
Les récriminations continues entre l’administration Obama et le gouvernement du premier ministre Netanyahou illustrent un niveau de tension particulièrement élevé entre les États-Unis et Israël.
Alors que le premier ministre doit prononcer un discours ce mardi devant le Congrès, à Washington, cette vague d’inimitiés entre les deux alliés — motivées par des querelles partisanes — nuit à une discussion essentielle et constructive sur deux dossiers cruciaux : l’accord apparemment imminent sur le nucléaire iranien et la stratégie américaine pour le Moyen-Orient.
Une Maison-Blanche en campagne
Depuis quelques semaines, la Maison-Blanche ne manque pas une occasion de souligner que le comportement de Benyamin Netanyahou nuit à la relation entre les États-Unis et Israël.
Dès la confirmation de la venue du premier ministre israélien à Washington en ce début mars, à l’invitation des républicains qui contrôlent le Congrès, la Maison-Blanche a clairement fait savoir qu’aucune rencontre ne serait prévue avec le président Obama. La raison invoquée était qu’à quelques jours des élections législatives du 17 mars en Israël, l’administration ne souhaitait pas s’ingérer dans la campagne électorale.
Fin janvier, un haut responsable de l’administration Obama manifestait son irritation à l’égard de l’ambassadeur israélien à Washington, Ron Dermer, architecte de l’invitation formulée par le Congrès au premier ministre israélien. Il reprochait à ce proche de Netanyahou d’avoir privilégié les ambitions politiques au détriment de la relation entre les deux pays.
À la sortie d’une rencontre houleuse avec les représentants israéliens, début février, l’ambassadeur américain à Tel Aviv, Dan Shapiro, a laissé entendre que les affronts répétés à l’endroit de l’administration Obama finiraient par avoir des conséquences sérieuses.
Pas plus tard que le 24 février, Susan Rice, conseillère à la sécurité nationale de Barack Obama, affirma que le discours de Netanyahou devant le Congrès «instaure un degré de partisanerie qui est non seulement regrettable, mais qui peut porter atteinte à l’essence même de la relation» entre les deux pays.
Si l’administration Obama ne rencontrera pas le premier ministre Netanyahou, elle n’a pas hésité à rencontrer son principal adversaire, le chef du parti travailliste, Isaac Herzog.
Le vice-président Biden et le secrétaire d’État Kerry ont en effet eu des rencontres informelles avec lui en marge de la conférence de Munich, au début du mois de février. Herzog en a profité pour insister sur l’importance de la relation avec les États-Unis et la nécessité, pour le gouvernement israélien, d’entretenir de bonnes relations avec l’administration en place à Washington.
Il ne fait donc aucun doute que l’administration Obama espère un changement de régime à Tel Aviv, à la faveur des élections du 17 mars. En 1992, George H. W. Bush et son secrétaire d’État, James Baker, avaient connu du succès dans une démarche similaire.
Ils contribuèrent en effet à la victoire de Yitzhak Rabin contre Yitzhak Shamir en refusant à ce dernier, premier ministre sortant, une garantie de prêts pour signifier leur opposition à sa politique continue de colonisation des territoires occupés.
En 1996, les efforts de Bill Clinton pour aider Shimon Peres à défaire Netanyahou ne furent en revanche pas couronnés de succès.
Un déplacement périlleux pour Netanyahou
Si l’opinion publique israélienne n’accorde qu’une confiance modérée au président Obama en ce qui a trait au dossier iranien, celle-ci reconnaît malgré tout qu’une bonne relation entre Washington et Tel Aviv est essentielle à la sécurité de l’État hébreu. Elle pourrait être encline à sanctionner un premier ministre qu’on perçoit comme quelqu’un qui fragilise cette relation.
Par ailleurs, la population américaine considère le régime en place à Téhéran comme un ennemi avéré des États-Unis (une opinion constante depuis la crise des otages de 1979-1980). Elle n’en fait pas moins preuve de nuance quant à la politique que Washington devrait mener vis-à-vis de l’Iran.
