Il y a quelques jours encore, le Québec voguait tranquillement vers son nouveau projet de société : tenir une élection autour de la Charte des valeurs.
Nous étions prêts, selon nos allégeances, à dessiner une moustache de Hitler sur les pancartes de Pauline Marois, à accuser Philippe Couillard de vouloir transformer le Québec en Arabie saoudite ou, dans le cas de la CAQ, à passer totalement inaperçus. Aujourd’hui, seule la CAQ respecte ce plan de match.
Exit la Charte, nous voilà plutôt en train de parler de la monnaie d’un Québec indépendant (René Lévesque, ira-t-il sur le 5 $, le 10 $ ou le 100 $ ?) et de la question d’un éventuel référendum (je propose «Tout de suite ou un autre tantôt ?»).
Mais que s’est-il passé ? A-t-il vraiment suffi du poing en l’air de PKP pour que tout chavire ?
Un geste si naturel que PKP l’a tenu quelques instants, le temps que les photographes puissent immortaliser sa spontanéité, et qui a mis le Canada en panique.
«Manitoba mayor shocked to learn his local community newspaper is owned by a separatist media mogul», annonce le National Post, dans un loooong article dont le titre est digne du journal satirique Le Navet. La campagne de propagande PKPéquiste s’étend jusque dans les Prairies, le Canada est en danger. Pour peu, on s’attendrait presque à voir Justin Trudeau annoncer qu’il met son siège en jeu.
Depuis jeudi matin, Pauline Marois tente de remettre le génie dans le tube de dentifrice, et on a presque le goût d’aller l’aider.
Toute la campagne au Québec s’est transformée en reprise des campagnes référendaires de 1980 ou de 1995 et, comme une reprise du Temps d’une paix à ARTV, ce n’est pas moins lassant la deuxième ou troisième fois.
Assez ! Je vous en supplie : ramenez-moi le débat sur la Charte! Les occasions de le faire ne manquent pas.
Prenons par exemple ce sondage qui nous apprend que 53 % des Québécois croient que le Québec est menacé par l’extrémisme musulman. Le 47 % restant s’inquiète quant à lui des 53 % qui croient que le Québec est menacé par l’extrémisme musulman.
Ou alors, prenons Janette Bertrand et ses «Janette» (à ne pas confondre avec le groupe rock des années 1950 du même nom), qui ont rendu public leur mémoire.
Celui-ci comporte malheureusement quelques failles et s’il était un article sur Wikipédia, il serait chapeauté de cet avertissement :

Quelques extraits :
«Aucune religion ne fait avancer l’égalité entre les femmes et les hommes.»
«Les autres religions vont plus loin encore. La femme est au service de l’homme, sa propriété.»
J’aimerais bien dire «je pourrais continuer longtemps comme ça», mais ce serait faux : le mémoire ne fait que trois pages quand on enlève la page de garde, la présentation du mouvement et la copie de la lettre qui l’a lancé.
Bref, le mémoire des «Janette», c’est un peu comme la Bible : il demande d’avoir la foi en ce que dit son auteure et ne cite pas beaucoup de sources vérifiables.
Ou bien, si on veut vraiment ramener le débat sur la Charte, pourquoi ne pas parler de Louise Mailloux, cette candidate du PQ qui croit que de baptiser un enfant, c’est comme le violer ?
Ouin… Bon. Je n’ai rien dit.
Et si on jasait de référendum ?
* * *
À propos de Mathieu Charlebois
Ex-journaliste Web à L’actualité, Mathieu Charlebois blogue sur la politique avec un regard humoristique depuis 2014. Il est aussi chroniqueur musique pour le magazine L’actualité depuis 2011 et co-rédacteur en chef du webmagazine culturel Ma mère était hipster, en plus d’avoir participé à de nombreux projets radio, dont Bande à part (à Radio-Canada) et Dans le champ lexical (à CIBL). On peut le suivre sur Twitter : @OursMathieu.
Bonsoir,mais nous de la musique!!!!
Est-ce qui quiconque croit vraiment que Louise Mailloux voulait dire un vrai viol? Est-ce que personne n’a compris qu’elle parlait d’un « viol moral » : soit de prendre un être humain et, même sans lui faire subir de sévices sexuels, de violer son intégrité pour en faire notre objet. Comme ici quand on prend un bébé et qu’on en fait un « bébé chrétien » ou un « bébé musulman » ou autre? L’exemple de Mailloux est qu’il serait tout aussi absurde de parler de « bébés communistes »…
Les commentaires outrés à propos de cette histoire me désespèrent.
«Nous étions prêts, selon nos allégeances, à dessiner une moustache de Hitler sur les pancartes de Pauline Marois…»
C’est curieux, moi je combats la séparation du Québec, de même que le nationalisme – ce qui me fait bien peu d’amis, tant dans la capitale provinciale (et pas « nationale », comme on dit souvent par erreur) que dans la capitale fédérale (et pas « nationale », comme on dit souvent par erreur) – mais ce à quoi je suis prêt, ce n’est pas du toutà dessiner des moustaches d’Hitler sur les affiches de Marois, c’est bien sûr à briser sans merci, si il ou elle refuse de s’instruire adéquatement, quiconque, après avoir lancé une accusation de fascisme, ou de nazisme à plus forte raison, se révèle ensuite incapable la soutenir, de spécifier les facteurs du minimum fasciste. M. Charlebois banalise le nazisme et l’Holocauste. Celui qui (pour en rester à ce seul exemple) dessine des moustaches d’Hitler à Marois doit ensuite prouver ce qu’il avance, il doit en faire la démonstration circonstanciée, proportionnelle à l’extrême gravité de l’accusation: car «définir le fascisme, c’est en écrire l’histoire» (A. Rossi, pseudonyme d’Angelo Tasca, dans ‘Naissance du fascisme’, 1934-1938). C’est à ça que je me prépare depuis plus de quinze ans: la lutte à finir contre le galvaudage des fascismes. Que ce galvaudage vienne du camp fédéraliste ou du camp séparatiste, je n’en ai cure, car n’étant pas membre d’un parti, je ne suis pas borgne.