Faisons payer les cracheurs de carbone

Nous avons le choix entre mal ou pire : ou bien nous payons maintenant pour arrêter le réchauffement du climat, ou bien nous refusons de payer, la planète va cuire, et nos enfants devront payer encore plus cher.

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L’année 2016 a été la plus chaude sur la planète depuis le début des relevés, en 1880. Le graphique ci-contre montre que la température moyenne de la terre est passée de 13,9 °C dans la décennie 1970 à 14,6 °C dans la présente décennie. Elle a augmenté de 0,7 °C en 40 ans. Si on n’y met pas fin rapidement, ce réchauffement progressif aura des répercussions dramatiques et irréversibles.

La cause presque certaine du réchauffement est l’augmentation rapide, dans l’atmosphère terrestre, des gaz à effet de serre (GES) résultant de l’activité humaine. Le plus important est le dioxyde de carbone ou gaz carbonique (CO2). Il provient surtout de la combustion des hydrocarbures. Devant l’urgence, en décembre 2015, les 195 pays participant à la conférence de Paris sur le climat ont convenu de limiter le réchauffement climatique à moins de 2 °C.

Signataire de l’accord de Paris, le Canada s’est engagé à réduire de 29 % ses émissions de GES de 2014 à 2030. Le Québec, lui, abaisserait les siennes de 33 %. C’est fort ambitieux. Il est absolument clair que ces objectifs seront impossibles à atteindre si on n’inclut pas, parmi les mesures adoptées pour y parvenir, un signal fort qui rend coûteuse l’activité de cracher plus de carbone dans l’atmosphère. S’il n’en coûte rien, chacun continuera à s’en donner à cœur joie.

Pour gérer les émissions de GES, on a le choix entre deux systèmes. L’un consiste à faire payer un prix fixe par tonne de GES et à laisser les gens libres d’en émettre la quantité qu’ils veulent à ce prix. C’est la voie de la taxe carbone. Il y en a une de 30 dollars la tonne en Colombie-Britannique et une autre de 20 dollars en Alberta. Le gouvernement fédéral, pour sa part, a décidé qu’à partir de 2018 toutes les provinces devront percevoir au minimum l’équivalent d’une taxe carbone de 10 dollars la tonne. La taxe augmentera ensuite de 10 dollars chaque année, jusqu’à atteindre 50 dollars en 2022. On pourra alors juger si ce prix suffira pour que nos objectifs de réduction des GES de 29 % et de 33 % soient atteints en 2030.

Dans l’autre système, l’État fixe un plafond à la quantité totale de GES que les entreprises peuvent émettre. Des droits d’émission de GES correspondant à ce plafond sont distribués gratuitement ou aux enchères par l’État, puis achetés et vendus sur le marché par les émetteurs à un prix négocié qui équilibre l’offre et la demande, comme à la Bourse. Le Québec et l’Ontario ont adopté un tel « système de plafonnement et d’échange de droits d’émission » (SPEDE), en compagnie de la Californie. En abaissant progressivement le plafond des droits d’émission globalement disponibles, l’État se trouve à induire une rareté qui doit faire augmenter leur prix.

Les deux systèmes sont à l’inverse l’un de l’autre. Sous une taxe carbone, le prix est fixé et la quantité s’établit librement ; sous un SPEDE, c’est la quantité qui est fixée et le prix s’établit librement. Mais ils permettent tous les deux de réduire progressivement les émissions de GES, car le prix plus élevé incite entreprises et consommateurs à trouver des façons innovatrices d’émettre de moins en moins de GES. La taxe carbone a cependant plusieurs avantages pratiques sur le SPEDE. Elle est plus simple et transparente ; elle engendre des prix plus stables et prévisibles ; elle protège mieux contre les lobbys et les manigances des émetteurs ; et elle facilite les négociations interprovinciales et internationales.

Évidemment, les deux systèmes font augmenter les prix des hydrocarbures. Par exemple, en Colombie-Britannique, la taxe carbone ajoute sept cents au prix du litre d’essence. Au Québec, on estime que le SPEDE produit une hausse cachée de deux à trois cents. Toute hausse de prix est frustrante. La Colombie-Britannique a cependant montré qu’il y a moyen d’amoindrir la frustration : elle a réduit les autres impôts en exacte contrepartie de sa taxe carbone. Au Québec, aucune mesure compensatoire n’a encore été annoncée.

Nous avons le choix entre mal ou pire : ou bien nous payons maintenant pour arrêter le réchauffement du climat, ou bien nous refusons de payer, la planète va cuire, et nos enfants devront payer encore plus cher.

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S’il existe un domaine pour lequel je suis « hyper-sceptique », c’est sur l’impact patent des taxes sur le carbone (dans nos contrées) pour réduire les effets des changements climatiques globaux. Si évidemment la planète était compartimentée, cela aurait peut-être du sens…. Ainsi le Canada pourrait être immunisé contre le réchauffement de la planète !

Si encore tous les pays du monde s’entendaient pour taxer le carbone uniformément, si les revenus de ces taxes étaient centralisés, si on savait concrètement comment, vers qui et quels projets ces fonds serviraient à financer. Il y aurait un peu d’espoir (peut-être) quant aux bons usages qui permettraient de maintenir ou de réduire significativement les impacts négatifs des changements climatiques.

