Nelson Mandela, 1918 – 2013 : une vie en photos

Figure historique de la lutte contre la discrimination raciale, Nelson Mandela s’est éteint le 5 décembre à l’âge de 95 ans. En photos, voici un survol de la vie et des réalisations du premier président noir à avoir dirigé l’Afrique du Sud.

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1918

Rolihlahla « Nelson » Mandela naît le 18 juillet à Mvezo, un village d’Afrique du Sud, au sein d’une famille royale de l’ethnie Xhosa. Il est l’un des enfants nés de la troisième femme de son père, Gadla Henry Mphakanyiswa, qui occupe la fonction de chef du village.

Rolihlahla devient le premier membre de sa famille à fréquenter l’école. Son institutrice le surnomme « Nelson », d’après une pratique courante à l’époque qui consiste à donner aux élèves africains un nom anglais. Après ses études dans des écoles méthodistes — où il s’entraîne également à la boxe et à la course à pied —, il s’inscrit en droit à l’Université de Fort Hare, la seule en Afrique du Sud qui accepte les étudiants de race noire. Outre la doctrine de non-violence prônée par Gandhi, il y découvre l’existence du Congrès national africain (ANC), un parti politique fondé en 1912 qui défend les intérêts de la majorité noire contre la minorité blanche.

Photo : Nelson Mandela en 1937.

 

 

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1944

Nelson Mandela joint les rangs du Congrès national africain (ANC) afin de lutter contre la ségrégation raciale. Sous l’égide d’Alfred Xuma, le parti connaît alors un regain de popularité avec l’idée, notamment, d’exiger le suffrage universel non racial (One man, one vote).

Devenu avocat — le cabinet qu’il dirige, Mandela & Tambo, fournit des conseils gratuits aux Noirs qui ne peuvent encourir des frais juridiques —, Nelson Mandela accède à la présidence de l’ANC en 1952. Il mène alors sa defiance campaign, une campagne pacifique qui encourage la désobéissance civile aux lois de l’apartheid mises en place depuis 1948 par le Parti national. Mandela organise plusieurs manifestations, dont une au cours de laquelle il est arrêté. Placé en résidence surveillée chez lui, à Johannesburg, il en profite pour réorganiser le parti en cellules clandestines, ce qui a pour effet de faire passer de 7 000 à 10 000 le nombre d’adhérents.

Après plusieurs affrontements violents partout au pays (dont le massacre de Sharpeville, en 1960, au cours duquel une soixantaine de personnes dénonçant le « passeport intérieur » obligatoire pour les Noirs sont tuées par des policiers), le gouvernement condamne et interdit les activités de l’ANC. Nelson Mandela fonde alors Umkhonto we Sizwe (« fer de lance de la Nation »), une branche militaire du parti qui mène des campagnes de sabotage contre des lieux symboliques de l’apartheid — comme les bureaux de passeport —, mais « qui doivent épargner les vies humaines ».

Photo : Themba Hadebe — Associated Press / Presse Canadienne

 

 

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1963

Considéré comme un terroriste, Nelson Mandela est arrêté par la police sud-africaine le 12 juillet. Au terme d’un procès qui dure plusieurs mois, il est condamné à la prison à perpétuité. Il passe les 18 premières années de sa détention sur l’île de Robben Island, où il doit exécuter des travaux forcés dans une carrière de chaux. Sur place, les détenus sont séparés selon la couleur de leur peau, et les prisonniers noirs reçoivent les plus petites rations de nourriture.

Malgré les conditions de vie difficiles, Nelson Mandela et les autres détenus trouvent le moyen de fraterniser et de partager leurs connaissances (en littérature et en politique, notamment) dans ce qu’ils surnomment l’Université Mandela. Malgré son « statut », l’ex-président du Congrès national africain n’accepte aucun traitement de faveur et participe à toutes les formes de contestation — comme les grèves de la faim — en compagnie des autres prisonniers.

En 1985, Pieter Willem Botha (président de la République d’Afrique du Sud de 1984 à 1989) offre à Nelson Mandela la liberté conditionnelle en échange d’un renoncement à la lutte armée. Celui-ci refuse, expliquant que « seuls les hommes libres peuvent négocier » et qu’« un prisonnier ne peut pas faire de contrat ». Le monde entier est exposé à la captivité de l’homme et à la tyrannie de l’apartheid au cours d’un concert organisé en 1988 pour les 70 ans de Mandela, un hommage télédiffusé dans 77 pays.

Photo : Nelson Mandela revisite sa cellule de la prison de Robben Island en 1995. Jurgen Schadeberg / Getty Images

 

 

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1990

Le 11 février, sous l’ordre du président au pouvoir, Frederik De Klerk, Nelson Mandela est libéré, à l’âge de 71 ans. L’événement est diffusé en direct dans le monde entier. Du balcon de l’hôtel de ville du Cap, Mandela prononce un discours dans lequel il déclare son engagement pour la paix et la réconciliation avec la communauté blanche d’Afrique du Sud. Son objectif principal : donner à la majorité noire le droit de vote aussi bien aux élections nationales que locales.

Il en profite alors pour annoncer que le combat mené par le Congrès national africain (ANC) n’est pas terminé : « Notre recours à la lutte armée en 1960 […] était purement une action défensive contre la violence de l’apartheid. Les facteurs qui ont rendu nécessaire la lutte armée existent encore aujourd’hui. Nous n’avons aucune option à part continuer. Nous espérons qu’un climat propice à une solution négociée existera bientôt, ce qui rendra inutile la lutte armée. »

Un an plus tard, le 10 juin 1991, le Parlement sud-africain vote la suppression des dernières lois de l’apartheid encore en vigueur. Nelson Mandela est élu président de l’ANC en juillet de cette même année.

