Saint-Brieuc, Bretagne – Les éoliennes « sont laides et gâchent nos paysages », a lancé Éric Zemmour, candidat à l’élection présidentielle française, lors d’un point de presse le mois dernier. Le polémiste rejoint ainsi de nombreuses personnalités politiques et artistiques qui s’opposent à la construction de parcs éoliens, qu’ils soient terrestres ou maritimes.
À un mois du premier tour de l’élection présidentielle, le 10 avril, la question de l’énergie éolienne fait irruption dans le paysage politique malgré la présence de la crise ukrainienne dans les grands médias. Elle divise politiciens, écologistes et, dans une moindre mesure, l’opinion publique.
Je me suis rendu dans le nord de la Bretagne, à Saint-Brieuc, où l’aménagement d’un parc éolien en mer fait des vagues dans cette jolie station balnéaire des Côtes-d’Armor. À mon arrivée, je vais manger au bar-restaurant Le Père Moustache, un des plus fréquentés de la ville en raison de sa terrasse. L’endroit est sympathique, et les gens s’expriment spontanément. Zulfukar Dalli et Camille Lucas gèrent le resto. Au moment de régler l’addition, je demande à Camille ce qu’elle pense de ces éoliennes. Elle avoue en avoir entendu parler, mais pas plus. Elle est d’accord avec les énergies renouvelables, car l’autre option, c’est le pétrole ou le nucléaire. « En Bretagne, il n’y a pas de centrale nucléaire, dit-elle. C’est notre fierté. » Alors il faut choisir un mode de production d’énergie. « L’éolien me semble l’énergie la plus propre, mais ce projet de champ maritime ne risque-t-il pas de détruire la faune aquatique, de polluer ? » s’interroge-t-elle.
À ce moment, un client se lève et vient vers nous. Valentin, sexagénaire bien en forme, est un habitué. Il se mêle à la conversation et affirme s’y opposer au nom du respect des écosystèmes et des paysages. « Au nom de quelle écologie ? lui lance Camille, taquine. Il faut bien produire de l’électricité. » Valentin répond en me proposant de me rendre sur le chantier pour constater de visu.
Un décor menacé ?
Je me dirige vers le port de la ville, Le Légué. C’est le lieu de toutes les activités : le commerce, la pêche et la plaisance. Les bateaux des uns côtoient les navires des autres en cette journée très pluvieuse de mars. Peu de gens sur les quais. C’est un lundi, et de nombreux restaurants et boutiques sont fermés. Le décor est tout de même magnifique.
Le parc d’éoliennes sera construit en mer. Ce sera un des plus grands au monde et un des premiers en France. Michel, propriétaire d’un voilier amarré au port, n’est pas inquiet. « Certains craignent pour le paysage, l’esthétique, dit-il. Les éoliennes seront loin, très loin d’ici. Donc, nous profiterons toujours de la splendide vue que nous avons. »
La société Ailes Marines est responsable de l’érection du parc situé à plus de 30 km au large de Saint-Brieuc. Les travaux ont commencé en mai dernier et, après un temps d’arrêt, viennent de reprendre. Ils concernent la partie terrestre du raccordement électrique et les forages pour les fondations devant accueillir l’année prochaine les 62 éoliennes. La production du parc sera l’équivalent de la consommation annuelle d’électricité de 835 000 habitants.
Il reste que le parc couvrira une superficie de 75 km2 et que certaines éoliennes parmi les plus près, jusqu’à 16 km des côtes, seront visibles. Tout autour du parc se trouvent des zones destinées à protéger la biodiversité. Ailes Marines a obtenu toutes les dérogations gouvernementales pour exécuter les travaux et promet qu’elle poursuivra les mesures de suivis environnementaux, dont ceux relatifs au bruit, à la turbidité, aux oiseaux et aux mammifères marins, aux chauves-souris, à la ressource halieutique ainsi qu’à la qualité des eaux et des sédiments. La société a même mis en ligne des photomontages destinés à représenter des vues du parc éolien à partir de différents points de la côte, afin de rassurer les habitants.
