Prostitution, constitution et banalisation

Au plan social, volontairement ou non, la décision de la Cour suprême accrédite une conception de la prostitution en tant que métier comme un autre. 

Photo: Tony Bock/Toronto Star/Getty Images
Photo: Tony Bock/Toronto Star/Getty Images

C’est évidemment une bombe que la Cour suprême a lâchée vendredi : trois articles de loi importants qui «encadrent» la prostitution sont jugés invalides parce qu’ils violent le droit à la sécurité des prostituées, garanti par l’article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés.

La décision était relativement prévisible, vu les jugements des tribunaux inférieurs, mais elle demeure historique.

La prostitution comme telle — le fait d’échanger des faveurs sexuelles contre rémunération — a toujours été légale au Canada. Les articles de loi déclarés invalides vendredi visaient des activités périphériques à la prostitution, soit la tenue d’une maison de débauche, le proxénétisme et la sollicitation.

Ces dispositions n’ont jamais vraiment eu pour objectif d’encadrer et de protéger les prostituées ou leurs clients, mais plutôt de cacher la prostitution et de la rendre plus difficile et périlleuse. Les lois en cause imposaient des conditions de travail plus difficiles et dangereuses aux prostituées au nom de la protection de l’ordre public et de la prévention des nuisances.

Analysant ces lois en vertu de la Charte des droits et libertés, la Cour a conclu que l’objectif d’«assainissement social» poursuivi n’était pas suffisant pour justifier les atteintes aussi sérieuses aux droits individuels des prostituées — et notamment leur droit à la sécurité. Dans les mots de la juge McLachlin :

«Les préjudices subis par les prostituées (…) sont totalement disproportionnés à l’objectif de réprimer le désordre public. Le législateur a le pouvoir de réprimer les nuisances, mais pas au prix de la santé, de la sécurité et de la vie des prostituées.»

La Cour a toutefois suspendu la déclaration d’invalidité pour un an, histoire de donner au gouvernement fédéral le temps de revoir l’encadrement légal de la prostitution au pays.

Dans le cas de l’interdiction de vivre des produits de la prostitution, le gouvernement pourra réécrire la loi de manière plus précise, afin qu’elle vise uniquement les activités d’exploitation et non celles de protection. (En pratique, le critère ne sera pas facile à appliquer.)

Le gouvernement pourra aussi tenter de préciser la portée de l’interdiction de communiquer à l’article 213(1)c) du code criminel pour qu’il soit limité à la sollicitation explicite et qu’il n’englobe pas les communications de «vérification sécuritaire» — mais, encore une fois, ce ne sera pas évident.

Quant aux maisons de débauche, on voit mal comme le gouvernement pourrait les interdire sans contrevenir au jugement de vendredi. (Elles seront sans doute légalisées, mais confinées à certains secteurs.)

Le jugement de la Cour est unanime et rédigé par la juge en chef. Et même s’il peut paraître audacieux ou révolutionnaire, il s’explique assez facilement dans le cadre d’une analyse en vertu de la Charte, qui place la barre haut quand vient de temps de limiter les droits et libertés individuelles au nom de l’intérêt public.

(Ce n’est pas que la Charte des droits ne reconnaisse pas l’importance de l’intérêt public ou la possibilité qu’on puisse validement l’invoquer pour restreindre les libertés individuelles. Son article 1 stipule clairement que les droits protégés peuvent être «restreints, dans des limites raisonnables, dans le cadre d’une société libre et démocratique». Ces restrictions, et les arguments invoqués pour les justifier, sont toutefois analysées de manière critique et rigoureuse par les tribunaux, pour s’assurer que l’intérêt public est véritablement en cause et que les violations de droits n’émanent pas plutôt — sous le couvert d’un « bien commun » allégué — d’une volonté irrationnelle ou disproportionnée de la majorité d’imposer ses normes et ses valeurs à une minorité. Autrement dit, la Charte ne permet pas qu’une loi viole les droits d’une personne simplement parce que la majorité ressent un malaise ou voudrait se protéger d’une nuisance quelconque.)

A priori, le jugement de vendredi semble entraîner deux conséquences : la première, juridique, et la seconde plus sociale.