Photo : Nelson Mandela et Winnie, son épouse d’alors, en 1990. Greg English — Associated Press / Presse Canadienne

 

 

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1993

Nelson Mandela et le président, Frederik De Klerk, reçoivent conjointement le prix Nobel de la paix en hommage à « leur travail pour l’élimination pacifique du régime de l’apartheid et pour l’établissement des fondations d’une Afrique du Sud nouvelle et démocratique ».

Au cours de la cérémonie de remise du prix, Mandela souligne le travail de De Klerk, « qui a eu le courage d’admettre qu’un mal terrible avait été fait à [notre] pays et à [notre] peuple avec l’imposition du système de l’apartheid ». Il profite de cette occasion pour demander au gouvernement birman de libérer Aung San Suu Kyi, prix Nobel de la paix en 1991, dont il compare la lutte à la sienne.

Photo : Nelson Mandela et Frederik De Klerk au Forum économique mondial de Davos, en 1992. – Wikimedia Commons

 

 

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1994

Après les premières élections générales multiraciales — remportées le 27 avril par le Congrès national africain avec 62,6 % des voix —, Nelson Mandela, âgé de 77 ans, est élu président de la République d’Afrique du Sud. Il devient ainsi le premier président de race noire de l’histoire du pays, et le 27 avril est devenu depuis un jour férié : le Jour de la Liberté.

Dans son discours d’investiture, prononcé le 10 mai, Mandela célèbre la fin de l’apartheid et le retour de l’Afrique du Sud au sein de la communauté internationale, ajoutant qu’il souhaite faire de son pays « une nouvelle nation arc-en-ciel en paix avec elle-même et le monde ». Évoquant la lutte contre la pauvreté et les discriminations comme défis majeurs de son mandat, il formule aussi cette phrase marquante : « En faisant scintiller notre lumière, nous offrons aux autres la possibilité d’en faire autant. »

Photo : Nelson Mandela exécute quelques pas de danse après son discours d’investiture. John Parkin — Associated Press / Presse Canadienne

 

 

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1995

Du 25 mai au 24 juin, l’Afrique du Sud accueille la Coupe du monde de rugby. Le pays accède à la finale contre la Nouvelle-Zélande, puis remporte le championnat.

Vêtu du maillot des Springboks — l’équipe nationale —, Nelson Mandela remet le trophée au capitaine, Francois Pienaar, un moment jugé emblématique dans l’histoire du sport. En effet, le rugby est le sport-culte des Afrikaners, ces descendants des premiers colons européens qui ont institutionnalisé la ségrégation raciale en Afrique du Sud. À l’arrivée du président Mandela sur le terrain, la foule se tait d’un coup, puis se met à scander « Nelson ! Nelson ! ». Un film, Invictus (réalisé en 2009 par l’Américain Clint Eastwood), évoque d’ailleurs ce moment d’anthologie, au cours duquel Nelson Mandela a réussi à faire d’une équipe sportive un instrument de réconciliation nationale.

Photo : Ross Setford — Associated Press / Presse Canadienne

 

 

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1999

Deux ans après avoir délégué la présidence du Congrès national africain à Thabo Mbeki, Nelson Mandela annonce son retrait définitif de la vie politique, à l’âge de 81 ans. Il reste néanmoins actif en participant à des œuvres caritatives, dont la Fondation Nelson-Mandela, qu’il met sur pied pour favoriser l’éducation et la lutte contre le sida, entre autres missions. Thabo Mbeki devient alors président de la République d’Afrique du Sud, une fonction qu’il occupera jusqu’en 2008.

Photo : Associated Press / Presse Canadienne

 

 

Photo : Associated Press / Presse Canadienne
Photo : Associated Press / Presse Canadienne

2005

Dans le jardin de sa résidence de Johannesburg, Nelson Mandela organise une conférence de presse au cours de laquelle il annonce, aux côtés de sa fille Makaziwe, la mort de son fils Makgatho des suites du sida. « Il ne faut pas dissimuler la cause de la mort des membres de nos familles. En parler est le seul moyen d’arrêter de voir le sida comme une maladie extraordinaire, à cause de laquelle les gens iront en enfer plutôt qu’au paradis », dit-il aux journalistes présents.

Participant dans les années 1990 et 2000 à de nombreuses conférences internationales sur le sida, Mandela n’hésite pas à exprimer son désaccord avec le président sud-africain Thabo Mbeki, qui a longtemps remis en question le lien entre le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) et le sida. « Des gens meurent pendant qu’il continue à débattre », reproche-t-il à son successeur, en 2002.

Photo : Associated Press / Presse Canadienne

 

 

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Nelson Mandela meurt le 5 décembre 2013, à l’âge de 95 ans. Entouré de ses proches — dont Graça Machel, son épouse des 15 dernières années, et ses petits-enfants —, il succombe à une infection pulmonaire qui le faisait souffrir depuis 2012. Sa dernière apparition publique remontait à 2010, durant la Coupe du monde de soccer, organisée en Afrique du Sud. Quelques semaines avant son décès, les hommages (cartes, messages, fleurs) commençaient déjà à s’accumuler à l’entrée de l’hôpital de Pretoria où il était traité.

Photo : Ben Curtis — Associated Press / Presse Canadienne