Dominic Vallières a, pendant plus de 10 ans, occupé les postes d’attaché de presse, de porte-parole, de rédacteur de discours et de directeur des communications auprès d’élus de l’Assemblée nationale et des Communes (Parti québécois, Bloc québécois, Coalition Avenir Québec). Il est directeur chez TACT et s’exprime quotidiennement comme analyste politique à QUB radio.
Il flotte des relents de 2015 autour du Parti québécois. Je parle de ce moment où le chef du Bloc québécois, Mario Beaulieu, a constaté qu’il dirigeait sa formation vers un mur, et qu’il ferait mieux de céder sa place pour éviter un naufrage.
À l’époque, quelques semaines avant le début de la campagne fédérale, l’appui au Bloc stagnait autour de 13 % dans les sondages. On évoquait une possibilité de faire élire de zéro à cinq députés. Des chroniques nécrologiques se préparaient, n’attendant que le jour du vote pour être publiées.
Mario Beaulieu avait été élu chef par les membres en 2014 et était apprécié de ceux-ci. Le problème, c’est qu’il ne parvenait pas à traverser le mur de l’indifférence. Et il le savait. D’où cette audacieuse décision, à la mi-juin, de démissionner en faveur de… Gilles Duceppe. Un homme avec une très forte notoriété, un campaigner aguerri malgré l’échec de la campagne fédérale de 2011. Grâce à ce coup de théâtre, le Bloc pouvait recommencer à croire en ses chances et espérait faire élire une dizaine de députés, six de plus que ce qu’il restait à la dissolution de la Chambre. C’est ce qui est arrivé au final, avec près de 20 % des suffrages au Québec.
Je n’ai aucune idée de ce que s’est dit Mario Beaulieu en son for intérieur avant de prendre cette décision. Peut-être ne voulait-il pas être le dernier chef de son parti ? Peut-être souhaitait-il favoriser au maximum l’entrée des candidats bloquistes aux Communes ? La réponse lui appartient. Je sais une chose, par contre : il a été animé du sens du devoir envers son parti quand il a décidé de laisser sa place. Aujourd’hui, il entame son troisième mandat, et tant les militants que ses collègues savent ce que le Bloc lui doit.
Revenons au Parti québécois, qui est lui aussi à quelques mois des élections, avec un appui autour de 10 % (les agrégateurs de sondages, comme celui de mon collègue Philippe J. Fournier, parlent d’une seule circonscription sûre, celle de Pascal Bérubé). Autre parallèle : Paul St-Pierre Plamondon a lui aussi été le choix des membres et il est apprécié de ceux-ci. On doit également reconnaître que, malgré toutes ses qualités, il laisse l’électorat très indifférent.
Vous me voyez venir…
Je ne dis pas qu’il doit absolument céder sa place, mais il doit à tout le moins envisager cette possibilité. Le PQ, actuellement, se dirige vers le pire score électoral de son histoire. Pour avoir accompagné de nombreux chefs et ministres, je sais qu’on se dit souvent qu’on est à quelques jours où tout va se mettre à bien aller. Que la puck va bientôt, très bientôt, rouler de notre bord. Or, c’est rarement le cas. Il est très difficile de casser une spirale, qui dans ce cas-ci s’est transformée en vrille.
Je constate toutefois — et je suis loin d’être le seul, puisqu’on dit que l’option fait l’objet de sondages en ce moment — que, depuis quelques semaines, un élu appuie sans relâche le Parti québécois. Il est de toutes les batailles, dans Marie-Victorin comme sur Twitter, afin d’exhorter les péquistes à combattre. Il houspille tous ceux qui disent du mal du PQ. Il est connu, a traversé deux campagnes électorales comme chef et a refait d’un parti moribond une force politique incontournable au Québec. Lors du récent Conseil national du PQ, sur la scène, pour bien marquer la différence avec certains de ses anciens collègues, il a aussi affirmé clairement : « Je suis péquiste. »
Vous l’aurez reconnu, je parle d’Yves-François Blanchet.
S’il faisait le saut au Parti québécois, ce serait une riposte éclatante au passage de Bernard Drainville à la Coalition Avenir Québec.
Dans les points de presse de la dernière semaine, j’ai vu un Paul St-Pierre Plamondon tantôt ému, tantôt combatif. Beaucoup de chroniqueurs ont salué son courage alors que le PQ était reconnu comme quantité négligeable par un ancien chef, Lucien Bouchard, qui multipliait les critiques cinglantes.