Un sondage réalisé par la Brookings Institution à la fin de 2014 souligne qu’à peine 12 % des Américains estiment que l’Iran est le principal enjeu auquel doit faire face la politique étrangère américaine (contre 70 % pour l’État islamique). Selon une étude du Chicago Council on Global Affairs, 67 % des Américains appuient même les négociations en cours sur le dossier nucléaire. Une proportion semblable (62 %) est favorable à l’accord intérimaire en vigueur, qui restreint les activités nucléaires iraniennes en contrepartie d’une levée partielle des sanctions économiques imposées au pays.
L’appui à ce type d’accord tend à démontrer qu’une nette majorité d’Américains acceptent l’idée qu’un accord final — ou qui, à tout le moins, s’étale sur une longue période — impliquera que l’Iran conserve une partie substantielle de son infrastructure nucléaire, en contrepartie d’une levée des sanctions et d’un régime d’inspections renforcé. L’opinion américaine n’est favorable à un recours à la force armée contre Téhéran qu’advenant un échec patent de la solution diplomatique, ou alors une menace imminente et existentielle à la sécurité d’Israël.
C’est donc en tenant compte de ces positions subtiles des opinions publiques américaine et israélienne que le premier ministre Netanyahou doit concevoir son discours du 3 mars devant le Congrès. S’il apparaît comme empêchant un accord perçu comme bénéfique, il ne parviendra pas à convaincre la population américaine. Or, s’inspirant d’un Winston Churchill qui s’entête à mettre en garde ses contemporains contre une menace qu’ils se refusent à voir et à accepter, Benyamin Netanyahou est en mission.
S’il cherche à convaincre ses interlocuteurs qu’un accord avec Téhéran constitue une menace existentielle à la sécurité d’Israël, il doit dans le même temps éviter que son discours soit mal accueilli par la population américaine, au risque d’apparaître auprès des électeurs israéliens comme étant incapable de gérer la relation la plus importante pour la survie de l’État hébreu.
L’introuvable stratégie américaine pour le Moyen-Orient
Les tensions actuelles entre Washington et Tel Aviv sont en grande partie le résultat de querelles partisanes de part et d’autre.
Loin d’être assuré d’obtenir un quatrième mandat à la tête du gouvernement israélien, Benyamin Netanyahou se rend à Washington avec comme objectif d’entretenir son image de chef d’État prêt à tout pour défendre son pays.
Les républicains qui contrôlent le Congrès ne cachent pas leur plaisir d’avoir convié le premier ministre israélien dans le but d’illustrer la faiblesse et la mollesse de l’administration Obama en politique étrangère et de diviser le parti démocrate. La Maison-Blanche n’est pas en reste en ne cachant pas son espoir de changement de régime à Tel Aviv.
Un tel comportement est néanmoins dommageable — déplorable, même, tant il obstrue un débat posé sur la stratégie que l’administration Obama entendrait mettre en œuvre pour relever les défis, nombreux et pressants, qui agitent une région obstinément réfractaire à la sérénité : le Moyen-Orient.
Dans cette perspective, il apparaît essentiel que le président Obama expose clairement et vigoureusement comment l’entente — manifestement proche — entre l’Iran et les P5+1 sur le dossier nucléaire contribuera à la stabilité du Moyen-Orient.
L’accord sur le nucléaire iranien ne se traduira pas par l’abandon des ambitions de Téhéran dans ce domaine et par le démantèlement de ses infrastructures. Il doit en revanche viser les trois objectifs suivants.
Premièrement, il doit réduire les chances matérielles que l’Iran puisse se doter d’une arme nucléaire. Deuxièmement., il doit éviter une course régionale à l’armement nucléaire qui serait véritablement catastrophique. Troisièmement, il doit contribuer aux intérêts des États-Unis pour une région stabilisée, prospère, et qui ne soit plus une source de risques.
Les grandes lignes de l’accord qui pourrait être conclu d’ici la fin du mois de mars (les détails techniques devront ensuite être finalisés d’ici la fin juin) sont les suivantes : l’Iran conserve un programme nucléaire civil conséquent ; il préserve la possibilité d’enrichir du combustible nucléaire et un nombre élevé de centrifugeuses à cette fin (6 500) ; il se soumet à un programme d’inspections serrées. En vertu du respect de cette entente qui aurait une durée de 10 à 15 ans, Téhéran verrait les sanctions être progressivement levées.
