Urgence climatique : Trudeau ou Scheer ?

Pourquoi le Canada est-il en retard sur les cibles d’émission de GES ? Essentiellement parce que celles de l’Alberta et de la Saskatchewan ont augmenté de 52 mégatonnes de 2005 à 2017, plutôt que de commencer à diminuer en conformité avec l’engagement national.

Photo : Daphné Caron pour L’actualité

Au cours des dernières décennies, les canicules, les sécheresses, les inondations, les ouragans, les tornades et les feux de brousse et de forêt sont devenus plus fréquents et plus intenses. La calotte polaire fond à vue d’œil. Les scientifiques du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), de même que le lauréat 2018 du Nobel d’économie, William Nordhaus, ont montré que le réchauffement climatique fait peser une grave menace sur l’économie et le bien-être des nations. L’humanité est dans une course contre la montre pour contenir la hausse de la température mondiale.

En 2015, les pays membres des Nations unies ont réagi en approuvant à Paris un accord qui les engage à réaliser des objectifs précis de réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre (GES) pour 2030, de façon à maintenir l’augmentation de la température mondiale « bien en dessous de 2 °C » d’ici la fin du siècle.

Malheureusement, les contributions annoncées par les pays jusqu’à présent sont insuffisantes. Les scientifiques ont calculé que, même si tous les pays atteignaient les objectifs qu’ils se sont fixés, un écart d’au moins 13 milliards de tonnes subsisterait entre le niveau actuellement prévu des émissions mondiales de GES et le niveau requis pour limiter l’augmentation de la température à la borne supérieure de 2 °C. La projection la plus optimiste est que les émissions mondiales auront baissé à 53 milliards de tonnes de GES en 2030, alors qu’il ne faudrait pas dépasser 40 milliards. Le GIEC en déduit que la planète est en état d’urgence climatique. Il supplie les pays d’accroître dès 2020 les réductions prévues pour 2030.

Quel engagement le Canada a-t-il pris ? Il a promis qu’en 2030 ses émissions totales de GES se situeront 30 % en dessous de leur niveau de 2005.

Comme l’indique le tableau, cela signifie qu’elles devraient être réduites de 219 mégatonnes. Elles passeraient de 730 mégatonnes en 2005 à 511 millions en 2030. Or, à mi-parcours en 2017, les émissions du Canada n’avaient diminué qu’à 716 mégatonnes. Le pays n’était donc parvenu à retrancher que 14 mégatonnes sur la réduction totale de 219 mégatonnes promise pour 2030. Il lui reste ainsi une énorme quantité de 205 mégatonnes d’émissions à éliminer en seulement 13 ans, de 2017 à 2030.

Pourquoi sommes-nous en retard ? Essentiellement parce que les émissions de GES de l’Alberta et de la Saskatchewan ont augmenté de 52 mégatonnes de 2005 à 2017, plutôt que de commencer à diminuer en conformité avec l’engagement national. On peut constater au tableau que la contre-performance des deux provinces pétrolières a annulé 80 % de la baisse collective de 66 mégatonnes, bien alignée sur l’objectif fixé pour 2030, qu’ont réalisée pendant ce temps les huit autres provinces. D’où la modeste réduction nette de 14 mégatonnes pour l’ensemble du Canada de 2005 à 2017.

La stratégie de redressement du gouvernement Trudeau repose jusqu’ici sur trois volets. Premièrement, il a institué une taxe carbone nationale qui vise à décourager la consommation d’énergies fossiles et dont le produit sera presque entièrement remis en compensation aux contribuables. Deuxièmement, il a établi des normes relatives aux carburants propres et favorisé l’efficacité énergétique des bâtiments, la fermeture des centrales au charbon, l’usage accru du transport en commun et le développement des technologies propres. Troisièmement, il a ouvert l’accès du pétrole albertain aux marchés asiatiques en achetant le pipeline Trans Mountain et en acceptant de tripler sa capacité. En contrepartie, il lui sera possible d’utiliser son levier de propriétaire du pipeline pour freiner l’expansion des GES émis par la production du pétrole.

L’opposition conservatrice dirigée par Andrew Scheer, de son côté, ne nie pas l’importance du défi climatique. Mais voilà : elle ne mise que sur des mesures encourageant les technologies vertes, déjà en voie d’être appliquées pour la plupart. Elle est fermement opposée à la taxation du carbone et à toute limitation de la production du pétrole bitumineux dans l’ouest du Canada.

Il est loin d’être certain que la stratégie actuelle du gouvernement Trudeau, malgré ses intentions louables, permette au Canada de remplir sa promesse de réduire de 30 % ses émissions de GES de 2005 à 2030. Elle fait cependant avancer le pays dans la bonne direction. À l’inverse, la stratégie des conservateurs d’Andrew Scheer est manifestement insuffisante. Elle nous ferait malheureusement reculer.

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Pourquoi limiter votre comparaison aux Libéraux et aux Conservateurs? Parce qu’ils sont les seules à avoir une chance d’être au pouvoir “selon les sondages”? C’est l’oeuf ou la poule. Si les médias pouvaient analyser leurs propositions, au minimum. S’il vous plait! Aidez-moi à faire un choix. Les candidats sont là.

En fait ces 2 partis ont failli dans leur tâche de se conformer aux engagements du Canada, de concert avec les autres pays, de réduire ses GES. Alors, il faudrait peut-être aller voir ailleurs ! Au lieu de voter pour le « moins pire » on pourrait peut-être regarder ce que les autres partis s’engagent à faire à ce propos. Je ne suis pas naïf et je ne suis pas convaincu qu’ils ne briseront pas leurs promesses mais les libéraux et, dans une moindre mesure, les conservateurs nous ont habitué aux promesses d’élections, qui en fait ne sont que du vent. Alors, on peut donner une chance aux autres coureurs !