Au plan juridique, la décision de la Cour rend plus cohérentes les lois canadiennes qui entourent la prostitution. Dans la mesure où la prostitution elle-même est légale, il était difficilement justifiable de la rendre plus dangereuse pour préserver certaines sensibilités sociales. La Cour suprême affirme ainsi que le gouvernement a échoué à démontrer en quoi l’intérêt public justifiait les interdictions visées par le recours, qui violent le droit à la sécurité des prostituées en rendant plus dangereuse une activité par ailleurs légale.

Au plan social, volontairement ou non, la décision de la Cour suprême accrédite par ailleurs une conception de la prostitution en tant que métier comme un autre. Il s’agit toutefois d’un mirage dangereux, comme le serait d’affirmer que le saut en chute libre et le jogging sont «deux activités sportives» sans préciser que la première met votre vie en danger, alors que la seconde est relativement inoffensive.

Or, la prostitution n’est pas inoffensive, et les dangers de la banalisation sont réels. La prostitution détruit des vies. Parfois littéralement ; plus souvent en éliminant durablement l’estime de soi et la possibilité de construire des relations humaines enrichissantes et fécondes.

Il va de soi qu’il n’appartient pas aux tribunaux d’interpréter les lois de manière à favoriser l’épanouissement personnel. Ce n’est pas leur rôle. Dans ce sens, la décision de la Cour suprême est rigoureusement correcte, juste et compréhensible.

Espérons toutefois que ce jugement, nécessairement juridique, n’aura pas pour effet de banaliser encore davantage un «choix» qui s’avère souvent celui de l’autodestruction et du désespoir.

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L’article 7 de la Charte des droits et des libertés ne laisse aucune place à interprétation d’un point de vue juridique. Au Canada, on se doit de respecter la vie et les lois sont faites pour la supporter (la vie) ; nous ne pouvons comme société tolérer que des personnes pour toutes sortes de raisons soient plus à risques que d’autres.

C’est le cas de celles et ceux qui tirent leurs ressources par le commerce de leur corps. Ce ne sont pas seulement des femmes, ce sont des hommes et des transgenres sans oublier celles et ceux qui passent trop souvent sous le radar : les mineurs et même les enfants.

Nous ne pourrons jamais revendiquer le titre de : « société évoluée » tant et aussi longtemps que nous ne traiterons pas avec respect les personnes qui vivent de ce commerce. Reste à trouver ou à découvrir le cadre qui convienne le mieux pour assurer à ces personnes une vie et un mode de vie décents. Je pense que les mieux placés pour établir avec les autorités le cadre et les conditions les plus adéquates pour leurs activités, c’est de se concerter avec les principaux (ou principales) intéressés.

Alors certainement dans un monde parfait, il serait idéal que les gens aient tous plus de choix pour mener des vies meilleures et plus édifiantes. Il serait parfait que les hommes et les femmes n’aient nullement besoin d’avoir accès à ce genre de services. Quoique dans divers cas la chose puisse par divers aspects être justifiée.

Au fond, ce qui est immoral, ce n’est pas la prostitution en tant que telle, c’est plutôt que ce sont toujours les mêmes qui aient accès à ce genre de services, tandis que d’autres n’y auront jamais, désespérément pas accès. Établissant par le fait même que nous ne sommes égaux en absolument rien ou peut-être si : devant Dieu ou devant la Mort, tout dépendant de vos orientations spirituelles 🙂

Ceci peut-être expliquant en partie cela.

Je suis d’accord avec l’ensemble de votre commentaire, (Une fois n’est pas coutumes … 😉 ).

Mais de dire qu’une action morale devient immorale juste parce qu’on la répète plus souvent qu’un autre là je ne vous suis plus. Je trouve que le problème de la prostitution viennent des personnes qui gravitent autour comme les proxénètes, les pimps et les grenouilles de bénitier. Enlevez ces troubles fêtes, ces criminels et la prostitution devient une activité comme une autre qui peut et doit être encadrée et règlementée.

La prohibition qui a sévi notamment aux USA ne faisait que l’affaire des criminels qui se sont fait des fortunes. C’est la même chose avec la prostitution.

