L’auteur est un ancien stratège conservateur, ayant conseillé l’ex-premier ministre Stephen Harper lors de trois élections générales. Il est vice-président de TACT, une agence de relations publiques.
Partons de la prémisse suivante : n’importe quel résultat autre qu’une victoire majoritaire aura un effet irréversible sur le leadership de Justin Trudeau à la tête du Parti libéral, ainsi qu’en tant que chef du gouvernement.
Une défaite le forcerait à quitter la vie politique, alors qu’une victoire minoritaire aurait l’effet d’affaiblir fortement sa position.
Sans qu’il y ait encore besoin de paniquer dans l’équipe de Justin Trudeau, il y a toutefois des ajustements urgents à apporter à sa campagne avant que le vent ne change complètement de côté. L’aiguille des sondages commence même à bouger en faveur des conservateurs et des néo-démocrates.
Le premier ministre a déclenché les élections en expliquant que le Canada était à un tournant et que les Canadiens avaient le droit de s’exprimer à propos de ce qu’ils souhaitent pour « rebâtir le pays en mieux. »
L’argument est légitime, compte tenu de tous les bouleversements qu’a occasionnés la pandémie depuis la dernière année et demie. Il est vrai que son gouvernement n’a pas le mandat moral d’entreprendre des réformes majeures en économie, en santé ou en environnement en prétextant les conséquences de la pandémie. Il est donc souhaitable que les électeurs se prononcent. J’en suis.
Mais il y a un problème : comme on dit au Québec, les bottines ne suivent pas les babines. Les annonces de Justin Trudeau depuis le début de la campagne électorale concernent presque toutes des mesures que son gouvernement avait commencé à mettre en avant ou qu’il aurait très bien pu appliquer sans aller en élections.
Un exemple parmi tant d’autres : les libéraux n’avaient pas besoin de demander un nouveau mandat pour financer l’embauche de 1 000 pompiers afin de lutter contre les feux de forêt.
Bref, si le Canada est à l’heure des choix pour rebâtir en mieux, alors où sont les nouvelles idées surprenantes, ambitieuses et urgentes ? Justin Trudeau doit expliquer quelles sont ces décisions névralgiques qu’il faut prendre et en quoi nous sommes à la croisée des chemins. Il doit montrer, par ses propositions, pourquoi il fallait une campagne électorale maintenant.
Le simple fait qu’après 10 jours, on parle encore de la raison du déclenchement des élections est un échec. Si les idées du premier ministre ne justifient pas en elles-mêmes la nécessité d’une campagne, les libéraux seront vulnérables jusqu’aux élections. Même quand ils seront à l’offensive en attaquant les conservateurs sur des enjeux moraux comme le droit à l’avortement ou la vaccination.
Si Justin Trudeau craignait autant que le droit des femmes recule advenant l’élection des conservateurs, comme il le laisse entendre en campagne, alors pourquoi diable avoir déclenché des élections, puisque le NPD était visiblement prêt à appuyer son gouvernement minoritaire pour encore plusieurs années ? La meilleure façon de protéger ces droits qui sont apparemment à risque n’était-elle pas de continuer à gouverner ?
Si la vaccination obligatoire était si cruciale aux yeux du premier ministre, alors pourquoi ne pas l’avoir simplement déjà imposée plutôt que de déclencher des élections et d’improviser une nouvelle mouture de cette idée toutes les 48 heures ?
Dans la même veine, le système de garderies à l’échelle du pays, souhaité par de nombreuses familles canadiennes et finalement mis en branle par les libéraux, est menacé par le déclenchement des élections.
Bref, les libéraux ne peuvent pas prétexter l’importance et l’urgence pour les électeurs de se prononcer lors d’élections générales si leur offre politique se résume à des propositions qui pouvaient être mises en œuvre sans demander un nouveau mandat de gouvernement.
Au contraire, pour être cohérent, le premier ministre Trudeau doit présenter les nouvelles grandes idées pour lesquelles il est justifié de dissoudre le Parlement et de demander un nouveau mandat à la population.
Justin Trudeau a quelques jours, tout au plus, pour s’ajuster. Car le succès pour le premier ministre libéral se mesurera exclusivement par une victoire majoritaire.
Après trois victoires électorales, mais deux minoritaires consécutives, il deviendrait alors improbable que Justin Trudeau soit en mesure de remporter une nouvelle majorité un jour. Les aspirantes et les aspirants à son poste au sein des troupes libérales entameraient les manœuvres pour lui montrer la sortie avant les élections suivantes. Plusieurs éminences libérales seraient d’avis qu’il serait préférable d’avoir une nouvelle personne pour diriger le parti et le pays. Et cela pourrait presser, puisque les partis d’opposition seraient tentés de renverser leur adversaire blessé et de lui porter le coup politique fatal.
À moins que les rouges se retrouvent dans l’opposition. Auquel cas, ce serait la fin.
Monsieur Plante trouve que l’argument à l’effet que «Le premier ministre a déclenché les élections en expliquant que le Canada était à un tournant et que les Canadiens avaient le droit de s’exprimer à propos de ce qu’ils souhaitent pour « rebâtir le pays en mieux ». » est légitime? Ça part mal une discussion puisque ce prétexte n’est rien d’autre que de la BS, de la poudre aux yeux. La vraie raison c’est que le PM Trudeau voulait une majorité pour ne plus avoir à composer avec un autre parti, il ne voulait plus gouverner avec une espèce de consensus.
Ça en dit long sur la mauvaise foi du PM qui, de plus, a tellement renié de promesses électorales qu’on a du mal à en faire la liste. Il parle vert et écolo puis achète un pipeline… Il n’est donc pas étonnant qu’il n’ait rien à offrir pour soi-disant rebâtir le pays! Même s’il finisssait par pondre un programme dans ce sens, personne ne pourrait le croire puisque le déclenchement des élections n’était qu’un prétexte et que sa crédibilité s’est complètement évaporée.