérôme Ferrer

Comment réussir en restauration quand la concurrence est si forte et les marges, si réduites ? Jérôme Ferrer, établi au Québec depuis la fin de 2001, est en train de bâtir un petit empire. 

Photo: Tourisme Montréal (via Youtube)
Photo: Tourisme Montréal (via Youtube)

C’est un surdoué de la cuisine et de la gestion. Avec ses partenaires Ludovic Delonca et Patrice De Felice, Jérôme Ferrer possède quatre restaurants et boutiques gourmandes à Montréal, un service de traiteur, un centre de développement agro-alimentaire nommé l’Atelier et des participations dans quatre restaurants au Brésil. Le comédien et animateur Francis Reddy s’est récemment joint à eux au Café Grévin, à l’intérieur du musée de cire du même nom, au Centre Eaton, à Montréal.

Comment réussir en restauration quand la concurrence est si forte et les marges, si réduites ? Jérôme Ferrer, établi au Québec depuis la fin de 2001, est en train de bâtir un petit empire. Le Grand Chef Relais et Château – une association qui regroupe certaines des plus grandes signatures de la gastronomie mondiale – partage avec nous les ingrédients de son succès.

1. « Je suis très présent dans mes entreprises et je les suis de très près. Je travaille de 17 à 18 heures par jour, au minimum cinq jours par semaine, sinon six ou sept. Je passe huit heures par jour en cuisine et je consacre huit heures à gérer mes établissements. Ça ne peut pas fonctionner sans cet effort.»

2. «Il faut s’entourer d’une équipe exceptionnelle. On ne peut pas réussir sans ce savoir-faire. Je dois être pour tous une source d’inspiration et un moteur d’énergie.»

3. «Un restaurant est un lieu de commerce et d’affaires. Il doit être géré comme une PME; ainsi, j’ai une équipe de comptabilité. Nous produisons 12 bilans financiers par année, un à chaque mois et un autre à la fin de l’exercice. Je n’attends pas six mois pour corriger une situation.»

4. «Dans chaque restaurant, il y a une âme. Sans chaleur humaine, ça ne fonctionne pas.»

5. «Je sors de ma cuisine et je parle avec mes clients. Cuisiner pour les autres est un acte d’amour et de générosité.»

6. «La marge bénéficiaire est trop faible dans un restaurant gastronomique. Elle n’est que de 2,6 % à 3,4 % chez Europea, où j’ai 31 cuisiniers et 11 pâtissiers, dont un « meilleur ouvrier de France » (la plus haute distinction). Je ne peux pas continuer de créer avec un si faible rendement.»

7. «Une maison de haute couture vit du prêt-à-porter. Moi, je vis du prêt-à-manger. Nous sommes donc allés chercher d’autres clientèles avec la brasserie Beaver Hall, le restaurant méditerranéen Andiamo, le café Birks ou le resto-boutique. Je ne veux pas me cannibaliser, alors je décline ma marque dans d’autres segments du marché; j’offre un passeport.»

8. «Mon prochain projet : un centre de développement agro-alimentaire. Je veux avoir une gamme de produits à mon nom, cuisinés dans une usine de nouvelle génération entièrement sous notre contrôle. Nous aurons une douzaine de laboratoires pour mettre au point des glaces, des plats sous vide ou des mets épicés. C’est un projet de 5 millions de dollars.»




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Le modèle proposé par Jérôme Ferrer s’apparente en effet à celui de la haute couture. On fait de l’argent grâce au « prêt-à-manger », la déclinaison du style sur une gamme de produits incluant des dérivés en allant chercher la clientèle là où elle se trouve, par d’autres établissements qui ajustent l’offre en fonction de leurs bourses.

— Les banquiers d’ailleurs font la même chose….

D’autres précurseurs se sont engagés sur cette voie, pratiquement la moins fréquentée : Gaston Lenôtre qui était initialement pâtissier de son état. Paul Bocuse considéré comme le cuisiner du siècle qui exploite plusieurs brasseries à Lyon, un restaurant à Orlando, un autre à Tokyo, deux écoles de cuisines, sans compter des produits dérivés dont certains qu’on peut trouver dans les rayons gourmands de plusieurs supermarchés. Il n’en reste pas moins que c’est sa vieille auberge de Collonges au Mont d’Or (région de Lyon) qui demeure le « haut lieu » de la bonne bouffe.