«Les esprits d’élite discutent des idées. Les esprits moyens discutent des événements. Les esprits médiocres discutent des personnes» [Jules Romains]

@ Denis Drouin,

Je n’ai en aucune façon parlé : « d’action morale », car cela me forcerait à porter un jugement de valeur. En quoi suis-je qualifié pour apprécier qu’une action est morale ou bien ne le serait pas ? Ce n’est pas l’action de répéter une chose qui est immorale, l’immoralité ne vient pas de la périodicité mais plutôt selon moi de la clientèle qui a recours aux services de prostituées.

Ce qui est immoral, selon moi, c’est que pour certaines personnes tout leur est dû, lorsque pour d’autre c’est tout le contraire, ils doivent se battre et travailler fort pour obtenir la moindre petite chose. Et cela, c’est immoral, lorsqu’on vit dans une société qui théoriquement est fondée sur des valeurs et des principes d’égalité.

— Aussi, ce sont les principes d’apparence d’une société évoluée qui sont peut-être encore et toujours à réviser.

Donc, si je comprends bien votre propos, ce qui est immorale dans la prostitution c’est que les client(e)s doivent payer pour ce type de services. Or, une personne qui n’en a pas les moyens ne pourrait pas avoir accès à des services liés à la prostitution. Donc, toujours en suivant votre pensée égalitariste, si l’État nationalisait la prestation des services liés à la prostitution et qu’ainsi tous les citoyens y avaient accès également et gratuitement, alors ainsi vous ne verriez plus rien d’immorale dans la prostitution.

Vous aie-je bien compris ?

Si c’est vraiment là votre ligne de pensée, pensez-vous que toutes les grenouilles de bénitier qui croassent à qui mieux mieux pourraient être d’accord avec vous ? Pensez-vous que tous nos libertariens qui rêvent qu’ à ne devoir obéir qu’à la loi de la jungle, celle du plus fort, vont se mettre à fréquenter les bordels subventionnés ?

C’est bizarre mais malgré ce que vous écrivez noir sur blanc, j’ai la très forte impression que telle n’est pas votre pensée profonde en ce qui concerne le phénomène de la prostitution.

Je pense que nous nageons ici dans une certaine confusion. Égalité, justice, moralité. Que voila des termes qui engendrent des pensées et des idées touffues voire confuses. Mais n’oublions pas que dès la naissance nous ne sommes pas, et de loin, tous égaux.

«Agis comme si la maxime de ton action devait être érigée par ta volonté en loi universelle de la nature.»
[Emmanuel Kant]

@ Denis Drouin,

Hélas, monsieur Drouin, je ne vois réellement pas où vous voulez en venir. Si ce n’est que vous cherchez à dessein à vouloir me faire bien mal paraître. Vous me faites regretter aussi de vous avoir répondu par courtoisie et par politesse.

Ais-je jamais parlé où que ce soit de nationalisation de la prostitution ? — Il faudrait que vous vous missiez en accord avec vos propos. Récemment vous m’accusiez d’être un idéologue néo-libéral et aujourd’hui vous me prêtez une idéologie de collectiviste. Vous n’êtes manifestement pas à une contradiction près ou bien vous écrivez tout ce qui vous passe par la tête comme autant de bouffées délirantes qui viennent à éclore sous vos doigts.

Vous dites : « si l’État nationalisait la prestation des services liés à la prostitution et qu’ainsi tous les citoyens y avaient accès également et gratuitement, alors ainsi vous ne verriez plus rien d’immorale dans la prostitution. » (sic)

— Comment pouvez-vous écrire des choses aussi monstrueuses ? Autant aussi nationaliser l’esclavage pendant qu’on y est !

Vous ajoutez : « C’est bizarre mais malgré ce que vous écrivez noir sur blanc, j’ai la très forte impression que telle n’est pas votre pensée profonde en ce qui concerne le phénomène de la prostitution. » (ita sic)

— Pourriez-vous apporter la preuve de ce que vous avancez ? Avez-vous la clairvoyance pour lire dans mes pensées ? Vous n’avez pas le droit d’incriminer qui que ce soit sur la base de seules impressions. Cela relève de la déraison. Si vous avez le moindre doute, je suis tout disposer à passer le test du polygraphe à vos frais sur ce beau sujet.