Si ce n’est qu’une taxe sur les émissions ou des droits négociables sur des émissions. C’est la possibilité toujours pour les agents pollueurs de pouvoir continuer leur « business » tant et aussi longtemps que le consommateur puisse encore payer pour ces suppléments. D’autant que COP21 exclut l’aviation et le transport maritime qui sont aussi une source croissante de pollution.

Il y a une troisième solution — celle qui selon moi était la meilleure — c’est celle de cibles contraignantes précises. Ces cibles réalistes doivent être établies au cas par cas et être accompagnées de mesures d’accompagnement pour les atteindre.

Quoiqu’il en soit, je pense qu’on ne parviendra pas à maintenir le climat global conformément aux Accords de Paris (COP21). C’est pour cette raison probablement que l’Accord prévoit des « cibles mobiles » et des révisions périodiques.

Il est envisageable que le réchauffement global de la Terre se stabilisera à un moment donné. La question est finalement de savoir si cette stabilisation se situera aux alentours de 3 degrés de plus (ce que pensent certains experts) et surtout à quel rythme et sur combien de temps ? Ou bien si cette température devrait inexorablement continuer d’augmenter.

Si tout le monde s’entend sur le bienfondé de réduire les émissions de GES (pas seulement le gaz carbonique), il faut dès à présent anticiper le mode de vie des gens pour les quatre ou cinq générations à venir. Sans changer drastiquement notre manière d’habiter la Terre. Sans concevoir l’économie humaine différemment. Il est peu probable que la taxation du carbone ou sa négociation en bourse puissent réellement apporter le moindre changement à un enjeu global qui dépasse amplement le cadre seul des nations.

Finalement, pour finir sur une note positive, le réchauffement climatique n’offre pas que des inconvénients. C’est au contraire une opportunité extraordinaire pour toutes les générations, pour réaménager l’ensemble des écosystèmes autrement ou pour en créer de nouveaux. C’est une possibilité unique qui est offerte à la société humaine de pouvoir gravir en quelques sortes un nouvel échelon.

Le problème de la tax carbone, faudrait que tous les pays du monde aient la même tax, sinon les industries vont s’installer où ils n’y a pas de tax.

La taxe sur le carbone est aussi plus « incitative » que le SPEDE car le consommateur sait exactement ce qu’il paie et s’il veut payer moins, il n’a qu’à consommer moins d’essence (entre autres) et prendre les mesures dans ce sens (véhicule plus économique etc.). Le SPEDE est une affaire entre grandes corporations et le consommateur finit par payer la note mais il ne sait pas quand et pour quel produits il paie; en d’autres mots, c’est caché dans les prix totaux des biens et services.

L’autre question, plus critique, c’est de savoir si le « réchauffement » planétaire (ou les changements climatiques) peut effectivement être mitigé ou arrêté. C’est extrêmement douteux et l’humain a probablement passé le point de non-retour. L’Arctique qui fond libère de plus en plus de quantités importantes de méthane avec la fonte du pergélisol et les impacts de ces changements sont cumulatifs et ont une progression géométrique qui pourrait déjà être hors de contrôle.

Quel est le point de non-retour? Là est la question!

Lors du Cambrien, le taux de CO2 atmosphérique est monté à environ 8000 ppm, sans que cela n’engendre un réchauffement cataclysmique et irréversible. Sur des centaines de millions d’années, le taux moyen a été de 2000 ppm environ, et rien de particulier n’a eu lieu (sauf les cycles de Milankovitch, dont les causes géométriques sont bien connues). Pourquoi alors craindre pour les prochaines décennies un terrrrrible réchauffement global avec seulement quelques centaines de ppm ?

À mon avis, l’un des problèmes majeurs est le 7 billions d’habitants de la Terre. Ces billions d’habitants veulent tous avoir un mode de vie idyllique, et cela demande beaucoup d’énergie. La Chine et l’Inde sont en plein développement, et ce développement demande de brûler beaucoup de charbon, de méthane, et de pétrole. Leur consommation ne fera que s’amplifier. Alors, même si tous les pays développés diminuaient leur consommation de pétrole et de charbon, les pays en développement vont les utiliser.

De plus, si on brûle moins de pétrole, son prix va chuter, de sorte que cela deviendra une source d’énergie encore plus attrayante. On s’en sort pas.

Ma conclusion est que tant qu’on aura la possibilité de faire bruler des substances pour en faire de l’énergie, cela se fera. Et avant que le solaire devienne suffisamment bon marché, la planète se sera encore réchauffée, et on aura encore besoin de plus d’énergie pour se climatiser.

Quant à la taxe sur le carbone, si on veut vraiment qu’elle ait un effet, elle doit être très élevée. Quelques sous le litre d’essence, quand ce litre varie de 10 à 12 sous d’une semaine à l’autre, ça n’a à peu près aucun effet sur la consommation. C’est comme becquer un bobo d’enfant. Ça fait juste plaisir aux écologistes.