On ne saurait évidemment ne pas mentionner Ferran Adria maître de la cuisine catalane qui quant à lui put se permettre la luxe de fermer son restaurant El Bulli à Roses (nord-est de Barcelone) après 50 ans d’existence. Et cela sans encombre. Adria a par sa seule présence élevé la cuisine catalane qui était déjà réputée pour ses tapas au sommet de la gastronomie mondiale.

Ce que j’entends par ces propos, c’est que les chefs cuisiniers parviennent à un état et un niveau de reconnaissance qui est tel que ce qui vaut de l’argent, ce n’est pas tant l’excellence de leur cuisine ou de leur restaurant, c’est leur notoriété et leur nom qui valent de l’or. C’est peut-être ce qui est en train de se produire pour Jérôme Ferrer (du moins c’est ce qu’on lui souhaite), si ce n’est que pour compléter le dispositif, il faudrait hisser Montréal au même niveau que les meilleurs places de la gastronomie planétaire.

Montréal ville d’art, ville de design, ville gastronomique où il fait bon vivre. Pourquoi pas ! N’est-ce pas un bon programme ? Il n’en demeure pas moins que nous sommes encore à quelques distances près de la coupe aux lèvres lorsque les plus beaux rêves peuvent prendre ; pour s’achever ensuite presque aussi vite qu’un maigre feu de broussaille.

« Montréal ville d’art, ville de design, ville gastronomique où il fait bon vivre. » (sic)

Trève de pelletage de nuages voulez-vous?

Ça prend beaucoup plus que ça pour que batte le cœur d’une grande ville comme Montréal et en tout premier lieu, ça prend des REVENUS générés par le privé. Ici, au Québec ce que l’on considère comme de l’art ou du design (et tout ce tralala…) sont subventionnés À PRESQUE 100% et le domaine de la restauration est beaucoup trop fragile et dépendant des industries primaires pour apporter à lui seul cet argent.

Certaines grandes villes mondiales peuvent compter sur la finance, la joaillerie, les bourses, le commerce international et autres pour subventionner les rêveurs illuminés.

Montréal se doit d’abord d’attirer des investisseurs privés et d’exploiter les domaines dans lesquels elle a des avantages économiques concurrentiels et ensuite d’utiliser ces avantages pour générer des revenus que le privé pourra investir dans les domaines éthérés.

Réponse à François 1 :

— Ait sic (il dit ainsi) : « (…) ensuite d’utiliser ces avantages pour générer des revenus que le privé pourra investir dans les domaines éthérés »

J’ai cherché sur le web une définition qui satisfasse aux termes de « domaines éthérés », hélas je n’en ai pas trouvée. Vous voulez je suppose parler de domaines et d’activités que vous considérez comme légers. À moins bien sûr que votre intention ait été de toucher à tous les domaines du sublime ou du sublimé… (espaces sublimes et domaines éthérés).

Montréal avec Berlin, Buenos Aires, Graz, Nagoya et Kobe bénéficie de l’appellation de « Ville Unesco du Design », le design, l’architecture, l’aménagement paysagé ; la conception, la fabrication de toutes sortes de mobiliers et d’objets contribuent à la qualité de vie et au bien-être des habitants, c’est une source de fierté pour tout le monde, ce sont aussi des sources potentielles de profits et de savoir-faire qui en la matière sont négociables et exportables soit sous forme de produits ou encore de services.

Aussi je ne vois pas en quoi mes propositions relèveraient de la promotion de l’accessoire ou de l’éthéré. Qui plus est, les investisseurs dans toutes sortes de domaines, s’intéressent aux ressources qui sont mises à leur disposition lorsque nombre d’affaires se concluent autour d’une bonne table dans un restaurant. L’Europea de Jérôme Ferrer notamment.

Vous nous soumettez une vision décidément bien théorique pour ne pas dire frivole en ce qui relève du domaine de l’investissement.

Évidemment François 1 trouve encore à redire sur un succès qui n’est pas issu de sa façon simpliste de voir la réalité d’une société moderne. Le néo-libéralisme économique où la dérèglementaion a tenu le haut du pavé trop longtemps a montré inéluctablement et cruellement ses limites, voire même ses limites à faire progresser les sociétés où il a sévi. Demandez à ces américains qui ont perdu, par la faute Wall Street leurs maisons, leurs emplois et leurs services de santé.

Les investisseurs vont venir à Montréal si les infrastructures sont valables, où la main d’oeuvre formée est disponible et où les soins de santé sont disponibles et abordables. Où sont les investisseurs dans la ville de Détroit ? Pourtant à quelques kilomètres au nord les villes ne sont pas en faillite comme le sont plusieurs villes des USA.