Lorsque vous concluez : « Mais n’oublions pas que dès la naissance nous ne sommes pas, et de loin, tous égaux. » (ita sic ad nauseam)

— Par de si singulier propos, vous assumez pleinement en toute indignité : que l’inégalité est justifiée et que des privilèges accordés pour les uns et rien pour les autres, que cela va vraiment de soi. Vous estimez en toute indécence qu’il n’est pas de remède contre les inégalités, puisque la chose est avérée dès la naissance lorsqu’il est dans l’ordre des choses que cette inégalité innée se perpétue jusqu’à la mort.

— Par la nature même de vos mots empreints d’un sinistre cynisme, vous pourvoyez que toutes les formes de crimes et de prostitutions soient pleinement justifiables par la raison même de cette de inégalité depuis la naissance.

Et lorsque vous avez l’audace de dire : « Pensez-vous que tous nos libertariens qui rêvent qu’ à ne devoir obéir qu’à la loi de la jungle, celle du plus fort, vont se mettre à fréquenter les bordels subventionnés ? »

— En dehors des fautes de grammaire et de syntaxe, vous estimez en quelques sortes que la prostitution ne relève ni plus ni moins que du libre marché, de la loi de l’offre et de la demande, qu’il va de soi qu’elle ne soit pas réglementée puisque c’est selon vous une activité économique comme une autre, justement résultante de cette inégalité de la naissance, égalité qui se devrait suivant votre logique malsaine, d’être perpétrée jusqu’à la mort. Comme si la naissance pour les uns résulterait d’une sorte irrévocable malédiction ; lorsque pour les autres, cela résulterait d’une irrévocable bénédiction. Bref, irrationalité et déterminisme avec vous ne font qu’un !

— En conclusion : toujours en vous suivant, vous allez loin au niveau de l’immoralité dans toute sa répugnance, je devrais estimer à l’instar de vous, que toutes les misères du monde sont dans ce cas parfaitement justifiées. Lorsque dès la naissance les jeux sont d’ores et déjà faits. — Non merci, Dieu me préserve de ne jamais embrasser cette malsaines et perverses idéologie qui inopportunément vous anime. Je vous plains.

En ce qui me concerne, ce débat est clos.

La prostitution a le don de faire monter les grenouilles de bénitier aux barricades. Mais son immoralité est exclusivement dans l’oeil de celui qui regarde. «Si ton oeil te scandalise, arrache-le et jette-le au feu.»

Je suis toujours étonné de constater que celui qui accuse le plus utilise justement les procédés qu’il dénonce. En plus il interprète par le prisme même de sa propre subjectivité mes propos.

Dès la naissance les humains sont rarement égaux. Les uns naissent dans un corps en pleine santé qui les fera vivre centenaires, d’autres ne passeront même pas le stage de l’enfance. Je n’y vois là aucune égalité.

Il en va de même de ceux et celles qui naissent avec une cuiller dorée dans la bouche alors que d’autres, des quasi voisins même, vivront dès le départ dans la dèche. L’inégalité est partout à nos portes, chez notre voisin peut-être. Alors monter sur des grands chevaux tout en jouant aux sépulcres blanchis devient extrêmement risible.

Je me rends compte que le sujet de ce billet est de nature à déstabiliser beaucoup de bien-pensants. Ils sont souvent ceux qui jettent le plus de pierres. Leur propre turpitude, qu’ils essaient d’oublier, les rattrapes sauvagement quand ils sont mis au pied du mur. Ils en viennent alors à attribuer à celui qui les aiguillonne et qui leur souligne leur propre illogisme et leurs propres contradictions tous les torts qu’ils portent en eux-mêmes. Peut-être ont-ils le sentiment profond que leur vie n’est pas aussi édifiante qu’ils l’auraient souhaité. Peut-être ont-ils raisons. Mais ce n’est pas suffisant comme raison d’accuser d’immoralité celui qui les pousse à se regarder eux-mêmes.

Quoiqu’il en soit, j’espère que même les prostitués pourront « jouir » d’un paisible et joyeux Noël !