Je ne sais pas ce qui trotte dans la tête de Paul St-Pierre Plamondon. Je sais cependant que tous les chefs doutent. Jean-François Lisée a admis avoir songé à céder sa place à Véronique Hivon en 2018. Yves-François Blanchet doit bien sentir qu’il est perçu comme un recours possible. Par sens du devoir, il devrait envisager de revenir à ses anciennes amours. En relisant les textes sur le retour de M. Duceppe en 2015, j’ai été frappé par un passage d’un article de L’actualité : « Ce qui change avec Duceppe, c’est le nombre de circonscriptions où le candidat bloquiste est dans la course. » Je parie que bien des péquistes aimeraient lire une telle phrase, quelques semaines avant la campagne à venir.
Les options sont peu nombreuses. Une grosse pointure comme candidat ? Ça ne semble pas être le cas jusqu’à présent. Passer les rênes à Pascal Bérubé ? Il est connu, aimé et a l’avantage de venir de l’interne. Il pourrait donc faire avaler la pilule plus facilement aux membres — fort probablement pas consultés, si on veut agir rapidement —, mais a l’inconvénient de n’avoir pas mené de parti en campagne, contrairement à Blanchet. Il reste l’option d’une proposition qui réussirait à faire débat pendant des semaines et replacerait le PQ un peu plus près du centre du jeu.
Quoi qu’il en soit, il faudra bientôt trancher. Je vois très bien Blanchet relever le gant, mais ce n’est pas moi qui décide. C’est Paul St-Pierre Plamondon.
Paul St-Pierre Plamondon n’était pas mon premier choix, lors de la dernière course à la direction du PQ, mais il est un bien meilleur tribun que le terne Mario Beaulieu. J’ai confiance en ses qualités de débatteur, lors des débats des chefs, car il croit profondément en l’argumentaire indépendantiste et sa formation d’avocat et sa vivacité d’esprit le rendent extrêmement efficace pour communiquer son message. Avant que la pandémie ne vienne réduire au silence les partis d’opposition, PSPP a participé à plusieurs tribunes libres, dans les journaux, pour analyser les enjeux politiques de l’heure avec une optique indépendantiste. Depuis Jacques Parizeau, aucun chef du PQ n’a fait ces analyses de façon aussi réfléchie et cohérente avec la raison d’être du parti.
D’ailleurs, la venue de Yves-François Blanchet ramènerait encore le PQ en arrière, avec une stratégie électoraliste provincialiste. S’il a fait passer le nombre d’élus bloquistes de 10 à 32, ce ne fut qu’au prix de remiser l’idée d’indépendance du Québec au placard, en se collant au nationalisme mou de la CAQ. Il y a bien assez de la CAQ et des autres partis pour faire semblant que le Canada fonctionne et peut satisfaire les intérêts du Québec et des Québécois!
M. St-Pierre Plamondon avait d’ailleurs averti les membres du parti qu’il fallait être davantage persistants que changer les chefs après chaque défaite, puisque ce qui importe le plus est de recommencer à faire croître les appuis à l’indépendance. Il n’a servi à rien au PQ d’être au pouvoir si c’était pour gouverner une province étouffée par Ottawa. C’est bien mieux, pour l’option indépendantiste, de laisser le soin aux autres partis (fédéralistes) faire la démonstration de l’impuissance du Québec à freiner et même simplement ralentir le déclin du français et de son influence dans le Canada. Quand les Québécois en auront assez de voir dégénérer la situation en laissant le Canada décider à notre place, ils éliront majoritairement le PQ.
Par contre, le gros boulet qui mine le PQ reste la promesse de tenue d’un référendum pour réaliser l’indépendance. Cette avenue est bloquée depuis la Loi sur la clarté et la démographie, depuis 1995, rend l’obtention d’une majorité virtuellement impossible. S’il veut absolument un référendum avant de faire une déclaration d’indépendance, le PQ devrait le tenir sur la constitution populaire proposée par une assemblée constituante populaire représentative de la population. Un OUI compléterait le processus de transition province-pays tandis qu’un NON forcerait le retour à la table à dessin pour l’assemblée constituante, mais sans remettre en question le principe de l’indépendance.
« S’il veut absolument un référendum avant de faire une déclaration d’indépendance, le PQ devrait le tenir sur la constitution populaire proposée par une assemblée constituante populaire représentative de la population. » Je crois que c’est exactement le proposition de Québec Solidaire.
Je ne comprends pas pourquoi PSPP reste aussi bas dans les sondages. Face aux tergiversations de Legault et ses nouveaux amis ex-souverainistes, PSPP parle ouvertement de ses convictions, avec une clarté plutôt rare dans un politicien de cette époque-ci.
Monsieur Caro, effectivement, l’idée de la constituante vient de Québec solidaire, mais ce parti a choisi d’enlever la restriction au mandat de cette assemblée constituante. Celle-ci pourrait donc aussi bien accoucher d’une constitution provinciale à l’intérieur du cadre canadien (donc subordonnée à la constitution canadienne de 1982 que nous n’avons jamais signée et qui nous a été imposée par Pierre Elliott Trudeau, avec sa charte des droits et libertés individuelles expressément conçue pour mettre en tutelle la souveraineté de l’Assemblée nationale du Québec) qu’une constitution nationale dans un statut de pays du Québec.
