L’annonce des candidatures de Bernard Drainville et de Caroline St-Hilaire sous les couleurs de la Coalition Avenir Québec (CAQ) en vue des élections générales de cet automne (dans les circonscriptions de Lévis et de Sherbrooke respectivement) a alimenté le moulin à rumeurs d’un virage souverainiste de la formation de François Legault (le premier ministre dément vouloir préparer un troisième référendum sur l’indépendance).
Un sondage inédit réalisé la semaine dernière par Recherche Mainstreet confirme l’affirmation de l’ancien animateur de radio et ex-ministre péquiste selon laquelle les Québécois n’ont pas d’appétit pour l’indépendance présentement. Les électeurs de la CAQ, eux, sont davantage divisés sur le sujet.
À la question : « Si le gouvernement de François Legault tenait un référendum sur la souveraineté du Québec, voteriez-vous… 1) Pour la souveraineté : le Québec devrait être un pays indépendant, ou 2) Contre la souveraineté : le Québec devrait faire partie du Canada », 67 % des répondants sont d’avis que le Québec devrait demeurer au sein de la fédération canadienne.
La proportion de sondés en faveur de la souveraineté s’élève à 33 %.
Ces résultats concordent généralement avec les enquêtes publiées par diverses maisons de sondage ces dernières années. En décembre 2020, 34 % des participants avaient répondu (après répartition des indécis et de ceux qui ont refusé de répondre) POUR à la question « Si c’était le gouvernement de François Legault qui décidait de tenir un référendum sur la souveraineté du Québec, voteriez-vous POUR ou CONTRE la souveraineté ? » posée par Léger.
En février 2021, les personnes sondées par Mainstreet avaient répondu à 64 % NON à la question « Si le Québec tenait un référendum sur l’indépendance/la souveraineté, comment voteriez-vous ? », et 36 % OUI (voir la liste des sondages sur la souveraineté ici). Le coup de sonde de la semaine dernière semble révéler que les appuis à l’indépendance sont demeurés stables au cours du premier mandat de la CAQ.
Plusieurs analystes affirment fréquemment que la souveraineté du Québec est un projet générationnel. Or, s’il s’agit d’une généralisation parfois exagérée, cette enquête de Mainstreet montre bel et bien un désir de souveraineté nettement plus faible parmi les jeunes électeurs. Chez les 18-34 ans, 73 % voteraient contre l’indépendance et 27 % l’appuieraient.
Du côté des 65 ans et plus, l’écart est plus serré : 57 % contre et 43 % pour.
Chez les électeurs francophones, l’appui à la souveraineté s’élève à 41 %. Par contre, à peine 5 % des répondants non francophones de cette tranche démographique souhaitent faire du Québec un pays indépendant.
En ventilant les résultats de la question référendaire selon les intentions de vote des répondants, nous observons sans surprise que les électeurs libéraux et péquistes se trouvent bien campés sur leurs positions historiques. Toutefois, chez les électeurs caquistes et solidaires, les avis sont beaucoup plus partagés.
Quelque 58 % des électeurs caquistes désirent le statu quo, alors que 42 % voteraient pour la souveraineté. L’an dernier, 40 % des électeurs caquistes affirmaient appuyer l’indépendance.
Du côté de Québec solidaire, nous observons des résultats quasi identiques aux sondages des dernières années : 54 % contre la souveraineté et 46 % pour ce projet.
Évidemment, la prudence est de mise avec les sous-échantillons des sondages, car ils contiennent plus d’incertitude, mais ces chiffres de Mainstreet concordent avec les tendances récentes. Même si les instances du parti se disent officiellement indépendantistes, un peu plus de la moitié des électeurs de QS n’appuient pas la souveraineté.
Plusieurs constats s’imposent à la lumière de ces nouvelles données :
- Les appuis à l’indépendance du Québec sont demeurés généralement stables au cours du premier mandat de la CAQ. Si le désir de faire du Québec un pays n’a pas reculé de façon notable chez les électeurs, il n’a pas progressé non plus. Le nationalisme « à la sauce caquiste » ne fait pas l’unanimité au Québec, mais il semble bel et bien être au goût d’une masse critique d’électeurs québécois.
- Lors de la conférence de presse pour annoncer sa nomination comme candidat caquiste dans Lévis, Bernard Drainville a affirmé que « les Québécois [étaient] ailleurs » au sujet du débat sur la question nationale. D’un point de vue purement chiffré, ces données semblent lui donner raison.