Un vent d’opposition
Cet argumentaire ne convainc pas tout le monde, et le projet a semé la division jusque dans les rangs des écologistes. Sea Shepherd France, la grande ONG de défense des océans, mène un combat acharné contre ce chantier. La semaine dernière, à l’occasion de la relance des travaux à Saint-Brieuc, elle a réclamé l’intervention de la Commission européenne. « Nous demandons à la Commission qu’il soit remédié aux manquements du chantier aux règles applicables au sujet de substances polluantes en mer, à la planification de l’espace marin, ainsi qu’aux règles applicables aux espèces et aux habitats protégés », a déclaré la porte-parole Karine Demure. Sea Shepherd demande l’abandon du parc éolien.
Le parti Europe Écologie – Les Verts (EELV) a une autre lecture de l’initiative. « Les énergies renouvelables, dont l’éolien est un aspect, sont l’avenir, dit Yvan Hamon, porte-parole du parti à Saint-Brieuc. Nous n’appuyons pas tous les projets de parcs éoliens, mais celui de Saint-Brieuc répond à notre vision d’une écologie responsable. » Hamon ne nie pas que la phase de construction provoquera des perturbations pour la faune aquatique. Mais elles seront temporaires. « Un des arguments avancés est qu’il y aura destruction de dizaines d’espèces, dit-il. C’est faux, sinon Europe Écologie ne serait pas d’accord avec ça. »
Macron et les Français y sont favorables
Éric Zemmour n’est pas le seul opposant à l’éolien, qu’il soit maritime ou terrestre. La cheffe du Rassemblement national, Marine Le Pen, promet de démanteler certains parcs. « Élue présidente, je déconstruirai immédiatement les chantiers éoliens à terre et en mer et supprimerai toutes subventions à l’éolien », a-t-elle affirmé. Même certains ténors des Républicains, le parti de la droite classique, sont plutôt tièdes à l’égard des éoliennes, que certains accusent de défigurer le paysage. Ils ont été rejoints par nul autre que Stéphane Bern, le célèbre animateur télé et promoteur de la préservation du patrimoine. Elles « polluent gravement la nature et détruisent le patrimoine naturel et bâti de la France », a-t-il déclaré au Figaro l’an dernier.
Visiblement, le chef d’EELV et candidat à la présidentielle, Yannick Jadot, ne comprend pas cette fixation sur le paysage. « Il y a 16 000 châteaux d’eau en France, nul ne dit rien. Nous avons 100 000 pylônes à haute tension. Nous avons défiguré les champs par la suppression des haies, la construction de zones commerciales. Nous n’avons que 9 500 éoliennes dans le pays », a-t-il dit dans une entrevue accordée au Monde. Avec son programme énergétique, leur nombre passera à 12 000 dans 30 ans.
Quoi qu’il en soit, la France emprunte le chemin des éoliennes. Emmanuel Macron vient d’annoncer un vaste plan énergétique combinant nucléaire et énergies renouvelables, lequel sera mis en chantier après sa réélection. Dans ce cas, il a mis l’accent sur l’éolien en mer. Une cinquantaine de parcs maritimes seront construits d’ici le milieu du siècle pour soutenir la décarbonation de l’économie. « C’est complètement fou », dit la porte-parole de Sea Shepherd. N’empêche, les Français suivent. Selon un sondage Harris Interactive publié en octobre dernier, 73 % d’entre eux ont une bonne image de l’énergie éolienne. Il est à parier que la guerre en Ukraine et la dépendance de la France à la Russie pour une partie de ses approvisionnements en pétrole et en gaz vont consolider et peut-être faire monter cet appui.
Personnellement j’aurais plutôt préféré qu’on nous parle de solaire. Si la France et donc le président Macron misent plutôt sur le nucléaire et sur l’éolien, c’est simplement parce que la filière industrielle existe et que ces entreprises réclament des commandes de l’État, on peut penser à des compagnies comme Alsthom notamment.
La filière solaire est quant à elle encore peu développée, elle dépend toujours pour la production des composantes largement de l’Asie, ce qui veut dire essentiellement de la Chine. Il y a cependant du mieux, puisque le président Macron mise sur un mix énergétique qui prévoit la fermeture progressive de près de la moitié des centrales nucléaires et multiplier par 5 la production d’énergie solaire d’ici 2030.
Je pense que les chiffres avancés par Jocelyn Coulon relatifs au nombre d’éoliennes dans 30 ans sont inexacts, le président Macron prévoit de multiplier la production d’énergie éolienne par trois. S’il est vrai que les turbines sont de plus en plus puissantes. Les chiffres avancés seraient plutôt de 14500 mâts d’ici 2028 et non de 12000 dans 30 ans.