Une éventualité à regarder; si le monsieur du fédéral revient au provincial, il n’aura pas le vote de la majorité des femmes péquistes… Me too, ça vous dit quelque chose??? ahh ben non 🧐, aux femmes (ben oui on vote😇) si, 😉donc peu, très peu de chance de redonner de la force au parti. S’ils le font, ça va annoncer la fin du parti… RL (René, pour les intimes) serait surement super content.. (c’est sarcastique! )
Tant qu’à y être, je propose deux changements :
1-Yves-François Blanchet à la tête de la CAQ ;
2-François Legault à la tête du PQ.
Chacun étant, peut-être, nationaliste ou peut-être opportuniste, ça égaliserait les chances…
Je plaisante, bien sûr, et ce n’est même pas drôle !
Ce sont les médias qui plombent les partis d’opposition : ils ne sont ni plus ni moins performants que la KAK.
Les médias sont le premier véhicule du populisme !
L’idée du passage de Pascal Bérubé à la chefferie est une option fort intéressante. Ce qui ne contribuerait en rien à la valeur et à l’engagement du chef actuel. Malheureusement l’impact sur les électeurs de sa présence ne passe pas la rampe. Donc, en acceptant, dans ce contexte plus que difficile, de céder sa place, il se grandirait.
Il y a selon moi sauf erreur de ma part, une différence importante entre la situation qui prévalait pour le BQ en 2015 et celle qui prévaut en 2022 avec le PQ. En 2015, Gilles Duceppe n’était plus député et se trouvait en quelques sortes : « En réserve de la République ». Il revenait à son parti d’origine.
En 2022, monsieur Blanchet est chef de parti en poste. Quel intérêt aurait-il à quitter un parti dans lequel il est très populaire pour reprendre un autre parti qu’il pourrait éventuellement rescaper d’une défaite électorale historique… mais probablement pas assez pour ne pas demeurer une seconde opposition pendant quatre années consécutives au moins dans le meilleur des cas ?
Aujourd’hui le BQ est un arbitre important de la politique canadienne. Sans Blanchet, cette position plutôt valorisante aurait-elle de grandes chances de se maintenir ?
Quel gain politique cela rapporterait-il à Blanchet de passer de la Chambre des communes pour retourner à l’Assemblée nationale ?
Actuellement, le chef du PQ est Paul Saint-Pierre Plamondon, c’est un jeune chef qui a des idées. Il est plus porté aux vraies questions environnementales que ne l’est Yves-François Blanchet malgré le poste de ministre qu’il a naguère occupé. Saint-Pierre Plamondon est solide dans ses convictions, je pense qu’il est digne de confiance.
La question de l’urne appartient aux Québécois : sont-ils encore souverainistes ou ne l’ont-ils tout simplement jamais été… seulement par soucis de saisir des opportunités ? Alors les intérêts de plus d’uns seraient ailleurs désormais.
P.S.P.P. me semble être un jeune homme sérieux et très convaincu. Il a mis cartes sur table en partant: c’est la Souveraineté ou rien d’autre. C’est pourquoi je vote pour ce parti, à cause d’un chef qui ne passe pas du chaud au froid selon le vent du moment.
Pour répondre à la question de M. Drouginsky ci-haut : ¨La question de l’urne appartient aux Québécois : sont-ils encore souverainistes ou ne l’ont-ils tout simplement jamais été… ?¨ je dirais que les québécois sont ¨des pisseux¨ (et non des ¨pea-soup¨). Quand vient le temps de prendre une décision qui les concernent au plus profond de leur être, ils ont la peur au ventre de se tromper, ils font dans leur froc comme disent nos amis français. Ou bien ils se laissent berner par les ¨miroirs aux alouettes¨ venant du ROC avec des ¨We love you Qubec¨ gros comme le bras.
Pour apprendre à nager, il faut se mettre à l’eau, et ça, les québécois ont peur de se mouiller. Au fond, les québécois savent bien qu’en restant au Canada, ils seront toujours et de plus en plus la carpette où le ROC s’essuiera les pieds. Jusqu’où cela peut-il aller ? Nul ne le sait. Chose certaine, il y a toute une jeunesse à aller chercher, car elle dérive dangereusement du côté anglais de la facilité et des pièges du mondialisme et du multiculturalisme effrénés.
Même avec la CAQ, nous ne deviendrons jamais un ¨Québec fort dans un Canada uni ¨, car le P.M. actuel, que j’apprécie quand même, ne mettra pas les gants de boxe pour ébranler le Canada inflexible à l’égard du Québec.