En continuant à voter pour ces gens, on contribue au « collapsionnisme » c’est-à-dire qu’on accepte la catastrophe qui s’en vient et, entre temps, on fait comme l’autruche, avec la tête dans le sable mais le derrière très exposé… Puis, pour les plus vieux d’entre nous, se fiche-t-on de l’avenir de nos enfants et de nos petits-enfants ?

« La calotte polaire fond à vue d’oeil » est malheureusement un cliché inadéquat. Ce sont les deux calottes polaires qui fondent, plus la glace du Groënland, plus les glaciers des Alpes, des Andes et de l’Himalaya.

J’aimerais en savoir plus sur cette petite phrase sibylinne: « En contrepartie, il lui sera possible d’utiliser son levier de propriétaire du pipeline pour freiner l’expansion des GES ». Je trouve fort de donner l’achat public d’un pipeline destiné à augmenter la production de pétrole comme troisième volet d’une soi-disant stratégie de réduction des GES. L’Actualité aurait-elle des sensibilités libérales à protéger?

À l’instar d’Isabelle Masse, je trouve désolant que le professeur Fortin se limite à l’offre de deux partis seulement en matière de lutte aux changements climatiques d’autant que qui plus est, ses éléments de comparaison en ce qui concerne le PCC sont à tout le moins faméliques pour établir en toute conscience le meilleur pour le Canada advenant la prise du pouvoir de l’un ou le maintien au pouvoir de l’autre.

La réalité est que le principal défaut des plans de lutte aux changements climatiques du PLC, c’est qu’on ménage la chèvre et le chou pour ne pas être soi-même dévoré par le fauve.

Il est peu probable en effet que les cibles de 2030 soient atteintes, après tout, c’est dans presque dix ans seulement. Il est très vraisemblable que les cibles au niveau mondial ne seront pas atteintes non plus. Même les pays européens qui pourtant faisaient bonne figure en matière de réduction de GES, sont actuellement pour la plupart au « point-mort ». On ne sait plus comment faire pour réduire les GES, tout en maintenant l’emploi et plus encore maintenir le pouvoir d’achat.

Le Canada peut-il faire croître son PIB, réduire le ratio dette-PIB sans exporter plus de carburants fossiles ? Oui ! Avec un baril à 150$ (minimum), des débouchés sur l’Asie et si possible vers l’Europe pour vendre nos carburants au prix du marché. Avec à la pompe un litre de pétrole à 5$ ou plus. Il n’est pas à douter que la consommation d’énergie fossile va baisser. Mais c’est le coût de la vie qui va augmenter.

Pendant ce temps, les calottes glaciaires fondent, la déforestation se poursuit, celle de l’arctique aura peut-être presqu’entièrement disparu en été dans dix ans. Le pergélisol ne sera plus, libérant à son tour des mégatonnes de méthane actuellement liquéfié presque dix fois plus puissant que le CO2 pour ses effets climatiques.

Conjugué à des questions d’insécurité. D’ici 2040 de nombreux pays dans le monde devront prendre des mesures drastiques pour limiter les risques d’une catastrophe annoncée. Il n’est pas impossible que le Canada dont le réchauffement est deux fois supérieur à la moyenne mondiale, qu’il soit au nombre de ces pays qui devront instaurer « l’état d’urgence climatique » pour assurer autant que faire se peut la survie de la population.

Une politique bien faite doit contribuer à inspirer l’ensemble des citoyens, un bon premier ministre doit de façon concrète prêcher par l’exemple. Il ne suffit pas d’améliorer l’efficacité énergétique des bâtiments si nous n’adoptons pas un politique d’accession à des bâtiments éco énergétiques pour tous notamment.

Il convient de lancer plusieurs chantiers tout de suite pour assurer une vie décente des gens d’ici au moins 20 ans, construire avec la nature pour le climat avec le climat dès à présent.

Il faut vraiment ne pas avoir le sens des affaires pour ne pas voir les opportunités d’affaire qui existent à l’intérieur de l’environnement si on l’intégrait à l’économie.

Il faut arrêter de penser que c’est la décroissance qui nous attend si on sortait du fossile.

La transition vers les énergies renouvelables est un changement de cap avec une croissance dans la bonne direction.
Si quelqu’un vous dit que les énergies renouvelables sont intermittentes il faut arrêter tout de suite, pcq que vous êtes en train de vous faire enfumer comme si on vous disait que la terre est plate.
Avec un raisonnement simpliste semblable on peut dire qu’un réservoir d’essence vide est aussi une énergie intermittente. Ça fait un siècle qu’on remplit des réservoirs alors il est temps de remplir des accumulateurs d’énergie propre.

Ce qu’on craint peut prendre plus de temps qu’on pense mais le dérèglent climatique peut arriver plus vite qu’on s’attend.
Quand la température aura passé le coin du bâton de hockey, il n’y aura ni environnement ni économie, et chers politiciens il n’y a pas de job sur une planète morte.

Personne ni pays a assez d’argent pour payer ce que le système actuel détruit.

L’utopie c’est de penser qu’on peut continuer avec le fossile.

Comme le souligne si justement Isabelle Masse, je ne comprends pas votre comparaison entre les deux seuls partis – Libéral et Conservateur. J’aurais bien aimé vous lire sur les propositions soumises par les trois autres partis – en fait, les meilleures et de loin !