Raymond Gravel : le résistant

«Rares sont ces hommes qui ont si clairement présenté le dilemme spirituel et moral dans lequel chacun de nous s’est un jour retrouvé», dit l’auteur Eric Dupont.

Raymond Gravel (Photo: Ian Barrett/La presse canadienne)
Photo: Ian Barrett/La Presse Canadienne

PolitiqueJe venais de quitter Rome pour la quatorzième fois quand j’ai appris la mort de l’abbé Raymond Gravel. Rome qui en avait fait un messager de Dieu ; Rome à qui il aimait bien rappeler comment vivent vraiment les hommes. Raymond Gravel appartenait à la seule vraie catégorie de croyants : ceux qui doutent.

J’essaie de comprendre pourquoi j’ai pleuré. Je ne le connaissais même pas.

De ce qu’il était, je n’avais qu’une connaissance médiatisée, probablement fausse. Peut-être avait-il réussi à attirer vers lui l’affection et le respect envieux que l’on tend à porter à ceux qui résistent. Existe-t-il un qualificatif plus juste que « résistant » pour qualifier celui qui, éblouissant d’honnêteté et de candeur, avait réussi à faire sa place dans mon église construite sur tant de mensonges et siéger dans leur parlement où flotte le remugle tenace du cynisme ? Mais si tu crois tant à la liberté, que fais-tu donc dans ces galères, mon frère ? Car c’est comme ça que je l’appelais en pensée chaque fois qu’il nous rappelait, par l’ardeur de sa foi et de son espérance que nous sommes tous dans le même bateau.

Mais ce n’est pas pour ça que j’ai pleuré.

Aux oreilles romaines, Raymond Gravel parlait trop. Ceux qui le connaissaient et cherchaient son réconfort savent qu’il écoutait avant tout. Rares sont ces hommes qui ont si clairement présenté le dilemme spirituel et moral dans lequel chacun de nous s’est un jour retrouvé. Rares sont ceux qui, comme lui, ont réussi à me ramener à l’occasion vers une église qui, il me semblait, n’avait jamais eu rien à me dire. « Pourquoi tu vas toujours à l’église catholique, après tout ce qu’ils ont fait au homosexuels ? » m’avait demandé un jour l’écrivaine Perrine Leblanc, perspicace. L’apostolat de Raymond Gravel pourrait peut-être tenir lieu de réponse. Dans l’église de l’abbé Gravel, les portes n’étaient pas dotées de serrures.

Je pense que j’ai pleuré parce que je ne lui ai jamais parlé.

* * *

Eric Dupont est écrivain, professeur et chroniqueur pour L’actualité. Il a publié quatre romans aux éditions Marchand de feuilles dont La Fiancée américaine en 2012. 

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J’espère que vous n’avez pas pleuré les tendances anti-juives et anti-israéliennes de Raymond Gravel. Raymond Gravel se vantait même en 2009 qu’il aurait pu être un terroriste. A preuve, il affirme que:
1) le terrorisme est largement la faute de l’Occident et d’Israel;
2) Israel se comporte en état nazi;
3) les Juifs sont en guerre depuis 2000 ans;
4) les Juifs ne sont pas le peuple élu.

Gravel est un individu qui:
1) “lancerait des roquettes si on traitait les Québécois comme les Israéliens traitent les Palestiniens”.
2) est “beaucoup plus contre ceux qui provoquent le terrorisme que contre les terroristes”;
3) méprise les pharisiens (i.e. les ancêtres spirituels des Juifs).

Gravel est un individu pour qui:
1) un navire ne contenant aucune cargaison humanitaire et brisant illégalement un blocus (le Mavi Marmara) pose un geste humanitaire! Et le pays qui commet le geste légal d’arraisonner ce navire est inhumain!
2) Israel est un “état voyou et terroriste”. Mais pas la Syrie…
3) “Israel agit de manière violente et inhumaine à l’égard de la population civile de Gaza”.
4) 160 000 Syriens massacrés méritent moins de réaction verbale de sa part que 160 terroristes palestiniens éliminés.

Mes condoléances à sa famille, néanmoins. Les citations viennent de mon assez longue correspondance avec lui. Les non citations résument la substance de ce qu’il écrivait.

Donc il n’était pas parfait. Et il lui arrivait d’émettre des opinions avec lesquelles certaines personnes n’étaient pas d’accord. C’est une forme d’hommage …

Beaucoup de personnes, des journalistes, des politiciens, des monsieurs et madames tout le monde, ont reconnu et remarqué cet homme vrai dans ses paroles et ses actions, mais je n’ai entendu aucun commentaire encore de la part de ses pairs de l’église catholique, plutôt curieux même s’il avait la réputation d’être un peu délinquant dans sa gang, j’espère qu’ils auront le courage de lui rendre hommage lors de ses funérailles.

Voilà un article juste qui résume bien la personne qu’il était…

Comment prêter attention à des propos aussi peu « honorable ». Belle tribune pour cracher lâchement sur un simple individu.
Une chance pour toi qu’il y a des débats d’opinions et d’idées libre au Québec !!!
Le plus ironique dans tout cela, c’est que l’abbé Gravel t’aurait pardonné 🙂

Mes condoléances à sa famille, qu’il repose maintenant en paix.

@Plus juste: Raymond Gravel était très fiers des propos que je rapporte. Ils correspondent d’ailleurs très bien à un courant fort répandu dan des milieux comme la gauche, le Bloc Québécois ou le syndicat des professeurs de l’UQAM, tous milieux avec lesquels Raymond Gravel se sentait très à l’aise.

Des citations c’est bien beau mais il ne faut jamais en oublier le contexte et chercher à tout généraliser. Quoiqu’il en soi, je ne veux pas ouvrir de débat ou froisser quelqu’un. Tout homme a ses défauts et l’abbé Gravel ne faisait sûrement pas exception. Toutefois, je crois que cette tribune doit saluer l’humain qu’il était dans un Église qui nous semble souvent trop rétrograde et inactuelle.

J’ai eu la chance de rencontrer brièvement cet homme et j’en remercie la vie.

Mes condoléances à tous ses proches ainsi qu’à tous ceux pour qui il a fait une différence.

Je n’ai pas pleuré parce que j’ai eu le bonheur d’avoir pu lui parler; et de l’écouter. Mais surtout de l’avoir vu m’écouter. Et de l’avoir vu écouter l’un et l’autre. Sans parler de ses « sermons » !