La CAQ a un nouveau rival

Ce n’est plus un accident de parcours : le parti qui gouverne le Québec sans partage depuis 2018 a désormais un nouvel adversaire, qui se nourrit visiblement aux sources électorales de la Coalition Avenir Québec.

Francis Vachon / La Presse Canadienne ; montage : L’actualité

Un nouveau sondage de la maison Léger publié mercredi dans les médias de Québecor semble montrer que la Coalition Avenir Québec (CAQ) a su éviter l’hémorragie à la suite de son printemps difficile sur le plan des affaires publiques.

Mais surtout, l’enquête révèle que le Parti québécois (PQ), dont une hausse marquée des appuis avait déjà été mesurée en avril, se détache du peloton des partis d’opposition.

La CAQ n’est toujours pas menacée pour autant. Au niveau national, la formation de François Legault détient encore une confortable avance de 14 points sur son rival péquiste, 37 % contre 23 %. La CAQ mène aussi largement auprès des électeurs plus âgés (55 ans et plus) — une tranche cruciale — avec 49 % des appuis, contre 26 % pour le PQ. Chez les électeurs francophones, la CAQ est toujours première avec 41 %, contre 29 % pour le Parti québécois.

Québec solidaire (QS) fait du surplace à 16 %, ce qui laisse croire que la victoire éclatante contre les libéraux lors de l’élection partielle dans Saint-Henri–Sainte-Anne au printemps n’a pas catalysé un engouement marqué hors des limites de la circonscription montréalaise.

Quant au Parti libéral (PLQ) justement, il continue son lent naufrage vers l’impertinence alors que ses appuis électoraux atteignent 13 % au niveau national (dont seulement 4 % chez les électeurs francophones). Le Parti conservateur (PCQ) tombe à 9 %, et ne récolte que 16 % dans la région de Québec, son présumé fief. Le PCQ n’aura donc aucunement profité de la grogne des électeurs à la suite de l’abandon du troisième lien autoroutier.

C’est dans les découpages régionaux que nous trouvons les chiffres les plus révélateurs du mouvement de l’opinion publique dans les derniers mois, en particulier pour le Parti québécois. Si la CAQ est toujours loin devant dans la grande région de Montréal (l’île et ses banlieues), nous remarquons que le PQ a considérablement resserré l’écart qui le séparait de la CAQ ailleurs au Québec. En région, où la CAQ a terminé 31 points devant son plus proche rival l’automne dernier, l’écart entre les deux partis ne serait plus que de 11 points : 39 % pour la CAQ, 28 % pour le PQ.

Le mouvement des intentions de vote est encore plus étonnant dans la région métropolitaine de Québec, où le PQ se hisse en tête avec 30 %, trois points devant la CAQ (compte tenu de la taille du sous-échantillon, il s’agit d’une égalité statistique). C’est le deuxième sondage Léger d’affilée qui accorde une hausse notable des intentions de vote pour le PQ par rapport aux suffrages de 2022.

Une fois, ç’aurait pu être une aberration statistique, mais deux fois ? Il y a sans doute une tendance, qui nous intrigue.

En effet, si nous comparons les chiffres de Léger à Québec avec les résultats du dernier scrutin, il s’agirait d’une chute importante de 16 points pour la CAQ à Québec et d’une hausse quasi équivalente pour le PQ. Rappelons que la CAQ, à l’exception des circonscriptions solidaires de Jean-Lesage et Taschereau, avait balayé la grande région de Québec (Capitale-Nationale et Chaudière-Appalaches) lors des élections générales du 3 octobre dernier.

Or, un tel mouvement de l’opinion publique, s’il devait perdurer jusqu’au prochain scrutin, viendrait assurément changer les couleurs de plusieurs sièges à Québec. Charlesbourg ? Jean-Talon ? Louis-Hébert ? Vanier-Les Rivières ? Montmorency ? Le PQ n’a pas remporté certaines de ces circonscriptions depuis mon adolescence, mais deux sondages Léger consécutifs donnent à penser que le PQ y serait potentiellement compétitif.

En région, le PQ redeviendrait ainsi le favori dans l’est du Québec. La vague caquiste de 2022 avait balayé les indépendantistes de la région, hormis le Gaulois Pascal Bérubé à Matane. Avec de tels chiffres, les circonscriptions de Gaspé, Bonaventure, Rimouski et Duplessis (sur la Côte-Nord) pourraient être reprises des mains de la CAQ.