«Combien de vertus apparentes cachent souvent des vices réels ! Le sage est sobre par tempérance, le fourbe l’est par fausseté.»
[Jean-Jacques Rousseau]

« Il serait aisé de prouver que tout gouvernement qui, sans se corrompre ni s’altérer, marcherait toujours exactement selon la fin de son institution, aurait été institué sans nécessité, et qu’un pays où personne n’éluderait les lois et n’abuserait de la magistrature, n’aurait besoin ni de magistrats ni de lois. » — Jean-Jacques Rousseau (expurgé de : Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes)

Jean-Jacques Rousseau ajoute : « Les distinctions politiques amènent nécessairement les distinctions civiles. L’inégalité, croissant entre le peuple et ses chefs, se fait bientôt sentir parmi les particuliers et s’y modifie en mille manières selon les passions, les talents et les occurrences. »

— Vous avez écrit dans vos tous premiers commentaires qui m’étaient adressés :
« Je suis d’accord avec l’ensemble de votre commentaire, (Une fois n’est pas coutumes … 😉 ). »

Il faut en conclure que cette première phrase était un leurre puisque pratiquement vous n’étiez pas du tout d’accord avec moi. Pas plus d’ailleurs que vous n’êtes d’accord par la nature de vos propos avec ceux de Jean-Jacques Rousseau que vous citez comme à votre habitude à toutes fins hors contexte.

En termes clairs, vous n’êtes seulement d’accord qu’avec vous-même et vous illustrez par votre argumentation de manière parfaite comment cette inégalité initiée par des chefs se fait sentir parmi les particuliers et dans toute la population. Au lieu donc d’engager sainement des dialogues paisibles, des débats sereins et constructifs, vous préférez plutôt toutes les formes de conflits et de chicanes par la confrontation avec des personnes à qui vous prêtez des mots, des paroles et même des pensées jamais formulées.

Ainsi vous avez personnifié le mal comme n’étant nul autre moi, jusqu’à faire de ma personne rien de moins que votre souffre-douleur.

Vous voudriez nous faire boire en cette veille de Noël votre ton aigre-doux et pisseux comme s’il s’agissait du meilleur des vins de Champagne. J’aime mieux boire de l’eau claire comme toutes ces « grenouilles de bénitiers » (selon vos mots) dont vous êtes culturellement issues et dont par l’effet de votre propre enflure vous ne faites de toute évidence qu’abhorrer.

Pour quelqu’un qui avait décidé de clore le débat «En ce qui me concerne, ce débat est clos.» (23 décembre 2013 à 22 h 16 min ), il faut remarquer que vos babines ne suivent pas vos bottines. Mais c’est votre droit.

Quand j’ai écrit «Je suis d’accord avec l’ensemble de votre commentaire,[…] » j’étais sincère. Le point sur lequel je ne suis toujours pas d’accord vient de votre propre phrase : «Au fond, ce qui est immoral, ce n’est pas la prostitution en tant que telle, c’est plutôt que ce sont toujours les mêmes qui aient accès à ce genre de services, tandis que d’autres n’y auront jamais, désespérément pas accès.» Toutes mes remarques sur votre phrase tentaient d’en démontrer le non-sens. rein de plus, rien de moins.

Il est donc remarquable que cet unique point de désaccord ait engendré chez vous l’impression persistante que je vous personnifie comme étant le mal. Peut-être avez-vous de la difficulté avec la critique et que par réflexe d’autoprotection vous attaquez justement sur des points qui n’appartiennent qu’à vous. Peut-être voyez-vous plus loin ou plus en profondeur sur vous-même que le regard que j’osais porter sur vos propres réflexions. Pour parler net, les procès d’intention que vous m’imputez n’appartiennent qu’à vous. Mais je dois vous avouer que lorsque je perçois un raisonnement à deux niveaux et qu’en plus le processus engendre des contradictions inhérentes à l’existence-même des différents niveaux, j’aime bien vous donner de la corde et observer ensuite comment vous vous en servez. Je dois avouer que le processus est très révélateur.