- Encore une fois, la notion de souveraineté demeure bien plus populaire dans l’opinion publique que la formation politique qui en fait le centre de sa plateforme, soit le Parti québécois. Théoriquement, si Paul St-Pierre Plamondon et son équipe parvenaient à rapatrier les électeurs souverainistes sous un même toit (pas juste les purs et durs, mais les modérés), le PQ serait bien plus compétitif qu’il ne l’est en ce moment dans les intentions de vote.
- Toutefois, ces chiffres nous montrent aussi que même si de nombreux Québécois s’affichent ouvertement souverainistes, beaucoup d’entre eux n’ont ni le désir ni la motivation d’embarquer dans cette aventure. C’est à la fois une chance et un désaveu pour le PQ : l’électorat visé est bel et bien présent et pourrait se faire courtiser, mais il semble pour l’instant largement indifférent au parti qui fait la promotion de l’indépendance.
- Malgré tout, quiconque affirmerait que la souveraineté est un projet mort et enterré devrait expliquer comment une idée qui rassemble environ un tiers des Québécois pourrait raisonnablement être ignorée par la classe politique. Certes, le camp du Oui est loin du « 50 % + 1 » requis pour l’emporter, mais l’indépendance n’est pas du tout un projet moribond.
- Toutefois, étant donné que François Legault est, selon les sondages, le premier ministre du Québec le plus populaire des dernières décennies et que lui-même subirait une cuisante défaite s’il demandait aux Québécois de faire l’indépendance (en plus de provoquer l’implosion de son propre parti), il y a loin de la coupe aux lèvres pour le mouvement souverainiste.
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Ce sondage a été réalisé par la maison Recherche Mainstreet auprès de 1 404 électeurs québécois de 18 ans et plus les 9 et 10 juin 2022. La marge d’erreur de l’échantillon total est de ±3 %, 19 fois sur 20. Vous trouverez le rapport du sondage ici.
Ce sondage démontre que Parizeau avait raison: c’est les anglophones et les immigrants qui empêchent le Québec de devenir un pays. Regardez: chez le francophones 41% sont pour l’indépendance! Ça leur prendrait un petit 10% pour remporter leur pari. Les péquiste ont donc bien raison de vouloir réduire, voire fermer, l’arrivée des immigrants. Puis ils ciblent bien quand ils essaient de faire la vie difficile aux anglophones. C’est dommage que les souverainistes restent éparpillés dans trois partis. Dommage pour le PQ, en tout cas.
En fait, cela prendrait 15.3% des 59% qui voteraient présentement non plus 1 autre personne pour faire 50% + 1.
Même si le tiers des Québécois reste fidèle à l’option indépendantiste, le projet n’en est pas moins moribond, puisqu’il n’a aucune chance de succès. C’est pourquoi il nous plombe. Soit dit en passant, allophones et anglophones sont aussi des Québécois.
Les allophones sont ces immigrants qui ne parlent ni le français, ni l’anglais (pas encore du moins) ni une langue autochtone; c’est-à-dire des nouveaux arrivants, dussent-ils avoir déjà leur statut de ¨canadiens¨ québécois. Selon moi, si un sondage était fait parmi cette population en leur demandant s’ils craignent, malgré leur nouveau statut, d’être expulsés du pays s’ils votaient oui au Québec comme pays, j’ai l’impression que la réponse serait ¨Oui, je crains d’être expulsé¨ ! Quant aux anglophones, ils sont d’abord et avant tout des ¨canadian¨ avant, loin avant, d’être des québécois (à quelques exceptions près).
N’en déplaise aux pourfendeurs de la souveraineté, l’idée demeure ancrée chez un pourcentage appréciable de l’électorat. Cela étant posé, c’est le nationalisme qui (encore une fois) rallie le plus fort pourcentage d’électeurs au Québec, ce qui explique en partie l’hégémonie de la CAQ et les résultats lamentables d’un « PLQ-couillardisé-et-canadianisé ». Dans la remarquable série télévisée Duplessis (qui date de la fin des années 1970), Denys Arcand l’avait parfaitement compris : il fait dire à Jean Lapointe (comédien qui incarne Duplessis dans cette série-là) que le parti qui incarne le mieux le concept de nationalisme au Québec finit par gagner les élections. Pareil constat s’est avéré (et s’avère encore) dans la vie politique québécoise. Bien des partis gagneraient à en prendre bonne note.