Des rues presque entièrement vides malgré un attrayant soleil estival, un silence pesant que seules viennent troubler les sirènes lancinantes d’ambulances… Paris a changé de visage.
Dans la capitale française, alors que le pays est l’un des cinq au monde les plus affectés par le coronavirus, des initiatives personnelles ou associatives, des soignants dévoués font face à la crise.
Reportage aux côtés de ceux qui souhaitent aider leur prochain, malgré les risques qu’ils encourent.
Photographies et textes d’Adrienne Surprenant.

En France, près de 20 000 personnes sont mortes de la COVID-19, et plus de 150 000 personnes ont été déclarées positives au virus, sur une population deux fois supérieure à celle du Canada. Le président français Emmanuel Macron a annoncé une levée progressive du confinement à partir du 11 mai.

Émilie, 24 ans, est étudiante en langue des signes. Ses cours arrêtés, elle a pu accroître ses disponibilités auprès de la Protection Civile, qui vient en aide aux plus démunis. De façon volontaire, elle et ses collègues sont envoyés par le SAMU (une variante française d’Urgences-santé), pour effectuer un transport vers les urgences de potentiels cas de COVID-19. « Je ne suis pas stressée, parce qu’on est bien équipés, dit-elle. J’ai surtout une grande envie d’aider. »

La Protection Civile et le SAMU transportent une dame à l’hôpital, car elle a des antécédents cardiaques. Concierge de l’immeuble, elle était exposée au virus quotidiennement.

Un homme se trouve en réanimation depuis plus de deux semaines à la clinique Ambroise Paré. Cette clinique privée a, en 48 heures, triplé ses capacités de réanimation, il y a trois semaines, afin de se joindre à l’effort de la santé publique pour faire face à la pandémie.

Dans un coma artificiel depuis 12 jours, un homme d’une cinquantaine d’années est pris en charge à la clinique Ambroise Paré. Quand des plaies de lit causées par l’immobilité apparaissent, elles sont pansées avec soin. Les bains de bouche et une multitude d’autres gestes cliniques sont essentiels pour éviter des infections qui aggraveraient les cas.

Au plus fort de l’épidémie, la clinique privée accueillait près de 70 patients atteints de COVID-19. Les difficultés d’approvisionnement en équipement mais aussi la recherche de personnel supplémentaire ont posé des défis. L’administration a pu engager du personnel soignant d’autres régions françaises, et un hôtel a offert de les loger.

Un cercueil sera transporté vers une morgue hospitalière. Selon Jean-Michel, qui travaille comme transporteur funéraire depuis 25 ans, les chiffres officiels des décès seraient en deçà de la réalité. Il n’a jamais vu pareille crise depuis la canicule de 2003. Ses journées commencent à 8 h et se terminent à minuit depuis près d’un mois.

À l’église Notre-Dame-des-Champs, le père Antoine d’Eudeville officie la messe du dimanche de Pâques, pour une transmission en direct sur YouTube, que visionnent en direct 360 personnes — plus de 1 500 vues totales. « C’est une paroisse complète, on sent qu’on est là pour les gens », relate-t-il. Sa paroisse offre aussi une cinquantaine de repas quotidiens aux plus démunis.

Jean-Michel, de la fondation Armée du Salut, distribue des repas à près de 50 personnes résidant dans un camp en périphérie de Paris. Action contre la Faim leur offre en même temps une trousse d’hygiène. Le camp manque d’eau. Et pas moyen de gagner de l’argent en temps de confinement.

Karine, qui travaille dans le développement durable, et Renaud, professeur de mathématiques, s’engagent auprès de la Protection Civile. Ils ont augmenté les maraudes sociales, car de nombreuses associations ont dû arrêter, manquant de masques et de gants pour faire leurs distributions. Le duo visite un homme qui était avant pris en charge par une association religieuse, pour lui apporter un repas, et s’enquérir de sa santé. « C’est dur, car la distance sociale et les nouvelles mesures de sécurité nous empêchent de rester longuement parler avec les gens, c’est une importante part de notre travail que nous ne pouvons plus faire », dit Karine.

Le docteur Sydney Sebban fait partie des initiateurs du premier « service à l’auto » de tests pour le coronavirus, dans la cour arrière de la mairie du 17e arrondissement de Paris. Ils font près de 160 tests de dépistage par jour, pour le personnel soignant du Grand Paris.

Un radiologue est venu à pied se faire tester au service à l’auto de la mairie du 17e, car il avait des symptômes inquiétants. « Je le fais vraiment pour les autres », explique-t-il. Avant d’ajouter : « Mon travail ne m’avait jamais fait peur jusqu’à présent. »

À droite, le docteur algérien Mustapha Aberkane accueille des soignants venus se faire tester. Il accompagnait son fils souffrant d’un cancer pour un traitement à Paris quand les frontières se sont fermées. Dès qu’il a été interdit de visite à son fils, il a cherché à se rendre utile : « Quand on est médecin, dans une situation pareille, on ne peut pas se croiser les bras ! »

Un pompier et un quincailler travaillent bénévolement dans le laboratoire de rue de la pharmacie Delpech, qui produit jusqu’à 10 000 litres de gel hydroalcoolique par jour. « Ça s’est fait petit à petit, pour répondre à la demande. Il faut oser les choses ! Je n’ai pas l’impression de réaliser quelque chose de compliqué : il faut un peu de monde, un peu de volonté, et un peu de moyens financiers », explique Fabien Bruno, pharmacien titulaire à l’origine du projet. « Il faudrait plus d’initiatives de ce genre. »

Les cas en réanimation diminuent depuis quelques jours en France. Certains soignants rencontrés disent craindre que le relâchement des citoyens face aux mesures de confinement ne vienne troubler cette fragile avancée.
Vous avez aimé cet article ? Pendant cette crise, L’actualité propose gratuitement tous ses contenus pour informer le plus grand nombre. Plus que jamais, il est important de nous soutenir en vous abonnant (cliquez ici). Merci !
Bravo belles photos, reportage intéressant !
Un québécois qui s’informe…
G