La constante que j’essaie consciemment de maintenir dans tous mes commentaires tient justement à mettre le doigt sur les contradictions et le non sens des arguments offerts sur la place publique par les uns et les autres. Alors comme vous êtes particulièrement prolifique de commentaires, vous avez très souvent l’occasion d’ouvrir la porte à une personne comme moi qui tient pour important de souligner les non-sens et les contradictions inhérents à la réflexion proposée.

Malgré tout je vous souhaite sincèrement un Joyeux Noël M. Drouginsky.

« Notre vie ici-bas, à quoi ressemble-t-elle ? À un vol de corbeaux qui, venant à poser leurs pattes sur la neige, parfois y laissent l’empreinte de leurs griffes.» [Su-Dong-Po]

Mes commentaires visaient exclusivement à exprimer mon opinion relative à l’article écrit ci-dessus pas Jérôme Lussier avec lequel je suis parfaitement en accord. Avez-vous lu seulement cet article ? Mes commentaires forment un tout et selon moi ou bien on reçoit l’ensemble de mes mots avec bienveillance ou alors aucun.

Pour votre mémoire Jérôme Lussier écrit ceci : « La prostitution détruit des vies. Parfois littéralement ; plus souvent en éliminant durablement l’estime de soi et la possibilité de construire des relations humaines enrichissantes et fécondes. »

Ma phrase fait directement référence à ce passage : « Au fond, ce qui est immoral, ce n’est pas la prostitution en tant que telle, c’est plutôt que ce sont toujours les mêmes qui aient accès à ce genre de services, tandis que d’autres n’y auront jamais, désespérément pas accès. » En d’autres termes ce qui détruit l’estime de soi, ce sont ces gens qui se croient supérieurs (comme vous) et à qui tout est dû.

J’ai beau chercher de toutes mes forces pour vous être agréable, je ne vois rien ici qui relève du non-sens, suivant vos propres mots : « Toutes mes remarques sur votre phrase tentaient d’en démontrer le non-sens. rein de plus, rien de moins. »

— Vous ajoutez : « Il est donc remarquable que cet unique point de désaccord ait engendré chez vous l’impression persistante que je vous personnifie comme étant le mal. » — Mais monsieur Drouin, cela fait six mois que pour un oui pour un non vous me traitez de tous les noms. Vous devriez vous relire. Si c’était un unique point il n’y aurait pas de problème. L’erreur est humaine, pas l’acharnement dont je suis l’objet !

— Quand vous écrivez : « Mais je dois vous avouer que lorsque je perçois un raisonnement à deux niveaux et qu’en plus le processus engendre des contradictions inhérentes à l’existence-même des différents niveaux, j’aime bien vous donner de la corde et observer ensuite comment vous vous en servez. Je dois avouer que le processus est très révélateur. » —Dois-je comprendre que vous soyez un être supérieur au point de me traiter comme un âne attaché à une corde à qui on laisse de temps en temps un peu de lest ? Juste pour voir ! Rien que pour l’observation scientifique, quoi ! Les uns préfèrent des souris, tandis que Drouin se paye Drouginsky gratis ! (Am I so affordable for you ?)

En somme monsieur Denis Drouin, je conclus que vous êtes mon seigneur et maître. Vous donnez de la corde en tout seigneur tout honneur et mettez le doigt sur mes contradictions puisque c’est le rôle dévolu du maître envers son esclave.

Je ne saurais dans ce cas que trop vous remercier (ou plutôt jamais assez) pour l’excellence de vos soins. Soyez par conséquent « Votre Grâce » assuré désormais de ma dévotion la plus absolue, de ma soumission la plus totale à « Votre Grandeur », la plus stricte obéissance ; que désormais je vais boire vos paroles comme si c’était le breuvage des dieux. Bref pour revenir au sujet je serai vôtre courtisan(e), vous pourrez tout exiger de moi et pour vous tout sera gratis ! Oui ! Oui vraiment gratis ! Tout cela n’est-il pas désormais en tout point conforme à vos vœux ?

Merci !

«Si ceux qui disent du mal de moi savaient exactement ce que je pense d’eux, ils en diraient bien davantage.»

[Sacha GUITRY]

«Être attentif à quelqu’un, c’est le compliment le plus sincère qu’on puisse lui faire.»
[Walter Anderson]