Seule la souveraineté nous permettra de lutter d’égal-à-égal. Le Québec a tout ce qu’il lui faut pour ça. Il est l’entrée principale du ROC à l’est et il a des ressources qui font l’envie du monde entier.
Qu’attendons nous donc ?
@ C. d’Anjou,
Heureux de lire de vos nouvelles. Très amusant votre correspondance : « pisseux » et « pea-soup ».
J’ajouterai à vos commentaires le fait que le « droit des peuples à l’autodétermination (droit des peuples à disposer d’eux-mêmes) est un des piliers de la Charte de l’ONU depuis 1945. Ceci peut être interprété de diverses façons, il n’en reste pas moins que l’égalité de droit des peuples et leur droit à disposer d’eux-mêmes est souligné par l’article 55 de la Charte. Cet article ayant servi comme support à la rédaction de plusieurs traités.
Les propositions de Saint-Pierre Plamondon sont cohérentes et assortissent l’esprit des Lois.
En fait, au Québec, pissou rend encore mieux la réalité que pisseux.
@ M. Drouginsky;
Merci pour votre mot. Vous avez raison quant à l’article que vous mentionnez. À cet égard, le Canada nous menace, dans une moindre mesure grâce à ce que devrait contenir la question référendaire de Stéphan Dion, autant que la Chine menace Taïwan qui est prise entre deux feux menaçants, les USA et Pékin.
@ M. Perras; Effectivement, le bon mot à utiliser est bien ¨pissou¨, mais selon certaines régionalités, en Matapédia, loin des anglicismes de la métropole, le mot ¨pea-soup¨ qui décrivait les canadiens français de l’époque avait été traduit par ¨pissou¨ et régionalisé ¨ pisseux¨ à certains endroits. J’avais alors 5-6 ans à l’époque et ce mot m’est resté signifiant ¨peureux¨ et non mangeur de soupe au pois.
Bonne journée.
M. D’Anjou; Pissou ou pisseux, il y en a eu beaucoup trop au référendum de 1995. Et lorsque les Anglos nous traitaient de frogs, on leur répondait: «Today the pond; tomorrow the world!» https://www.youtube.com/watch?v=Dzl1RkBxNsY
Pour la première fois depuis que le PQ n’est plus dirigé par René Lévesque, j’ai décidé d’appuyer le Parti québécois et s’il le faut de voter pour l’indépendance. Après le Québec bashing, les attaques de racisme et les prétentions de la communauté anglophone d’être opprimée, j’ai accumulé trop d’indignation devant le mépris du Canada anglais à nous refuser notre droit de vouloir protéger notre culture. Le Bouchard bashing a été l’ultime déclencheur tout comme ma crainte de voir l’héritage de René Lévesque disparaître. Il est devenu impensable pour moi d’assister au déclin de notre société distincte, laquelle si elle ne peut être reconnue comme une nation au sein du Canada doit se donner les moyens de devenir un pays. Je n’ai rien contre le multiculturalisme, mais non lorsqu’il affaiblit le Québec et bien que j’aie quelques réserves contre certains aspects de la loi sur la laïcité, je ne suis plus prête à faire des concessions au détriment de ma culture. Cependant, malgré que je reconnaisse de multiples qualités à l’actuel chef du Parti Québécois, Paul St-Pierre-Plamondon, j’ai des réserves à lui donner mon appui inconditionnel pour obtenir mon vote pour l’indépendance. Il a sa place au sein du PQ et il faudra lui réserver une place d’honneur, mais il faudrait un nouveau chef et des hommes d’expérience, et si l’histoire pouvait se répéter, de la trempe de René Lévesque, Jacques Parizeau, Camille Laurin, Bernard Landry, Gérald Godin ou tout au moins des hommes forts. J’espère que le chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet considérera que la nouvelle urgence nationale est maintenant de représenter le Québec au sein du Québec et que le Bloc pourra lui survivre à Ottawa avec un nouveau chef.
« J’espère que le chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet considérera que la nouvelle urgence nationale est maintenant de représenter le Québec au sein du Québec et que le Bloc pourra lui survivre à Ottawa avec un nouveau chef. »
Représenter le Québec au sein du Québec ou au PQ? Dans le scond cas, d’accord avec le transfert de Blanchet, donc?
Perso, je n’étais pas très chaud à la candidature de PSPP avant et lors de la course à la chefferie (je lui préférais Frédéric Bastien), mais j’avoue être agréablement surpris de sa part en tant que chef de parti. Il est solide et droit (intègre) dans ses convictions, sans faux-fuyants. Il a livré un discours très juste au lancement des célébrations du 100e anniversaire de naissance de René Lévesque que je vous invite d’ailleurs à écouter sur son compte Twitter.