
Un gouvernement libéral imposerait une taxe sur les combustibles fossiles, comme le mazout, le diesel, le charbon et le gaz naturel. Les combustibles dont le contenu en carbone est élevé — tel le charbon, plus polluant quand on le brûle que le gaz naturel — seraient davantage taxés.
Combien ?
La taxe sur le carbone serait d’abord fixée à 10 dollars la tonne d’émissions de gaz à effet de serre (GES). Elle augmenterait ensuite de 10 dollars par année, pour atteindre 40 dollars la tonne au bout de quatre ans.
Pourquoi ?
Les libéraux veulent inciter les particuliers à modifier leurs habitudes de consommation. Les prix des biens et des services dont la production nécessite une grande quantité de combustibles fossiles devraient augmenter, ce qui pousserait les particuliers à réduire leurs achats de biens et de services polluants ou à privilégier ceux qui sont moins dommageables pour l’environnement.
Les libéraux espèrent aussi inciter les entreprises à prendre plus rapidement le
« virage vert ». Celles qui émettent beaucoup de GES auraient avantage à investir dans les technologies et les modes de production propres. Ce faisant, elles paieraient moins de taxes et deviendraient plus concurrentielles.
Qui serait touché ?
On appliquerait le principe du pollueur-payeur. Les propriétaires des maisons chauffées à l’hydroélectricité, largement majoritaires au Québec, seraient ainsi moins touchés que ceux des résidences chauffées au mazout ou au gaz naturel. Les agriculteurs et les habitants des régions éloignées seraient davantage visés par une taxe sur le carbone. Le Tournant vert prévoit donc de leur verser un « crédit rural vert ».
Le prix à la pompe devrait-il augmenter ?
En théorie, non. L’essence pour les véhicules serait exemptée, car la taxe d’accise fédérale de six cents le litre équivaut déjà à une taxe sur le carbone de 42 dollars la tonne de GES.
Une taxe « neutre » ?
La taxe sur le carbone serait « fiscalement neutre », promettent les libéraux. Elle ne devrait donc pas, en théorie, alourdir le fardeau fiscal de l’ensemble des Canadiens. Si cette taxe rapportait 15 milliards de dollars, comme prévu, un gouvernement Dion réduirait d’une somme équivalente l’impôt des particuliers et des entreprises.
Le vérificateur général s’assurerait chaque année de la « neutralité fiscale » de cette taxe.
À quand une bourse du carbone ?
Le Tournant vert imposerait aussi aux industries un plafond d’émissions de gaz à effet de serre. Pour respecter cette limite, les entreprises pourraient soit diminuer leur production, soit produire autant ou davantage de biens en trouvant le moyen de réduire leurs émissions de GES. Elles pourraient aussi acheter des « droits de polluer » auprès d’entreprises moins énergivores, par l’intermédiaire d’une Bourse du carbone. La mise en place d’un tel système pourrait toutefois prendre plusieurs années.
Les forces de la « taxe verte »
S’inspire des meilleures stratégies européennes en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre. En place depuis déjà une dizaine d’années, ces stratégies ont permis à l’Europe de prendre une avance technologique dans le domaine de l’efficacité énergétique.
Consacrerait le principe du pollueur-payeur et amorcerait une transition du régime fiscal vers l’« écoconditionnalité », qui récompense les bons consommateurs et pénalise les autres.
Redorerait le blason du Canada sur la scène internationale. Le Tournant vert, promettent les libéraux, permettrait, d’ici 2020, de réduire les émissions de GES de 20 % à
25 % sous le niveau de 1990. Le Canada respecterait ainsi les recommandations du Groupe intergouvernemental d’experts sur le climat de l’ONU. Il pourrait aussi réintégrer la communauté des 163 pays signataires du protocole de Kyoto (dont le gouvernement conservateur de Stephen Harper s’est dissocié).
Les faiblesses de la « taxe verte »
Serait-elle vraiment efficace ? Selon nombre d’experts, l’augmentation des prix des biens et des services visés par cette taxe ne serait peut-être pas assez élevée pour entraîner un changement notable dans les habitudes de consommation des gens.
Combien coûterait-elle à gérer ? Les mécanismes de perception, d’inspection et de contrôle du Tournant vert risquent d’alourdir la machine bureaucratique.
Les électeurs voudront-ils d’une nouvelle taxe ? Même si elle était fiscalement neutre, la « taxe Dion » provoquerait nécessairement une hausse des prix d’une foule de biens et de services. Un risque politique, pour les libéraux…