Contrairement à l’ambition initiale, Téhéran conserverait donc son programme nucléaire. Les P5+1 chercheraient simplement à s’assurer de bénéficier d’un délai jugé raisonnable pour réagir (sanctions, préparation d’une intervention militaire), advenant le cas où Téhéran décidait de s’engager dans la voie du nucléaire militaire. Ce délai serait d’un an environ (comparé à une période de deux à trois mois, selon les estimations actuelles).
Une telle mesure est fortement susceptible d’inciter les adversaires de l’Iran, en particulier l’Arabie saoudite, à s’engager dans une course au nucléaire — un phénomène qu’un accord avec Téhéran devait précisément éviter.
Il est donc primordial que Washington clarifie ses intentions auprès de ses partenaires moyen-orientaux, leur donne de solides garanties de sécurité et, plus fondamentalement, expose une stratégie claire pour l’avenir de la région.
En l’espèce, l’administration Obama a encore beaucoup (trop ?) à faire dans le peu de temps qu’il lui reste.
* * *
À propos de l’auteur
Julien Tourreille (@JTourreille) est directeur adjoint à l’Observatoire sur les États-Unis de la Chaire Raoul-Dandurand en études stratégiques et diplomatiques, qui compte une trentaine de chercheurs en résidence et plus de 100 chercheurs associés issus de pays et de disciplines divers et qui comprend quatre observatoires (États-Unis, Géopolitique, Missions de paix et opérations humanitaires et Moyen-Orient et Afrique du Nord). On peut la suivre sur Twitter : @RDandurand @UQAM.
Benyamin Netanyahou est malheureusement l’ennemi avéré d’une paix juste et d’une coexistence pacifique entre un état palestinien et israélien. Contrairement aux voeux de la communauté internationale il poursuit inéluctablement une politique de colonisation des territoires palestiniens occupés qui bloque tout processus de paix viable.
Comment le gouvernement Harper peut-il appuyer inconditionnellement un faucon qui met a ce point en péril la paix mondiale ?
Il faut juste espérer pour le mieux-être d’Israel et du monde que les Israéliens ne réélisent pas monsieur Netanyahou.
Quand on apprend dans le documentaire ( http://ici.radio-canada.ca/tele/zone-doc/2014-2015/episodes/350292/droite-religieuse-canada )
que la base évangiliste du parti de M. Harper attend le retour libre de tous les croyants de religion juive en Israël pour que leur dieu de l’évangile leur procure une nouvelle Terre…. M. Harper n’a donc, pas d’autres choix.
En attendant, même si la pollution et le réchauffement du climat n’est pas à craindre, pour de très bonnes raisons… Il a dû quand même museler ces méchants scientifiques marxistes, écologistes et trop bavards qui inquiètaient malicieusement une population désireuse de pouvoir dormir en paix.
D’ailleurs la C-51 pourra, à l’avenir, permettre de les ramener dans le DROIT chemin en les accusant de NUIRE à la prospérité nationale du Canada.
LAW & ORDER, que c’est donc rassurant…. ( 😉
« …que la base évangiliste du parti de M. Harper attend le retour libre de tous les croyants de religion juive en Israël… »
Oui, je suis déjà tombé sur cette curieuse vultgate, mais en version américaine. Tous les Juifs doivent quitter les États-Unis pour Israel. Je trouve ça particulier, mettons. Quant on enlève les mielleux chants d’amour, on entend un tout autre air que celui que le preacher croit sincèrement chanter. Ça dit: « Les Juifs doivent partir ». J’ignorais que nos conservateurs l’avaient entonné, cet air-là. Peut=être qu’ils n ‘ont jamais entendu parler de philosémitisme à double fond ?
