Une prolongation nécessaire pour la commission Charbonneau

Même avec ce délai, le rapport sera critiqué et attaqué sur le fond, explique le blogueur Brian Myles.

Photo: La Presse Canadienne
Photo : La Presse Canadienne

Le gouvernement Couillard a pris la bonne décision en acceptant de prolonger le mandat de la commission Charbonneau de 10 mois. Le contraire aurait desservi l’intérêt public.
Politique

La professeure adjointe à la Faculté de droit de l’Université de Montréal, Martine Valois, affirmait dans Le Devoir que la commission aurait produit un rapport incomplet sans ce délai de grâce.

Il est trop tard maintenant pour chipoter sur le temps perdu et les occasions manquées par la commission, même s’il y en a eu beaucoup au fil des 261 journées d’audiences. Les sujets n’avaient pas tous la même importance, et la commission a trop souvent avancé à tâtons.

Après avoir investi tant d’énergie et de ressources dans cette aventure, aurait-il été sage de couper court à l’étape la plus importante, soit la rédaction du rapport final — blâmes à la clé —, et la formulation de recommandations pour éviter, à l’avenir, la répétition des scandales de corruption et de collusion ? La réponse est non, bien sûr.

Les libéraux, déjà plus mouillés que tous les autres partis dans les scandales de financement sectoriel, en auraient payé le prix. Même avec le délai de 10 mois, un doute va toujours subsister sur la qualité du rapport en ce qui a trait au financement des partis provinciaux.

La commission en a fait trop peu, trop tard sur ce volet crucial de son mandat. Elle a ignoré des témoins potentiellement importants qui gravitaient dans l’entourage libéral, et elle s’est privée d’une réelle chance de tirer l’affaire au clair, en faisant entendre à huis clos Marc Bibeau, grand argentier bénévole du PLQ et proche de Jean Charest.

Même avec ce délai, le rapport sera critiqué et attaqué sur le fond. Sans ce délai, les libéraux auraient été critiqués, point. On leur aurait reproché, à raison, d’avoir mis des bâtons dans les roues de la commission et d’avoir voulu la freiner, alors qu’elle s’apprêtait à blâmer à la fois le PLQ et l’ancien premier ministre, Jean Charest.

L’éventuel chef du Parti québécois (appelons-le PKP pour les fins de la discussion) aurait passé la durée restante de son mandat à titre de chef de l’Opposition officielle à dénoncer la turpitude des libéraux, son agenda caché, sa servilité à l’égard du pouvoir économique.

Quoiqu’il advienne, le PLQ pourra toujours dire qu’il a donné naissance à la commission Charbonneau, même s’il a voulu en faire une déplorable «patente à gosses» sans pouvoirs au début. Et il pourra dire qu’il ne l’a jamais freinée dans la rédaction de son rapport.

Il appartient maintenant à la commission et à son personnel de livrer un rapport à la hauteur des attentes du public. Elle tombera d’encore plus haut si elle échoue, maintenant que le gouvernement a repoussé l’échéance à novembre prochain.

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À propos de Brian Myles

Brian Myles est journaliste au quotidien Le Devoir, où il traite des affaires policières, municipales et judiciaires. Il a récemment été affecté à la couverture de la commission Charbonneau. Blogueur à L’actualité depuis 2012, il est également chargé de cours à l’École des médias de l’Université du Québec à Montréal (UQAM). On peut le suivre sur Twitter : @brianmyles.

Les commentaires sont fermés.

Tout de même truculent de constater qu’une commission d’enquête qui devait chercher à comprendre les coûts supplémentaires et le non-respect des échéanciers des projets étatiques utiliser exactement le exactement même stratagème pour elle-même…

Bon pour pitou mais pas pour minou!!!

Juste pour comprendre, la Comission chargée d’étudier les extras et les dépassement de coûts dans le secteur de la construction, à dépasser ses délais et ses coûts initiaux. Je précise aussi que la Comission avait déjà obtenu une prolongation de 15 mois de la part du Parti Québecois. Je comprend la « game » politique et les Libéraux pouvaient difficilement dire non, mais je crois qu’il y a des gens aussi à la Commision qu’il l’ont compris…