La Corée du Nord est-elle une menace pour la paix internationale?

Le 12 décembre dernier, la Corée du Nord procédait avec succès au lancement d’une fusée visant à placer un satellite en orbite, ignorant une nouvelle fois les avertissements répétés d’une grande partie de la communauté internationale. Cette dernière, avec en tête les États-Unis, considère que de tels lancements constituent en réalité des tests de missile à longue portée, puisque la technologie employée dans les deux cas est essentiellement la même. Comme ces missiles à longue portée pourraient potentiellement atteindre l’Alaska et la côte Ouest des États-Unis, la réussite nord-coréenne n’augure rien de bon pour l’avenir. Doit-on aujourd’hui craindre la Corée du Nord?

En plus de son arsenal de missiles, le régime de Kim Jong-Un posséderait aujourd’hui entre six et douze armes nucléaires, et continue d’augmenter ses stocks de plutonium et d’uranium nécessaires à la fabrication d’armes supplémentaires. De plus, comme le pays a quitté en 2003 le Traité de non-prolifération nucléaire, on ne peut la soumettre à des inspections de ses installations. En outre, Pyongyang n’a pas hésité dans les dernières années à commettre des actes d’agression contre ses voisins, comme en font foi le torpillage d’un navire sud-coréen ainsi que l’attaque de l’île Yeonpyeong en Corée du Sud en 2010.

Si, à première vue, la menace posée par la Corée du Nord semble importante, il est essentiel de la remettre en perspective. Presque toutes les actions posées par Pyongyang visent à assurer la survie du régime de Kim Jong-Un, qui perçoit les États-Unis comme une menace existentielle. Ainsi, les leaders nord-coréens, contrairement à une idée passablement répandue, ne sont pas irrationnels. Il est donc hautement improbable que ceux-ci utilisent leurs armes nucléaires ou effectuent des frappes de missiles balistiques à l’étranger, puisque ce genre d’action entrainerait presque automatiquement des frappes militaires de la part des États-Unis et de la Corée du Sud, et conséquemment, la fin du régime de Kim.

Le réel danger émanant de la Corée du Nord provient plutôt de la prolifération des technologies liées aux missiles balistiques et aux armes nucléaires. Comme la Corée du Nord figure déjà parmi les principaux exportateurs de systèmes de missiles balistiques, le succès apparent du dernier lancement nord-coréen pourrait donner un élan supplémentaire à ses ventes d’armes. Depuis les années 80, la Corée du Nord collabore étroitement avec l’Iran dans le développement de missiles balistiques. Avec l’aide de Pyongyang, Téhéran pourrait à son tour tenter d’obtenir la capacité de lancer des missiles à longue portée. Outre l’Iran, Pyongyang a déjà vendu des missiles à la Syrie et a contribué à la construction d’un réacteur nucléaire dans le pays, lequel fut détruit par Israël en 2007.

Compte tenu de la situation économique désastreuse de la Corée du Nord, le risque est bien réel que celle-ci soit disposée à vendre sa technologie à quiconque serait prêt à payer le prix demandé. Et pendant que la communauté internationale se demande comment réagir au lancement du satellite nord-coréen, Pyongyang continue à développer ses capacités nucléaires…

Zone démilitarisée : la Corée du Sud vue du Nord | Photo : Benoit Hardy-Chartrand
Zone démilitarisée : la Corée du Sud vue du Nord | Photo : Benoit Hardy-Chartrand

Benoît Hardy-Chartrand
Chercheur en résidence, Observatoire de géopolitique