Non, Non Marc,
Regarde le documentaire ( il est aussi sur Tout.tv ), ils ne disent pas qu’ils doivent partir…. Voyons donc…. Ils disent : » quand ils auront la POSSIBILITÉ de le faire, i.e. de rentrer dans leur pays avec assez de place pour tous…. » ( C’est une condition pour que la Prédiction du cadeau d’une Nouvelle Planéte… )
Quoiqu’il en soit, c’est la toile de fond de ce courant idéologique néo-conservateur qui vient de l’amérique profonde ET des Républicains du TEA PARTY qui recueillent des MILLIONS de $$$ pour financer les élections en toute légalité ( SUPER PACK ) , dont Harper s’inspire….
Alors moi, j’ai bien plus peur de cela que des coupeurs de têtes….
Le néo-libéralisme à côté de cela, c’est de la petite bière… Au moins eux ne se réclament pas encore du CRÉATIONNISME !!! ( 😉
Tiens, tout à coup, me revient la citation… Le XXI siècle sera religieux ou ne sera pas…. WOW… Quelle Pagaille….
Merci pour le lien.
Vraiment très instructif.
Après avoir tout écouté , je suis abasourdi de tant d’ignorance et de bêtise collective…..
La radicalisation contre Israël depuis près de 12 ans est en progression constante partout en Europe et Amérique du Nord. Leur maudis operandi de ne faire qu’a leur tête s’estompe enfin, il est à peu près temps mais le léchage de bottes des américains envers Israël a toujours été en embûche de taille. Hors les États-Unis se sont fait plusieurs amis dont le discours est de plus en plus indifférent à l’encontre des États-Unis.
La débâcle de 2008 fut en grande partie bien gérée par des juifs, tous sur les conseils d’administration des grandes banques si ne n’est que l’histoire Maddof qui vient s’y ajouter parmi d’un grand nombre de ces magouilleurs. Ceci mis a part le fait que les politiques monétaires des USA sont entre les mains de juifs dont Summers, Poulson, Geithner etc depuis des décennies tout comme les secrétaires d’état de la défense nationale, de la CIA, du FBI, des affaires extérieures en fait tout ce qui contrôle la Maison Blanche. Va-t’on finir par comprendre un jour ?
La taxe “juive” sur 80% des aliments de piètre qualité tels que “le choix du président” sans compter tout ce qui touche l’alimentation commence à faire des traces indélébiles dans la pensé des gens. C’est l’histoire des années de 1910 et le grand crash de 1929 qui revient nous hanter mais cette fois-ci avec plus de d’ampleur au niveau des dégâts car celui de 2008 est vraisemblablement qu’une répétition générale de ce qui se trame.
Je ne crois pas que cela se termine d’ici peu car l’antisémitisme grandit rapidement depuis 2003 ce qui rappel l’époque des années 20, mais un problème coûte toujours plus lorsqu’il est répété.
Wentworth Roger : «Je ne crois pas que cela se termine d’ici peu car l’antisémitisme grandit rapidement depuis 2003… »
Oui, et vous y travaillez activement avec l’habituelle antienne sur les « banquiers juifs » (les Juifs non banquiers et les banquiers non-juifs doivent pousser un soupir de soulagement).
« …ce qui rappel (sic) l’époque des années 20, mais un problème coûte toujours plus lorsqu’il est répété.»
Il ne se répétera pas, je vous en fiche mon billet. Oui la bête est enceinte ; mais elle va avorter je vous le garantis.
Non mais quel espèce d’effronté ce «Bibi». Oser accepter une invitation à s’adresser au Congrès sans passer par la Maison Blanche n’est rien de moins qu’un camouflet au président des USA. Ça prend un sacré culot pour insulter de la sorte le président Obama.. Cet homme est aussi «baveux» que l’ineffable Kim Jung Un et le pire c’est qu’il va s’en tirer sans trop de mal. Attendons voir si les Américains vont élire un(e) président(e) démocrate. Si jamais un républicain met la main sur la maison Blanche, ça va être du joli.
Malheureusement, avec le néo-libéralisme à la mode, la Consécration de la société marchande et l’hyper-individualisme acclamés par de plus en plus de perroquets médiatiques ( pardonnez-leur car ils ne savent…..) au NOM de la LIBARTÉ mur à mur….
La voie est pavée pour les Républicains ….
La Cour Pénale ne fait son travail convenablement autrement cette Ordure de Satanyahu devrait etre en tolle pour le restant de sa vie ..