Ce qui est projeté à l’horizon de 2060, c’est une fourchette comprise entre 28000 et 46000 machines tout dépendant des avancées technologiques en matière de production énergétique. Les experts misent plutôt sur environ 34000 éoliennes.
Il est donc assez clair que l’édification d’un tel nombre de pylônes aura un impact inexorable sur le paysage. Cela est déjà le cas dans quelques endroits, cette problématique existe presque partout en Europe. Cela dit, l’œil et les générations s’habituent aux transformations paysagères. Ainsi, je suppose qu’en 2060 les français seront plus choqués par les vestiges des usines et des mines à charbon, qu’ils ne seront choqués par des éoliennes dont l’esthétique peut encore être améliorée.
L’abondance de vent dans plusieurs régions côtières de la Bretagne permet aux turbines de pouvoir fonctionner pratiquement 24 heures sur 24 toute l’année, ce qui n’est pas le cas partout.
N’oublions pas qu’un des aspects fondamentaux des énergies renouvelables, c’est le stockage de cette énergie, pour être disponible en tout temps. Dans ce segment d’ailleurs, le Québec a potentiellement un rôle intéressant à jouer.
2e tentative:
Bonjour M. Drouginsky. Toujours un plaisir de vous lire.
Je comprends mal Macron qui veut se débarrasser de ses centrales nucléaires qui sont, à tout le moins, beaucoup moins polluantes que le charbon et presque zéro carbone une fois installées. Se débarrasser du nucléaire pour être obligé d’acheter l’énergie allemande n’est pas très malin. On a vu et on voit encore ce que la pandémie, ajoutée à cela la guerre en Ukraine, a révélé côté indépendance énergétique des pays Européens et même Américains. C’est dans ce sens que je suis nationaliste et non internationaliste (ou ¨globaliste / mondialiste¨ comme on dit aujourd’hui).
Quand tous les pays du monde seront assis sur des centrales nucléaires, la tentation de peser sur un bouton quelconque sera peut-être beaucoup moins envisagée.
J’aurais personnellement favorisé l’énergie marémotrice avant le solaire et l’éolien. Ce dernier étant plus dommageable que le solaire côté aviaire, sonore et surtout visuel. Combien de milliers de sites panoramiques de toute beauté seront détruits pour une énergie encore loin d’être rentable et efficace; sans compter sa pollution énorme de fabrication et frais d’entretien élevés.
On ne fait pas fonctionner une fonderie avec des moulins à vent ou des capteurs solaires. Donc, les ressources polluantes sont avec nous pour encore bien longtemps, n’en déplaise à tous les verdistes. Il faudrait trouver des méthodes d’atténuation plutôt que de faire crouler toutes les économies mondiales.
Un léger aperçu de ce que la pandémie nous fait voir devrait les faire réfléchir. En 2021, une baisse de 8% d’émission de CO2 cause des problèmes difficilement surmontables encore à ce jour. Imaginez l’élimination radicales des principales sources d’énergie ! Ne pas oublier non plus les pays en voie de développement qui ont un besoin urgent de beaucoup d’énergie pour rattraper le 21e siècle, et une population mondiale à la hausse rapide, bientôt 10 milliards. Dans vingt ans, on ne dira peut-être plus ¨Que va-t-on manger¨, mais plutôt ¨Qui va-t-on manger¨ comme dans la contine ¨ Il était un petit navire¨ !
Marine Le Pen, promet de démanteler certains parcs. « Élue présidente, je déconstruirai immédiatement les chantiers éoliens à terre et en mer et supprimerai toutes subventions à l’éolien »
Pour les remplacer par quoi ? Le gaz de Russie ?
Il n’y a que ceux qui ont une totale meconnaissance du probleme eolien pour en parler avec bienveillance.
J’habite la Somme au milieu de 400 eoliennes dans les 20 km alentours (1055 dans le departement).
Nous en creuvons !
Problemes de sante, depreciation immobiliere, pollution visuelle et sonore, problemes dans les elevages, destruction de l’avifaune, massacre des chiropteres …
Augmentation du cout de la vie : electricite et taxes sur les carburants, produits de premiere necessite en milieu rural.
Les pauvres n’ont pas les moyens de se revolter. La carte des eoliennes, c’est la carte de la pauvrete !