Les intentions secrètes de François Legault

Ses rencontres avec les ministres et les chefs d’opposition ne servent pas qu’à nourrir son fil Twitter. À plusieurs égards, François Legault en profitera stratégiquement.

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Dominic Vallières a, pendant plus de 10 ans, occupé les postes d’attaché de presse, porte-parole, rédacteur de discours et directeur des communications auprès d’élus de l’Assemblée nationale et des Communes (Parti québécois, Bloc québécois, Coalition Avenir Québec). Il est directeur à l’agence TACT et s’exprime comme analyste politique à QUB radio.

Peut-être l’avez-vous vu sur son compte Twitter : le premier ministre Legault rencontre depuis quelques semaines ses ministres et les chefs des différents partis d’opposition.

Certains considèrent cela comme un exercice de communication stérile. Il s’agit plutôt d’une manière d’évaluer les gens autour de lui, tout comme en face. Autrement dit, il tente de voir venir.

D’abord, le rendu. Toujours une photo dans la même salle de réunion. On y trouve, invariablement, François Legault, le ou la ministre et des membres du personnel politique. Parfois, derrière, on remarque aussi des membres de la haute fonction publique. 

Lorsqu’il a dévoilé la composition de son conseil des ministres, le premier ministre a signifié qu’il demanderait à chacun des appelés d’établir rapidement trois priorités par ministère. Ces rencontres, officiellement, servent donc à vérifier si les élus ont fait leurs devoirs, s’ils ont leurs dossiers en main et s’ils savent où ils s’en vont. 

Mais le premier ministre est un parlementaire expérimenté. Il sait que pour réussir, un ministre a besoin de trois ingrédients. D’abord, être studieux. Ensuite, s’assurer que son directeur de cabinet et lui se complètent bien. Finalement, avoir une relation féconde avec son ou sa sous-ministre.

Ce sont surtout ces éléments qui intéressent François Legault et son équipe à ce stade. Ils noteront avec attention qui occupe le devant lors de la rencontre. Un sous-ministre qui prend trop de place laisse entendre que le ministre ne maîtrise pas ses dossiers. Un directeur de cabinet qui ne fait qu’être d’accord avec les propos de son ministre peut passer pour un béni-oui-oui. C’est donc un exercice plus périlleux pour les invités qu’il n’y paraît sur les photos…

Au Québec, contrairement à certaines démocraties parlementaires, le premier ministre est celui qui répond au plus grand nombre de questions en Chambre, avec au minimum 40 réponses à donner chaque semaine d’activités parlementaires. Afin d’être préparé adéquatement, il doit détenir une connaissance minimale de tous les sujets. En cuisinant ses ministres, François Legault peut acquérir lesdites connaissances… mais aussi prévoir qui épatera la galerie, qui fera bonne figure et qui aura plus de difficultés. Les rencontres qu’il mène actuellement l’aident à évaluer les qualités des joueurs de son équipe.

Dans le cas de ses rencontres avec les chefs d’opposition, le premier ministre accomplit deux choses. D’abord, il vérifie si ces derniers sont encore en train de jouer dans le film de la campagne électorale, ou si leur discours évolue.

À entendre Gabriel Nadeau-Dubois parler d’environnement et Éric Duhaime se féliciter d’exister aux yeux de François Legault, le premier ministre peut dormir tranquille : le discours n’a pas trop changé. Ces observations l’aideront dans la préparation des périodes de questions et des points de presse à venir.

De plus, alors qu’il dispose d’une très large majorité à l’Assemblée nationale et qu’il est assuré de faire passer les projets de loi qu’il désire, cela lui permet de jouer la carte du grand démocrate. Il ne lui reste plus qu’à emprunter une idée d’un de ses adversaires et il pourra dire qu’il est, sans aucun doute, à l’écoute des propositions de tous.

L’ensemble des informations que récolte François Legault depuis quelques semaines ne peut ainsi que lui conférer un avantage pour l’année à venir. Au-delà de nourrir son fil Twitter, l’utilité est réelle. 

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«…cela lui permet de jouer la carte du grand démocrate». Non, c’est l’antithèse d’un grand démocrate quand il promet de démocratiser le régime électoral bancal que nous avons hérité du colonisateur britannique et qu’il renie sa promesse avec des prétextes risibles. Clairement, ce «grand démocrate» n’a fait cette promesse que pour obtenir le pouvoir et une fois obtenu sa majorité avec environ 40% des votes, il a renié sa promesse et ses principes.

Ses rencontres avec les chefs des oppositions c’est simplement de l’opportunisme politique et n’a rien à voir avec la démocratie.

Tout pour continuer à alimenter le cynisme.. La CAQ et le pouvoir quasi absolu entre les mains d’un Chef au penchant autoritaire certain ça n’augure rien de bon. La CAQ a beau jeu pour exercer un mandat sans contre pouvoir. Et c’est la démocratie qui va en ressortir affaiblie .. et pourquoi pas? N’est ce pas la tendance en Occident?