Reste que les prochaines élections générales n’auront lieu que dans une petite éternité (1 208 jours pour être exact). Rien pour déterminer d’avance les couleurs de la prochaine Assemblée nationale. Cependant, les mouvements dans les intentions de vote peuvent fortement influencer la manière dont le gouvernement interagit avec les autres partis d’opposition et ainsi recalibrer les dynamiques entre les formations. Par exemple, bien que la CAQ domine toujours ses rivaux, François Legault pourra difficilement continuer de prétendre que son adversaire principal à l’Assemblée nationale est Québec solidaire, comme il s’est plu à le croire (et à le faire croire) dans les dernières années et lors de la dernière campagne.

Ce sondage Léger consacre plutôt le Parti québécois comme l’adversaire direct du gouvernement actuel. Bien campé en deuxième place à titre de parti, et avec un chef, Paul St-Pierre Plamondon, qui se classe aussi deuxième après François Legault quant à savoir qui ferait le meilleur premier ministre, le PQ déloge QS du viseur caquiste. D’autant plus que les gains péquistes se font en territoire caquiste.

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Pour consulter les détails de cette projection, visitez la page de Qc125. Vous trouverez la liste des 125 circonscriptions ici.

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Il reste à savoir après effet à Québec surtout de la tromperie du 3ème Lien si ce sondage à 3 ans de l’élection traduit surtout si F.Legault et PSPP sont devenus les seuls aspirants premiers ministres qui comptent?
Le futur chef du PLQ démontrerait également si l’impression politique ou charisme détermine 30% des votes? Il reste aussi les programmes politiques en importance lorsque le PLQ est à Ottawa dans sa tête de parti. Le leadership c’est un facteur capacité de ralliement.

Il est normal que la popularité de la CAQ soit à la baisse actuellement. Une partie de la population est en colère et ils voient dans l’appui au PQ la meilleure façon de l’exprimer. Mais il y a loin de la coupe aux lèvres entre exprimer sa colère à 3 ans et demie des élections et voter réellement pour le parti lors de cette future élection.

Le PQ a une certaine notoriété actuellement en raison de la popularité de PSPP, parce que ses engagements sont vagues et théoriques et que les élections sont éloignées. Mais lorsque son engagement de tenir un référendum dans le mandat suivant son élection sera mis sous les projecteurs et qu’il sera attaqué par ses opposants, les gens vont probablement hésiter à prendre le risque de s’engager à nouveau dans un processus qui va diviser la population.

Les fédéralistes modérés et les nationalistes mous qui ont voté pour la CAQ à la dernière élection appuient peut-être actuellement le PQ parce qu’ils sont frustrés par les promesses brisées mais ils auront sans doute oublié tout ça dans trois ans et ils vont probablement retourner à la douce sécurité que leur promettra la CAQ à ce moment.

Le problème du PQ est aussi que l’on ne voit pas l’équipe derrière le chef qui serait en mesure de prendre le pouvoir. Le chef est allumé et compétent mais il devra réunir les bonnes personnes s’il veut devenir une alternative crédible au gouvernement actuel.

La CAQ a pris le pouvoir aux dernières élections parce que le parti avait des candidats crédibles pour remplir les missions de l’état. On ne voyait pas le même niveau de compétence chez les libéraux, les péquistes et les qsistes.

Je remarque qu’avec 10% de plus de voix que les libéraux selon le sondage, le PQ devrait se contenter d’environ 12 sièges (contre 18 pour le PLQ et 13 pour QS qui aurait l’appui de 16% des électeurs contre 13% pour le PLQ). C’est encore pire si on compare avec la CAQ car avec un écart de 14% le PQ devrait se contenter de 12 sièges contre 82 pour la CAQ. On comprend tout de suite les motifs de François Legault d’avoir tourné le dos à la proportionnelle et renié sa parole et sa signature.

Par contre, si la démocratie vous intéresse, cette situation est certainement son antithèse et on peut parler de fausse démocratie ou de royaume de broche à foin où un potentat qui récolte moins de 40% des suffrages a 100% du pouvoir pendant son règne.